Cette critique a été rédigée à l’aide d’une boite fournie par l’éditeur que nous remercions.
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J’ai toujours rêvé d’avoir un vélociraptor domestiqué. La plupart des enfants veulent un chaton, une licorne ou Pikachu, moi je réclamais à mes parents une machine à tuer vicieuse avec laquelle j’aurais passé de folles après-midis à courser le Siamois de Timothée, le petit garçon du pavillon d’à côté. Alors imaginez tout un tas de raptors, et puis un T-Rex dans l’enclos suivant, tandis qu’un Allosaure arrache le bras d’un spectateur un peu trop téméraire. Sur le papier, ça fait terriblement envie. Ça tombe bien, après Dinosaur Island sorti en 2017, voilà qu’arrivent deux nouveaux jeux de la gamme, à savoir Dinosaur World et Dinosaur Island : Rawr ‘n Write (RnW).
Les deux tiennent du grand frère, mais prennent des chemins différents dans leur évolution, Dinosaur World étant celui qui reste le plus proche de son prédécesseur. Le concept est classique : à l’aide d’ouvriers, on récolte des ressources (sous, brins d’ADN) et des améliorations et on utilise tout ça pour construire le parc le plus meurtrier amusant du coin. On retrouve d’ailleurs la même idée dans Dinogenics, autre grand classique du jeu à dinos. Tout l’intérêt consiste évidemment à trouver le bon équilibre entre le fun généré par les gros lézards et la menace qu’ils représentent pour les visiteurs. Et de la menace, il y en aura.
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Dinosaur Island – Rawr N’ Write :
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C’est une bonne situation ça, dinosaure ?
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La gamme s’est toujours distinguée par sa volonté de proposer le gameplay le plus thématique possible. Toutes les mécaniques doivent tendre à faire vivre l’expérience Jurassic Park au joueur, c’est la grande idée de Pandasaurus Games. Il y a bien sûr la récolte des brins d’ADN, leur combinaison ou leur dépiautage pour obtenir le matériel génétique nécessaire à la création des dinosaures. Il y a également la menace qu’amène chaque nouvelle bestiole, l’attrait qu’elle représente pour les visiteurs, les sous ou bonus générés par l’afflux massif de clients, et ainsi de suite. Mais ça va plus loin. Dans Dinosaur Island, nous avions par exemple les resquilleurs qui rentraient dans le parc sans payer, et se servaient des autres visiteurs comme bouclier humain en cas de petit creux du T-Rex.
La volonté est louable, et parfois ça marche. Et d’autres fois pas vraiment. Les fraudeurs de Dinosaur Island sont d’ailleurs l’exemple parfait de la fausse bonne idée. Leur apparition est totalement aléatoire (on pioche un nombre de visiteurs dans un sac), elle ne peut pas être gérée ou anticipée et va désavantager le joueur qui en hérite, juste comme ça, pour le fun.
On a le même cas de figure avec Dinosaur World et sa mécanique de visite du parc. Encore une fois, ça se veut très thématique, puisque le fun généré par les installations baisse à chaque fois qu’on les visite (On suppose donc que ce sont systématiquement les mêmes visiteurs qui se pointent dans le parc, mais c’est un détail.). Le problème, c’est qu’on doit lancer un dé de danger lors de la visite des enclos à dinosaure, et ce dé a des valeurs très pénalisantes. Comme, à l’inverse, le fun généré diminue (et finit par devenir négatif), on se retrouve lors de la manche finale avec des enclos au ratio danger/fun clairement défavorable et on se résout à se rendre au centre de sécurité ou à la boutique plutôt qu’à aller jeter des chèvres aux T-Rex qu’on s’est échiné à créer pendant toute la partie. Le thème en prend un bon coup dans les gencives : voir le Dr Grant essayer des bobs en mangeant des hot-dogs pendant 90 minutes aurait donné un tout autre cachet au film de Spielberg, à n’en pas douter.
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Dinosaur World :
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S’il te plait, dessine-moi un stégosaure
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Etonnamment le même principe n’est pas gênant dans RnW. Tout d’abord, on se débarrasse de la mécanique malvenue et fastidieuse du fun qui décroit, ainsi que du dé de danger à lancer à chaque passage chez les dinosaures. Les joueurs doivent ici aussi visiter leur parc en essayant de passer par de nouvelles installations à chaque fois, mais RnW rend l’affaire plaisante, parce que ça vient récompenser tous les efforts fournis pour dessiner correctement notre parc, en plaçant intelligemment enclos, routes et magasins pour atteindre de nouvelles sorties et augmenter nos points de fin de partie.
Tout dans le jeu fonctionne d’ailleurs très bien. Attention, contrairement à ce que son nom pourrait laisser supposer, il ne s’agit pas d’un Roll & Write. Certes, les dés sont lancés à chaque début de manche, mais chaque joueur s’en accapare deux pour gagner les ressources indiquées, puis les utilise comme ouvriers pour réaliser lors de la phase suivantes les actions qui permettront de construire son parc. Il faudra choisir entre poser des enclos, les relier avec des routes, mettre des dinosaures dedans, ou encore embaucher des experts pour améliorer la sécurité, c’est très classique et très efficace, avec juste ce qu’il faut d’interaction pour épicer le tout : sur chaque dé est inscrit un nombre de menaces, et poser son dé sur un autre parce qu’il occupe l’emplacement d’action désiré oblige le joueur à augmenter la menace de son parc d’autant de crans qu’il y avait d’icônes sur le dé du dessous. On calcule chaque action, la menace qu’elle apporte, les bonus qu’elle permet de débloquer, on dessine notre parc, on s’amuse.
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J’ai dépensé, j’aurai dû compter
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C’est beaucoup moins le cas dans Dinosaur World. On l’a déjà dit, la visite du parc n’est pas exactement la trouvaille ludique de l’année. Mais il y a aussi un gros problème de rythme. Il faut savoir que quasiment toutes les étapes d’une manche sont en simultané. A la lecture des règles, il y a grande réjouissance, on se dit qu’on évite ainsi les temps morts. Que nenni ! La première phase (et la deuxième également, mais c’est surtout la première qui pose problème) se fait au tour par tour, et elle. Est. Terriblement. Longue. Pendant cette phase, chaque joueur doit choisir quel lot d’ouvriers il va réquisitionner pour la manche : comme chaque ouvrier a une couleur et une spécialité, et rapporte des bonus si on l’assigne à certains emplacements bien précis, ce draft nécessite de prévoir l’entièreté des actions que l’on souhaite entreprendre pendant les trois phases qui suivent, là, maintenant, tout de suite. Alors les joueurs prennent un paquet d’ouvriers, les posent sur leur plateau, ils calculent, ils en prennent d’autres, on recommence, et on se tourne les pouces en attendant. Oui, je ne suis pas un monstre, je n’allais pas exiger que chacun fasse toute sa planification dans sa tête. Nous souffrons déjà bien comme ça.
Peut-être que nous étions tous atteints d’analysis paralysis, ou peut-être qu’au contraire il fallait y aller les mains dans les poches, mais quel intérêt ? Il y a tellement de paramètres à gérer, entre l’argent, le fun, la menace, le placement des installations dans le parc, la création des dinosaures, qu’il est extrêmement frustrant de se retrouver bloqué parce qu’on ne peut pas utiliser de scientifique pour cette action ou d’administrateur pour celle-là. La mécanique marche dans Paladins des Royaumes de l’Ouest parce qu’on choisit un lot de 4 ouvriers. Quand Dinosaur World nous demande d’en prendre un paquet de 9, ce n’est plus aussi amusant. C’est bien dommage qu’il s’agisse là de la seule interaction entre les joueurs ou presque.
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Le plus dur, c’est l’atterrissage (dans l’enclos à Raptors)
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Au final, la boite de Rawr ‘n Write a bien gagné sa place sur mes étagères, alors que Dinosaur World ira prendre la poussière. Chaque point fort du premier est un point faible du second, il est plaisant, simple mais pas simpliste, logique, interactif, fluide et on peut dessiner des dinosaures dans nos enclos. Evidemment, ce n’est pas le jeu parfait et un Dinogenics offrira plus de contenu et demandera plus de réflexion avec son vague air un peu d’austère d’Agricola chez les sauriens. Les deux jeux ne boxent pas vraiment dans la même catégorie, mais si vous cherchez un jeu pour initiés, avec de chouettes illustrations et des couleurs flashy, alors Dinosaur Island: Rawr ‘n Write mérite toute votre attention.
Justement, en parlant d’un jeu de dés, le revoici avec un jeu dont la source d’inspiration ne manquera pas de rappeler un certain Yams !
A vos dés, prêts ? Scorez !
Contrairement à Gang of Dice, ici point de tentative de l’auteur de nous vendre du rêve ou de mettre un thème, on est sur un pur jeu de scoring.
Mais surtout on est sur du stop ou encore et de la prise de risque pour viser le plus haut score !
Avec des règles qui s’expliquent en quelques secondes, le jeu fait le pari de lancer les personnes autour de la table dans un jeu qui semble tout ce qu’il y a de plus banal à la lecture desdites règles, mais dont le secret réside dans l’interaction totalement indirecte qu’il va y avoir !
Interaction, vous avez dit interaction ?
Pardon pour cette phrase quelque peu trompeuse, l’interaction ne se fera que verbalement, en effet, impossible d’influencer le jeu en lui-même !
Mais influencer les autres pour les pousser à l’erreur de jugement va faire le sel du jeu et va le rendre bougrement addictif !
Bien sûr, quoi de plus addictif que de tenter de relancer les dés une dernière fois pour rattraper son retard de points, surtout quand la foule encourage ce dernier lancer qui pourra soit faire gagner la manche en cours, soit au contraire totalement vous plomber !
Donc l’interaction réside dans les personnes autour de la table, jouez-le en vous murant dans le silence et le pur calcul, et vous aurez un jeu ressemblant au Yams mais sans grosse saveur.
Chambrez les autres sur leurs lancers foireux, poussez-les à arrêter maintenant ou, au contraire, à pousser leur chance et voyez-les échouer pour mieux leur rire au nez (ou vous faire rire au nez quand on vous aura écouté et qu’on aura battu votre score !), et vous aurez un jeu pour lequel vous ne verrez pas les 7 manches passer et pour lequel vous aurez envie de rejouer une partie aussitôt après !
Je me dois de parler un peu de la mécanique du jeu en expliquant les règles succinctement :
On prend 7 cartes (sur les 21 que contient la boite) qui vont servir à suivre les manches jouées et à indiquer comment le scoring va se dérouler durant la manche en cours.
Une personne prend les 7 dés et tente de marquer le plus haut score possible en décidant quand s’arrêter selon les critères de relances possibles et sur la manière dont les dés seront comptabilisés.
Souvent, on perdra des points si on ne satisfait pas aux critères de la manche en cours et finir à 0, ou avec un score négatif, nous privera de points pour cette manche.
Une fois que tout le monde a joué son tour, on regarde qui a marqué le plus grand score et on lui décerne une médaille d’or, une d’argent pour la 2ème place et une de bronze pour la 3ème.
En duo, seules les médailles d’or et de bronze sont décernées et surtout à 4 et 5, respectivement 1 et 2 personnes n’auront aucune médaille.
On réinitialise les points pour la manche suivante et on enchaine jusqu’à la fin.
Une fois les 7 manches terminées, on compte qui a le plus grand score sachant qu’une médaille d’or rapporte 3 points de victoire, une d’argent 2 points et la bronze 1 point.
Voilà, c’est aussi simple que ça (et vous avez l’intégralité des règles en fait…) !
La rejouabilité est assurée car, déjà le fait que ce soit un jeu de dés permet de ne jamais avoir les mêmes parties enchainées, mais en plus 21 cartes assurent de ne pas toujours voir les mêmes manches d’une partie à l’autre !
L’égalité des chances
Ce qui m’a le plus plu dans ce jeu, c’est le fait que tout le monde peut gagner, il suffit de prendre de bonnes décisions, de faire de son mieux et de s’adapter.
J’ai joué au jeu en duo et c’est ultra rapide et nerveux, on peut enchainer les parties et ce n’est pas toujours la même personne qui va gagner (même si je dois avouer que ma femme est plutôt douée à ce jeu !), je l’ai aussi joué avec mamie, 90 ans et joueuse de belotte et autre Rummikub, elle s’amuse beaucoup avec et, elle aussi, réussit à gagner !
Et même en jouant à 5, si parfois certains tentent de faire un peu d’analysis paralysis, le jeu reste rapide, et le chambrage aide beaucoup à faire accélérer les plus lents !
C’est aussi à 5 que les vannes fusent le plus et que les rires et déceptions s’enchainent !
En bref, High score est devenu un jeu de dés qui va être incontournable pour moi et mes amis et en famille, simple d’accès, rapide, nerveux et facile à expliquer, il a tout pour plaire et faire le boulot : amuser sans prise de tête et en franche rigolade (pour peu que tout le monde joue le jeu bien sûr !).
Je lui reproche quand-même deux choses : la finesse des cartes et de la piste de score et des jetons, ils risquent de s’abîmer avec le temps, car après quelques dizaines de parties, le carton commence à blanchir.
Dommage car les dés sont très jolis et le jeu va forcément sortir souvent !
Le dernier jeu livré de chez Holy Grail Games, éditeur nancéen, appelle au voyage. Un point positif que je retiens avec eux, c’est les thèmes souvent différents et tranchés qu’ils proposent. Récemment j’ai pu jouer à leur dernier projet, Copan, et le déclin d’une cité aztèque. Dominations nous mettait aux prises avec un thème de civilisation de tribus primitives. Rallyman Gt et Dirt, bah vous avez compris le thème normalement. Museum est celui qui se rapproche le plus de Encyclopedia, avec cette patine historique, ce côté découvertes artistiques et/ou culturelles, et ce rôle de chercheur/explorateur.
J’aime quand un thème n’est pas seulement plaqué mais partie intégrante du jeu et de la proposition. Copan m’avait particulièrement séduit en ce sens.
Concernant Encyclopedia, le côté mécanique du jeu va prendre le dessus plus ou moins vite selon les joueurs, mais la qualité du matériel et des illustrations va tout de même nous maintenir dans ce thème de la création de cette encyclopédie de l’histoire naturelle.
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Mécanique naturelle
Ce ne sera pas faire injure au jeu de souligner l’importance des mécaniques qui vont vous driver tout au long des parties. D’ailleurs il suffit de dérouler les actions disponibles sur le plateau de jeu lors de l’explication de règles pour bien comprendre la suite logique, et ce que vous devrez faire. Vous allez préparer votre exploration en recrutant des experts et récolter des fonds, sélectionner des spécimens à étudier, partir à leur rencontre, et enfin publier vos travaux. Tout cela est bien indiqué sur le plateau où vous placerez vos dés d’actions, dans une logique presque sans faille et assez routinière. Non pas comme un fleuve tranquille non plus, puisque vos adversaires pourront un peu vous gêner, mais voici votre chemin vers la victoire. Optimisez cette route tracée et vous serez consacré.
Le thème est chouette, les illustrations vraiment soignées et le matériel de très bonne qualité (en même temps j’ai la version deluxe donc heureusement ^^). On comprend bien la suite logique des actions, de la préparation à votre expédition et la publication. Par contre, j’ai trouvé que ce thème passait assez vite quand même au second plan et les mécaniques passent au premier. Valeur du dé, couleur, types des cartes, ressources, optimisation. Je n’ai pas trouvé cela dérangeant, car c’est le cas la majeure partie du temps dans des jeux similaires. Ne vous attendez juste pas à être transportés d’un continent à l’autre à observer la faune dans son habitat naturel, et tout ira bien.
Ensuite, le « reproche » que je ferai à Encyclopedia est que ça manque un peu de rebondissements et ça ronronne quand même par moments. Il n’est pas le jeu le plus trépidant du monde, mais là n’est pas son propos. Soyez-en juste conscients pour ne pas être déçus.
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Surmonter la confusion de l’action la plus importante du jeu
L’un des plus gros écueils que j’ai pu lire ou observer concernant Encyclopédia, est le fait de comprendre le fonctionnement de cette dernière action indispensable dans ce jeu, à savoir la publication de vos écrits. Les actions précédentes sont plutôt simples et logiques, mais cette phase de publication a ce je-ne-sais-quoi de déroutant qui peut vous faire perdre le fil. La règle n’est pas pour autant mal rédigée, mais rien ne remplacera la pratique pour cette action. Certains ne passeront pas le cap et ne retiendront que cette incongruité. Cela peut demander un peu d’effort, mais une fois intégrée, ça fonctionne. Cela peut juste paraitre contre intuitif.
Cela a aussi pour effet de rallonger artificiellement les premières parties, et le jeu peut vite être catalogué au rang de « tout ça pour ça ». Cela va très clairement en s’améliorant, mais il faudra y passer 1 ou 2 parties complètes pour l’ensemble des joueurs. Et comme bien souvent, le nombre de parties sur un jeu se limite à 1 ou 2, certains n’auront pas la patience d’y revenir pour faire passer la durée de jeu sous l’heure, qui est le bon format pour ce jeu. Suivant les joueurs, leur expérience, leur envie, leur assiduité, la 1ère partie peut leur paraitre assez pénible avec cette phase de publication, et peut gâcher l’expérience de jeu. Si vous la comprenez du 1er coup, ou si à la 2ème partie ça roule pour vous, alors la voie est dégagée et Encyclopédia devrait vous convaincre et vous faire revenir à sa table.
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Optimisation et frustration
Encyclopédia va vous endormir un peu avec un rythme assez tranquille, des actions qui se déroulent assez sereinement (préparation, récupération de cartes animaux, expédition et publication) la plupart du temps dans le même ordre. Par contre ne croyez pas que la partie sera un fleuve tranquille. La faute a cette **** d’action de publication qui vous fera rager régulièrement.
Pour l’optimiser, il faudra que les astres soient alignés. Comprendre que vous devrez mettre la main sur les animaux qui combinent entre eux (au mois 2 types en commun). Le problème c’est que dans ce jeu de société … bah il y a société et vous ne serez pas seuls. Du coup vous allez maudire vos adversaires qui vous raflent sous le nez ce reptile qui aurait combotté comme pas 2 avec ses autres potes à sang froid que vous gardiez bien au chaud.
Bon, vous irez quand même publier, mais ça n’aura pas la même saveur car ça sera forcé, et sacrément pas optimisé. Vous y repenserez souvent à ce combo de fou qui vous tendait les bras. Et oui, pour viser les + de 300 points à ce jeu, il faudra y jouer, y rejouer, et croiser les doigts et tout ce qui traine aussi 😉
Quel calvaire quand on va publier, et que l’on défausse des cubes chèrement acquis précédemment et qui ne rapportent pas un point … ^^
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La hype de la nature
Encyclopédia est un format de jeu pour « initiés » telle que cette catégorie semble être nommée depuis quelques temps déjà. Un peu complexe et long pour être joué en famille avec des non-joueurs, et un peu trop léger pour ceux habitués à se triturer le cerveau pendant des heures. Avec la faune et sa découverte pour thème, il pourra faire penser à Wingspan, le fameux jeu mettant en scène les différentes espèces d’oiseaux du monde. Encyclopédia a été le plus gros succès sur Kickstarter pour Holy Grail Games avec plus de 5.000 backers. On verra comment se déroule sa vie en boutiques, et s’il peut obtenir une petite partie du succès mondial de Wingspan.
Avec d’autres jeux comme Cascadia, Living Forest, Meadows, et bien d’autres, le thème nature, contemplatif, et reposant remporte clairement du succès depuis quelques temps. Les vikings, zombies et autres thématiques qui cartonnaient il y a quelques années semblent avoir pris un peu de recul, et c’est pas plus mal de voir un renouvellement. Quel sera le prochain thème qui aura la cote ??
D’ailleurs, l’auteur Bruno Faidutti a mis en ligne un article intéressant sur le sujet que vous pouvez lire ici.
L’empire romain s’étend et de nouvelles cités se développent le long du Rhin mais les barbares ne sont jamais loin.
Discordia vous demande de développer votre ville sur 4 aspects : militaire, commercial, pêche et agriculture. Le tout en surveillant les raids de germains.
Discordia est le nouveau jeu de Bernd Eisenstein à qui l’on doit beaucoup : Carthago, Pandoria ou Zack and Pack parmi de nombreux autres jeux. Aux illustrations Lukas Siegmon que l’on a croisé sur Hallertau ou Reykholt. Discordia est prévu pour 2 à 4 joueurs et la bonne nouvelle c’est que Sylex vient d’annoncer la version française prochainement !
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Alors pose ton pilum, légionnaire, et regardons ce que propose le jeu.
Dans Discordia, tout tient en 3 dés, oui 3 petits dés, un rouge un bleu et un jaune. Avec ça, c’est tout un monde qui s’offre à vous si vous réussissez à vous adapter aux lancés et à ce que vous laisse Maximus.
Le matériel pour commencer et la boite dénote par son épaisseur très contenue ! La couverture est magnifique, un très beau travail et autant vous le dire à l’intérieur c’est bien plus basique, tout est orienté pour une lisibilité des icônes et ça fonctionne.
Les plateaux joueurs sont assez particuliers, faits d’une feuille à la Terraforming Mars ou Underwater Cities avec un plateau en carton à coller par-dessus. Le résultat c’est un plateau double couche auquel on est pas habitué, c’est déstabilisant à l’ouverture de la boite et lors de la première partie mais on s’y habitue.
La boite n’est pas bien épaisse, ce qui me plait avec toutes les super méga deluxe all in box que l’on voit passer en ce moment. De plus, elle est bien pleine avec tellement de tuiles… de quoi assurer une rejouabilité tranquille. On ajoutera des meeples au nombre de 160 !
Et 3 dés, juste 3, et avec 3 dés on va créer toute une cité en bord de fleuve sous la menace germaine.
Discordia propose un gameplay plutôt simple, mais avant de parler gameplay, parlons fin de partie !
Pour l’emporter il vous faut mettre tout le monde au travail ! Dès qu’un joueur n’a plus de meeple en réserve il gagne la partie instantanément.
La partie peut également se finir en 4 manches et là ce sera le joueur avec le moins de meeples restants qui l’emportera. C’est malin, à contre courant de nombreux jeux, bref, c’est rafraîchissant !
Un petit mot sur le livret de règle qui aura perturbé ma lecture des règles par son format à la wargame, avec un chapitrage précis et des renvois d’un chapitre à un autre tout au long de la lecture des règles. Au final, on s’en sort très bien, mais j’ai eu quelques soucis pour retrouver certains points de règles en cours de partie.
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Maintenant retour au front et voici comment jouer :
Le plateau central propose 6 espaces d’action, un par face de dé, et pour chacun plusieurs actions possibles. Vous n’en ferez qu’une, donc choisissez bien.
Vous allez pouvoir placer des meeples de votre réserve sur un espace d’action, récupérer des étoiles qui vous serviront à valider des étages technologiques ou récupérer une tuile. Vous pourrez également poser des fondations vous permettant d’accueillir de nouveaux bâtiments.
Les tuiles sont des bâtiments militaires, marchands, des fermes ou des bateaux. Elles permettent de venir placer des meeples pour les « consommer » et ainsi vider sa réserve. C’est pour cela que certaines tuiles ne vous apportent aucun effet une fois pleines.
Cependant, les tuiles rouges militaires vous seront utiles pour combattre les germains qui vont tenter de vous attaquer à chaque fin de manche.
Les tuiles proposent également une ou deux faces de dé. Si le dé que vous activez est celui représenté sur vos bâtiments, ceux-ci s’activent et accueillent des meeples automatiquement.
Il vous faudra donc récupérer des tuiles pour obtenir des bonus, quel que soit le dé choisi par la suite.
Un autre aspect important repose sur les deux pistes de technologie et du canal sur lesquelles vous allez placer vos étoiles pour débloquer des bonus de plus en plus intéressants.
La piste technologique est un élément central, peut-être un poil trop, et il vous faudra la jouer obligatoirement pour espérer l’emporter. Toute la question est de définir le timing avec lequel vous allez progresser sur cette piste, et, là encore, quelques choix seront au programme.
Et pour tout cela seulement 3 dés. Et encore ! Le premier joueur, alias le Maximus, lance ces dés et s’en réserve un, les autres devant se contenter d’activer l’un des deux restants. C’est d’ailleurs l’une des seules interactions que l’on peut qualifier de directe.
Quelques objectifs et bonus sont également présents, histoire de créer la course entre les joueurs et ils sont plutôt alléchants, donc ça va fritter un peu pour les obtenir en premier.
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Bon, et au final ça dit quoi ?
Sort de tout ceci un jeu facile à jouer avec des choix intéressants. Pour la difficulté, on se situe dans de l’initié, pas de grosse difficulté, pas de long terme avec des strates d’objectifs en cours de chemin à calculer, mais tout de même des choix et de l’anticipation.
Les manches sont rapides, chaque joueur ne faisant qu’une action avec divers bonus à activer, le down Time (le temps d’attente) est court et la partie reste vivante.
Ce qui m’a le plus marqué reste que tout ceci se tient en 3 dés. Avec si peu, on passe entre 45 minutes à 2 et 1h30 à 4 sans voir le temps passer.
Petite aparté pour les allergiques du hasard. Vous ne pourrez pas adapter les résultats des dés obtenus ou extrêmement peu. Pour autant, Discordia n’est pas un jeu de hasard et vos choix seront importants, vous allez adapter vos possibilités et vos activations pour que, peu importe le résultat des dés, vous ayez toujours des actions et des bonus intéressants.
Avec son système de scoring hyper simple pouvant même déclencher la fin de partie, Discordia va vous faire réfléchir à l’inverse des autres jeux en cherchant à ne plus avoir d’ouvrier disponible, et donc adapter ceux qu’il vous reste aux tuiles actives que vous possédez.
Discordia est un jeu bien agréable à la sortie d’un Essen plutôt morne. Le fameux jeu simple mais pas simpliste qui conviendra pour jouer avec des joueurs initiés. De par son gameplay et ses conditions de victoire, il se démarquera de nombre d’autres jeux.
Alors, à vous de lancer les dés et de construire la meilleure ville au bord du Rhin pour Rome !
Orchard et Hortis, ou comment avec 9 cartes et quelques dés on peut obtenir un jeu qui fonctionne, puis marque et reste sur un coin de table pour une partie de temps en temps.
Avec Orchard, c’était devenu comme une bonne tasse de thé un jour pluvieux, un petit rituel de sortir la petite boite blanche, mélanger les cartes et en prendre 9 et savourer une petite partie ou deux, ou trois… on ne compte plus quand c’est si agréable.
Orchard c’est un jeu de Mark Tuck qui s’est auto-publié. Le jeu a remporté le prix du meilleur jeu en print and play sur BGG, ce qui lui a permis de taper dans l’œil de quelques petits éditeurs bien sympathiques dont Abi Games pour la VF.
C’est ainsi que la belle histoire commence pour la petite boite à tiroir qui m’a permis de découvrir cette petite pépite pour tout joueur solo.
18 cartes sur lesquelles se trouvent 2 colonnes de 3 arbres avec 3 couleurs pour les différencier : orange, jaune et vert.
Sur ces 18 cartes, prenez-en 9, mélangez-les et vous êtes prêt à vous lancer. Le but est tout simple, vous devez superposer les cartes en faisant correspondre les couleurs d’arbres. Vous avez bien entendu la possibilité de tourner la carte que vous jouez de 90 ou 180 degrés pour optimiser au mieux votre pose.
Toute superposition vous permet tout d’abord de poser des dés sur les arbres avec la première superposition puis d’en augmenter la valeur.
Une mécanique simple mais qui n’a pas fini de vous faire des nœuds au cerveau.
Vous savez donc comment fonctionne Orchard, un jeu parfait pour un petit moment ludique quand la pause s’impose.
Orchard, c’est tellement simple à emmener, sortir et « mettre en place » que je peux y passer pas mal de temps quand je tombe dessus. Il réussit à provoquer ce sentiment de la partie de plus dès qu’une partie se termine, cette frustration positive que l’on ne rencontre pas souvent.
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Et dans mon petit monde ludique tranquille, où Orchard disposait de sa place de choix, est arrivé Hortis.
Hortis, pour sa fiche technique c’est le même auteur et le même média pour faire découvrir le jeu : le site BGG.
Suite à une campagne Kickstarter à succès (plus de 2400 contributeurs) la version française nous arrive cette fois-ci par Origames.
Sur le papier, peu de changement. Hortis exploite la même mécanique de superposition de cartes avec des dés pour comptabiliser vos points.
Mais le jeu a appris. Enfin, son auteur, et il a fait un travail assez dingue en améliorant tout sans pour autant alourdir quoi que ce soit. Une performance tout à fait incroyable qui force le respect d’améliorer en tout point un jeu en conservant sa légèreté.
Hortis a cependant un effet de bord : il rend Orchard totalement obsolète.
Pour cela regardons Hortis d’un peu plus près.
La mécanique de superposition est modifiée avec des fruits de valeur 1 ou 2 ce qui remet en question tous vos choix de pose.
Sur chaque carte une clairière, un espace vide permet plus de liberté, puisqu’elle peut, cette clairière, recouvrir n’importe quel espace.
Plus de choix, plus de prise de tête, pour plus de plaisir !
Et le dos des cartes propose désormais un bonus si vous remplissez la condition proposée. 2 cartes pour 2 bonus à chaque partie et chaque carte demande un nombre de points à atteindre, il vous suffit d’additionner les deux pour connaître votre objectif. Voilà le scoring figé d’Orchard devenu complètement obsolète avec un scoring bien plus vivant.
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Hortis ne révolutionne rien, ne modifie rien en profondeur mais pourtant il améliore tout.
C’est donc un jeu encore plus plaisant et plus addictif à jouer que nous avons là et cependant j’étais persuadé de ne jamais lâcher Orchard.
Est-il nécessaire de connaître Orchard pour découvrir Hortis ? Je ne pense pas. On est sur un jeu solo petit format tout simple à prendre en main.
Hortis est une superbe réussite à posséder si vous êtes amateur de jeu casse-tête en solo. Que ce soit son prix, son matériel ou sa rejouabilité, tout est bon dans ce verger !