Cette critique a été rédigée à l’aide d’une boite fournie par l’éditeur que nous remercions.
Après l’immense succès rencontré par Ark Nova, l’année 2023 semble elle aussi placée sous le signe des parcs animaliers puisque je vous présente aujourd’hui Caldera Park ! C’est d’ailleurs à se demander si ce n’est pas un thème particulièrement prisé par Super Meeple qui a également édité Savannah Park l’an dernier, et New-York Zoo l’année précédente ! Mais je m’égare… Leur catalogue est pour moi une référence car on y trouve aussi bien de gros jeux que des propositions plus familiales, dont fait partie Caldera Park. Personnellement, j’ai été conquise dès que j’ai vu le token marmotte premier joueur trop mignon, mais je m’égare encore.
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Welcome to the zoo
Dans la lignée de Savannah Park, les auteurs Kramer et Kiesling restent dans la thématique animalière et nous proposent cette fois-ci de créer un parc animalier dans les territoires sauvages d’Amérique du Nord. Si vous avez déjà joué à leur précédent opus, vous ne serez pas dépaysé puisque Caldera Park dispose d’une mécanique très semblable à son aîné, bien qu’un poil plus complexe.
Il s’agit d’un jeu de pose de tuiles dans lequel vous devez réaliser des familles d’animaux les plus grandes possible. Chaque joueur dispose exactement des mêmes tuiles et du même plateau, c’est donc votre capacité d’adaptation, et un peu votre chance, qui vous mèneront à la victoire.
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Pose de tuiles avec contraintes, c’est du classique
Caldera Park se joue en cinq manches de sept tours chacune, au cours desquels vous placez l’une de vos tuiles Animaux disponibles sur votre plateau de jeu. Le premier joueur (celui qui dispose de l’adorable token marmotte) choisit un type d’animal et le type de terrain sur lequel le poser, et tous les joueurs doivent s’y conformer. Puis c’est au tour du joueur suivant de faire la même chose parmi les animaux et terrains restants, et ainsi de suite jusqu’à la fin de la manche, où les choix possibles sont remis à zéro.
En plus de cette contrainte de tuile à poser, on rajoute une contrainte météorologique. Au début de chaque manche, les joueurs retournent l’un de leurs jetons Météo et le placent face visible sur un emplacement dédié de leur plateau personnel. Elle interdit de poser des tuiles Animaux du type indiqué, ou du nombre indiqué, adjacentes à cette tuile Météo sous peine de devoir les retourner avant le décompte des points, supprimant ainsi des points d’eau ou séparant des familles (Et ça, ça nous fend le cœur.).
Le positionnement des tuiles est donc extrêmement tactique, d’abord parce qu’elles doivent former des familles, mais aussi parce qu’il faut anticiper les contraintes météo et celles de terrain. Tout en n’oubliant pas de marquer le plus de points possible, évidemment.
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Presque pas d’interaction mais un combat contre soi-même
Une fois la cinquième manche terminée, on procède au décompte des points. Les joueurs marquent des points pour la plus rentable de chacune de leurs familles d’animaux, en multipliant le nombre d’animaux de ce type adjacents les uns aux autres par le nombre de points d’eau auxquels ils ont accès. Les joueurs gagnent également des points pour avoir recouvert complètement un type de terrain, ou les tuiles adjacentes des geysers. Le joueur avec le plus de points l’emporte !
Le premier élément frappant dans Caldera Park est son absence totale d’interaction entre les joueurs. On pourrait se dire que l’on va essayer de bloquer son adversaire en l’obligeant à jouer un type d’animal non disponible pour lui, ou sur un type de terrain qu’il a déjà complété. Mais dans les faits, si un joueur ne peut pas poser une tuile correspondant au type demandé, ou s’il n’a plus d’emplacement adéquat, il peut poser ce qu’il veut où il veut, donc impossible de le mettre en difficulté.
Ce paramètre rend le jeu beaucoup plus “positif” et “feel good” à mon sens, puisqu’on privilégie ses propres intérêts plutôt que le blocage des adversaires. Cela rend également le jeu plus agréable à jouer en famille, notamment avec des enfants supportant mal la frustration (ou des adultes d’ailleurs, on en connaît tous). Personnellement, j’aime bien ce côté “je joue dans mon coin et j’essaie de donner le meilleur de moi-même pour faire mon meilleur score”, qu’on retrouve dans des jeux comme Take it easy ou Overbooked par exemple (avec un poil plus d’interaction dans ce dernier). Bref, c’est zen et j’aime ça.
À signaler aussi que les joueurs jouent en simultané, ce qui rend le jeu très fluide et plutôt rapide, et ce quel que soit le nombre de joueurs. Les plateaux joueurs sont recto-verso pour apporter un renouvellement bienvenu après quelques parties.
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La satisfaction d’un monde bien ordonné
Caldera Park est donc un jeu dans lequel, à la manière d’un puzzle, vous essayez d’agencer vos tuiles de la façon la plus efficace et rentable possible, en évitant les pièges tendus par la météo et en composant avec les choix de placement parfois discutables de vos adversaires. Quel plaisir en fin de partie de contempler nos animaux réunis en famille, à part cet élan exilé à l’autre bout du parc, faute d’un meilleur emplacement.
Cette satisfaction se retrouve dans l’excellente idée de proposer des boîtes à monter soi-même pour ranger les tuiles des joueurs, facilitant ainsi la mise en place tout en apportant un côté thématique au jeu. Adieu les sachets en plastique et bonjour le moment convivial lors de la première partie pour monter les boîtes ensemble !
Rien de très original dans le matériel en-dehors de ces belles boîtes de rangement, on est sur des jetons en carton épais et solide avec des illustrations sympathiques sans être extraordinaires. Et je vous ai déjà parlé du très choupinou token premier joueur marmotte qui suffit à lui seul à faire mon bonheur, je sais, il m’en faut peu.
Si vous appréciez les jeux de pose de tuiles dynamiques, faciles à prendre en main et les marmottes, et que l’absence d’interaction est un plus pour vous, alors je ne peux que vous recommander Caldera Park que nous avons beaucoup aimé à la maison !
Cette critique a été rédigée à l’aide d’une boite fournie par l’éditeur que nous remercions.
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Sur une île battue par les vents et les flots, la peur gagne les habitants. Une sorcière est parmi eux ! Mais l’arrivée d’un chasseur de sorcières semble être la solution… mais ce chasseur arrivera-t-il à démasquer la sorcière sans faire trop de victimes collatérales ? Et surtout avant que la sorcière ne parvienne à lancer son terrible rituel.
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L’avis de Romain B. :
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Duel masqué
Voici le pitch de Pagan, un jeu pour deux joueurs exclusivement qui nous arrive chez superMeeple prochainement.
Vous jouerez donc soit le chasseur, soit la sorcière qui se cache derrière l’un des 9 habitants de cette petite ile perdue.
Le jeu est donc asymétrique, chaque joueur disposant d’un paquet de cartes (deck) propre à son personnage et de ses objectifs de victoire. Le chasseur gagne en éliminant la sorcière, c’est son métier après tout, ou en innocentant les 8 autres villageois. Cependant, il doit prendre garde dans ses choix car s’il élimine 3 innocents, il est alors exilé du village et perd alors la partie.
La sorcière peut de ce fait attendre un faux pas du chasseur (ou plutôt 3) mais ce dernier pourra alors jouer à innocenter les villageois, la sorcière dispose d’un moyen pour remporter la partie : déclencher son rituel ! Une stratégie risquée puisqu’elle va se dévoiler de plus en plus pour réussir à le lancer.
Tout le jeu est là, qui est qui ? Qui fait quoi ? Tout est question de bluff, la sorcière devra jouer de façon agressive tout en essayant de perdre le chasseur sur des fausses pistes. Le chasseur, lui, devra lire le jeu de cette sorcière pour la démasquer ou, si elle est trop lente ou trop prudente, en innocentant les autres villageois.
Pour tout cela, chacun va placer des indices ou secrets, puis des preuves ou des faveurs devant les différents villageois. Le chasseur pourra utiliser les preuves pour les innocenter, la sorcière en a besoin pour lancer son rituel.
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Ce matin, un chasseur…
Regardons plus précisément le chasseur. Bourru, violent, il a pourtant des acolytes qui pourront à chaque tour l’aider. Il va également pouvoir mener des enquêtes sur les villageois pour profiter au mieux de leur action ou de celles que la sorcière fera avec ces villageois. Il connait aussi la région et certains lieux lui sont familiers pour mener ses réflexions et son enquête. Il peut donc agir sur les villageois pour en profiter quand la sorcière va les activer, un avantage certain avec des choix de placement de ses cartes enquêtes cruciaux.
Sur son plateau personnel, ce sont les acolytes et les lieux qui lui permettent d’activer des actions qui lui sont propres.
La sorcière sortira-t-elle du bois ?
Du côté de la sorcière, elle est maligne et sournoise, les ténèbres sont sa demeure et elle saura en tirer profit pour frapper au bon moment. Elle dispose de ses familiers, toujours loyaux, pour lui venir en aide. Elle prépare des potions en tout genre dont elle seule connait les secrets. Elle va également lancer des malédictions pour entraver fortement le chasseur dans ses actions ou gagner bien plus de puissance pour elle-même. Le chasseur devra alors prendre le temps de lever la malédiction.
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Jeu de dupes
Chacun ses armes, chacun ses capacités, et le tout dans un petit village se concentrant autour de 9 cartes de villageois. Les deux joueurs disposent à leur tour de 3 actions à effectuer sur les villageois, sur leur plateau personnel et sur les cartes qu’ils vont mettre en jeu.
Le centre du jeu est le plateau avec les villageois qui, en plus de leur action, permettent de placer des pions devant d’autres villageois. Ces pions sont au centre du jeu de dupes qui s’installe, le chasseur cherchant à avoir 3 jetons indices pour ensuite venir ajouter une preuve, la sorcière transformant les 3 pions secrets en 1 jeton faveur. Elle a besoin de 3 faveurs (soit 9 secrets) devant le villageois qui la représente pour lancer son rituel et ainsi gagner. Mais si elle se précipite dans cette entreprise, le chasseur aura vite fait d’éliminer cette cible trop facile.
Elle doit donc placer ses billes en ayant conscience que chaque action prise est une information donnée au chasseur, elle doit brouiller les pistes, rester cachée dans l’ombre sans perdre trop de temps. Le chasseur va monter en puissance avec l’avancée de la partie, quand il innocente un villageois, la sorcière ne sait pas lequel et lancer une fausse piste sur un innocent deviendrait encore plus dangereux pour elle.
Le chasseur, lui, est un peu plus direct. Des indices puis des preuves et soit innocenter, soit éliminer. La finesse de son jeu sera de réussir à lire les intentions et les actions de la sorcière, à placer ses enquêtes avec soin et à ne pas trop trainer en chemin.
Les joueurs disposent de nombreux moyens pour bloquer l’autre sans pour autant bloquer le jeu. Il est par exemple impossible de jouer là où se trouve un jeton action. Mais chaque joueur dispose sur son plateau d’une action pour libérer un villageois. Rien n’est donc impossible, mais cela vous coutera une action pour rendre disponible le villageois que vous souhaitez visiter.
Les micros stratégies à court, moyen et long terme sont nombreuses avec en fil rouge le placement des jetons sur les villageois. Il sera possible pour les 2 camps d’intervenir sur les jetons adverses pour en enlever certains ou en déplacer d’autres. Amateurs d’interaction directe, vous serez servis, des effets qui pourront frustrer les plus réticents à ce genre de mécaniques.
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Le destin de Roanoke est entre vos mains
Avec tout cela, Pagan vous propose, en 60 à 90 minutes, de vous livrer un duel pour le contrôle de Roanoke. Le jeu demande de connaître les cartes de son deck, que les deux joueurs soient d’un même niveau de connaissance du jeu pour être joué de façon optimale. Le jeu est clairement fait pour ceux qui aiment les jeux à deux en confrontation directe. Depuis quelque temps, de nombreux jeux sont sortis dans cette gamme et avec Pagan c’est un jeu plus poussé, plus expert et plus exigeant qui vous est proposé. La durée de la partie est plus longue que les jeux à deux plus classiques, sur vos premières parties, pas mal de lecture sera au programme, le temps au minimum de comprendre les icônes du jeu, icônes assez petites d’ailleurs.
Un mot sur le matériel, du classique de bonne qualité avec des cartes de bonne qualité et ces derniers temps j’ai vu passer pas mal de jeux avec des cartes moindres pour que ce soit noté. La boite est d’un format très contenu et remplie comme il faut, c’est également appréciable et les illustrations me plaisent beaucoup mais là c’est une question de goûts.
Pagan, c’est un jeu pour deux, avec un thème fort et une profondeur peu courante dans cette gamme de jeu. Il est exigeant et vous demandera plusieurs parties avec l’un des deux rôles pour le maitriser et en tirer le maximum. Alors, à vous de prendre en main le destin de Roanoke et y imposer votre vision.
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L’avis de Kmylle Muzo :
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Un jeu à deux très tendu
Super Meeple nous a habitués à proposer des jeux “qui vont plus loin”, des jeux avec un truc en plus qui ajoute une complexité supplémentaire dans un style de jeu, pour ceux qui veulent approfondir la mécanique. Ils l’ont très bien fait pour les roll and write en localisant Rome and Roll, et ils s’attaquent cette fois-ci au jeu à deux avec Pagan, Le destin de Roanoke.
Comme l’a dit Romain, il est préférable de jouer contre un adversaire ayant la même connaissance du jeu que vous sous peine de vous faire potentiellement rouler dessus lors de votre partie, sauf coup de chance. Au-delà des hasards de la pioche de cartes qui conditionne en partie votre manière de jouer, l’important est vraiment de surveiller ce que fait votre adversaire et d’essayer de le contrer au maximum.
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Question de stratégie
La sorcière doit aller le plus vite possible car le temps joue contre elle, mais être trop frontale risque de la démasquer rapidement. Elle doit donc bluffer, chose que je suis bien incapable de faire, on lit en moi comme dans un livre ouvert (et vous imaginez donc que je joue préférentiellement le chasseur). Le chasseur peut innocenter les villageois tout en surveillant les actions de la sorcière, mais en étant trop passif il risque de se faire dépasser par les événements et de lui laisser le champ libre. Un assassinat un peu au hasard est donc nécessaire de temps en temps.
Il est parfois frustrant pour la sorcière de voir ses potions détruites avant utilisation ou ses malédictions levées trop tôt, et, pour le chasseur, de n’innocenter que des villageois sur lesquels il n’avait absolument aucun soupçon. Comme dans beaucoup de jeux de ce type, si on n’a pas les bonnes cartes ou ressources au bon moment, on peut perdre la partie. Je ne suis pas spécialement fan des jeux à affrontement direct, à part Magic The Gathering auquel je joue depuis très longtemps, mais à mon avis, si c’est votre came, foncez, vous serez ravis par Pagan.
Si les illustrations très tranchées sur la boîte m’ont tout d’abord rebutée, j’ai trouvé qu’elles servent en fait magnifiquement l’univers du jeu une fois la mise en place autour de la table terminée.
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Un côté évolutif pour renouveler le plaisir
La boîte de base propose deux scénarios modifiant les règles et objectifs de la partie pour apporter de la variété. Les extensions qui devraient sortir en même temps apporteront de nouveaux scénarios pour que chaque partie soit différente ! Il est également possible de créer ses propres combinaisons de cartes Villageois en choisissant une faction bleue pour le chasseur, une faction rouge pour la sorcière et une faction verte au hasard.
Encore mieux, les extensions permettent de construire votre paquet de cartes avant la partie pour mettre en place une stratégie différente selon le scénario joué ! Cette composante deckbuilding devrait ravir les joueurs de JCE et ceux qui aiment aller plus loin dans la maîtrise de leur personnage.
Prévu pour 1 à 4 joueurs, à partir de 14 ans, pour une durée d’environ 2 heures.
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Je dois vous faire un aveu, je fais très peu de veille ludique. C’est une pratique qui me saoule un peu. Par contre, il y a certains auteurs qui me font systématiquement lever un sourcil, voir les deux. Si Andreas Steding (Hansa Teutonica, Gugong, Stroganov) fait partie de mes chouchous, depuis l’excellent Mombasa, les productions d’Alexander Pfister sont dans mon collimateur. La seule chose que je pourrais lui reprocher c’est ses choix de thèmes plutôt douteux.
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Cowboy Bip bip
Le premier contact avec Boonlake n’est pas très flatteur. Si vous ne comprenez pas bien où ils veulent en venir avec l’illustration de couverture, rassurez-vous, ce n’est pas plus clair après l’ouverture de la boîte. En gros, nous jouons des pionniers s’installant dans une contrée inconnue, vierge de toute population. L’ambiance est clairement western, teintée d’éléments vaguement post-apocalyptiques. Un choix plutôt étrange et pas vraiment assumé. Je n’ai pas de preuves mais, à mon avis, le proto devait se la jouer cowboy et c’est l’éditeur qui a préféré transposer ça dans un univers de fiction. La conquête de l’ouest étant actuellement une période historique délicate à aborder aux Etats-Unis.
Globalement, l’enrobage graphique ne m’a pas non plus emballé. Heureusement qu’il s’agit d’un élément secondaire dans ce genre de jeu. Plus gênant, c’est l’iconographie et sa logique très… personnelle. Par exemple, les coûts sont indiqués généralement en noir tandis que les revenus sont en blanc, mais parfois apparaissent des nombres négatifs pour indiquer les coûts, sans que je n’ai pu trouver d’explications. Idem pour les effets des ports, parfois le symbole ancre est assorti d’un bateau et parfois non. Ce n’est pas gravissime dans l’absolu, on s’y fait, mais c’est confondant.
Une situation que l’on retrouve jusque dans les règles. On y trouve des tournures de phrases sibyllines ou des éléments de jeux expliqués de diverses manières qui apportent plus de confusion que d’éclaircissement. Sans parler de la mise en page qui est parfois incompréhensible. Pourquoi avoir mis le mode solo en plein milieu du livret ?
Pour finir, avant d’aborder le jeu en lui-même, une petite remarque sur le matériel qui est à l’avenant de ce qui se fait de nos jours. C’est foisonnant, de qualité. On a même le droit aux fameux plateaux personnels double couche. Les amateurs aimeront, les râleurs râleront sur le prix qui ne cesse d’augmenter (ici supérieur à 50 euros).
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Pfis-bis, Pfis-ter
Si vous êtes amateur des créations ludiques d’Alexander Pfister vous ne serez pas dépaysé. Boonlake se place dans la droite lignée de Great Western Trail et Maracaïbo.
On retrouve l’obsession de l’auteur pour les pistes façon jeu de l’oie même si, contrairement à ces deux précédents jeux, les actions ne sont pas directement dessus. Déplacer son bateau le long de la rivière sert principalement à deux choses : déclencher les décomptes intermédiaires et la fin de partie.
A son tour, on choisit une tuile qui détermine trois choses. Des actions qu’on va faire seul, des actions que tous les joueurs vont pouvoir faire (nous compris) et l’avancée de notre bateau. Un choix qui va entraîner beaucoup de dilemmes est aussi une particularité de Boonlake. On joue même pendant le tour des autres joueurs. Cela se traduit par moins de temps mort, ce qui est plutôt sympa même si ça nous oblige à rester attentif. Comme on joue tous en même temps, c’est facile d’en oublier l’ordre du tour.
Néanmoins ne vous attendez pas à des sensations à la Puerto Rico. A part à deux joueurs (ma configuration préférée) prévoir ce que vont prendre les autres est très compliqué. De toute façon, la plupart des actions possibles sont assez variées pour qu’on ne soit jamais coincé.
Grosso modo, dans Boonlake, vous allez faire deux choses. Jouer des cartes de deux manières. Soit obtenir leurs précieux avantages pour beaucoup d’argent, soit les vendre pour très peu d’argent. Et sans vilains jeux de mots, des cartes vous allez en jouer un paquet pendant la partie. Cette gestion de main, essentielle, rappelle pas mal Maracaïbo.
En second lieu, vous allez devoir vous développer sur le plateau principal. Comme je vous le disais, le jeu vous fait vivre une conquête de l’ouest fictive. A vous d’installer vos colons, leur faire établir des villages et occuper les pâturages avec vos troupeaux. Là encore, il y a du dilemme. Vaut-il mieux commencer par explorer pour récupérer les bonus disséminés sur le plateau ou fonder ses colonies pour monopoliser les emplacements les plus intéressants ?
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Dilemmes, dilemmes
Boonlake n’est pas un jeu dans lequel on peut faire des impasses stratégiques. Tout est important. On veut tous atteindre le même but : en gros, développer à fond son plateau personnel. La question sera plutôt de l’ordre du moyen. Par quoi va-t-on commencer ? Qu’est-ce qui va nous permettre d’accumuler des ressources pour nous permettre de nous développer plus vite que les autres joueurs ?
De ce point de vue-là, on doit reconnaître la maîtrise de Pfister. Il nous laisse une richesse d’approche impressionnante. D’autant que rien ne nous empêche de faire des écarts à notre stratégie pour profiter d’une opportunité laissée par nos adversaires.
Pour autant, le dernier né du maître n’est pas exempt de défauts. Le premier souci c’est cette piste dont je parlais au début. Si donner aux joueurs le contrôle sur le timing de la partie paraît une bonne idée, comme il n’y a aucun moyen de ralentir le tempo, c’est toujours le joueur le plus pressé qui impose son rythme. Et ce n’est pas toujours une impression agréable pour les autres.
L’autre problème c’est qu’une partie de Boonlake, c’est long. Très long. Trop long. Notre première partie à quatre a duré quatre heures et même si cela s’est réduit avec les suivantes, nous ne sommes jamais tombés sous les 2h30. Ce ne serait pas tant un problème si on ne les voyait pas passer. Malheureusement, il arrive souvent qu’au dernier tiers de la partie, tout soit déjà plié. Difficile de prendre autant de plaisir en sachant qu’on ne peut plus gagner.
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La conquête de l’Weird
Si on met de côté son esthétique douteuse, Boonlake est un très bon jeu. On y retrouve toute la profondeur qu’on attend d’un jeu de gestion de ce calibre. Le fait qu’il n’y ait pas de stratégie exclusive laisse la place à l’improvisation et, de mon point de vue, c’est une très bonne chose. Par contre, à trois ou quatre les parties peuvent durer une éternité sans que ça n’apporte vraiment de plus-value. Je préfère de beaucoup le sortir à deux.
Je suis heureux que Boonlake ait rejoint ma ludothèque mais il ne deviendra pas pour autant un incontournable comme l’est devenu Great Western Trail.
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L’avis de Romain B.
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Après ma première partie, je me demandais quel était le but de Boonlake. C’était mou et sans saveur, un jeu incompréhensible et puis je l’ai rejoué en changeant un simple paramètre : accélérer le rythme.
A partir de ce moment-là, tout a changé ! Le jeu est plus tendu, non pas sur les ressources ou les possibilités, mais sur le temps. Boonlake est un jeu où vous ne devez pas hésiter à accélérer, à avancer, c’est là que se trouve toute la tension du jeu.
Boonlake est un jeu qui fournit ressources et cartes peut-être même un peu trop. C’est aussi ce qui permet de classer le jeu en jeu expert mais plutôt dans le bas de la gamme. Avec Boonlake les joueurs finissent la partie contents de ce qu’ils ont posé sur la table.
C’est un jeu ou même le dernier fait pas mal de points de victoire, un jeu expert à la cool.
Personnellement j’aime beaucoup y jouer désormais. Je n’hésite plus à avancer sur le fleuve pour créer ce rythme qui donne à la partie tout son relief.
Boonlake est un bon jeu, il n’est pas du niveau des plus grands Pfister, Maracaibo, Great Western ou Mombasa, mais reste tout de même agréable et surtout avec des joueurs de tous les niveaux en nombre de parties sur le jeu mais aussi des joueurs initiés aux jeux de sociétés comme des joueurs plus confirmés.
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Nous faisons partie du programme d’affiliation mis en place par Philibert sur leur site. Cela signifie que si un jeu que nous avons chroniqué vous plaît, et que vous l’achetez en cliquant sur le lien Philibert que nous proposons en bas de chaque article, nous percevrons une modeste contribution nous permettant de nous acheter d’autres jeux, pour pouvoir les chroniquer et vous donner notre avis. C’est une forme de soutien, et nous vous en remercions par avance! C’est grâce à vous que nous pouvons continuer à abreuver ce modeste blog avec toujours + de contenu.
Maracaïbo c’est, n’en déplaise à certains, un excellent Pfister, un jeu qui continue de faire parler de lui et d’être encore largement joué. L’extension The Uprising vient de débarquer, composée de ce que j’aime le moins dans une extension : des modules.
Alors, oui, ça ne partait pas gagnant cette histoire mais j’ai quand même plongé pour les plateaux double couche et la nouvelle histoire, et au final on ne le lâche plus !
Cette extension est donc disponible depuis vendredi dernier (1er avril) puisque SuperMeeple ne pouvait pas sortir Ark Nova tout seul.
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Donc The Uprising, ses modules, ses plateaux double couche et son histoire inédite. Un sacré programme ! En même temps, la boite est à un tarif un poil haut pour une extension, alors regardons tout cela.
Tout d’abord, ce qui, pour moi, justifie une bonne partie du tarif demandé : les plateaux. Ils sont double couche et donc bien plus agréables et pratiques. Ils vont permettre d’installer des tuiles pour personnaliser et intégrer les modules du jeu. Des plateaux qui rappellent l’extension d’Underwater Cities. Elle aussi proposait des plateaux double couche plus que bienvenus.
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Passons aux modules
Vous allez désormais pouvoir jouer en coopératif ! Soit sur une partie « simple » avec une carte de mise en place dédiée, soit avec un petit scénario dédié. Dans les deux cas, vous allez jouer contre Jacques, l’automa solo de l’extension et des marqueurs de présence à retirer.
Le module qui sera très souvent présent durant vos parties ce sont les ports de départ. Une simple tuile à choisir parmi 3 pour avoir des plateaux joueurs asymétriques. C’est bien sympathique ! Un changement simple et avec du choix, les plateaux sont assez différents les uns des autres sans déséquilibrer profondément le gameplay.
Et les modules qui me semblent les plus travaillés de cette extension : la résistance et le soulèvement.
Vous allez désormais pouvoir récupérer les cubes de présence sur votre plateau personnel ! Ces cubes, quand on effectuait une action pour les remplacer, étaient retirés du plateau. Désormais, vous allez déclencher des bonus sur votre plateau personnel.
Un module qui permet de limiter le jeu unique sur une nation. Cela change assez profondément la course sur la piste des nations qui est la partie centrale du scoring final. Il devient intéressant de remplacer les cubes pour obtenir pas mal de bonus et ainsi rééquilibrer en permanence les présences sur le plateau central. Un module avec une belle courbe de progression.
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Et le mode histoire ? Finie la pandémie dans les îles, cette fois nous partons enquêter sur un naufrage.
Le mode histoire est le prétexte au placement de nouvelles tuiles, mais pas que ! J’aime beaucoup me prendre au jeu, suivre l’histoire, même si au final les choix ne changent pas l’arbre narratif profondément.
Au final, le résultat est à la hauteur de ce que j’en attendais. On enchaîne les parties, l’histoire avance mais surtout le plateau se modifie en profondeur ! Je ne vais vous gâcher le plaisir mais ce mode histoire vous proposera des parties assez épiques avec des changements en profondeur. A chaque partie, vous pourrez vous développer différemment en suivant ce que le jeu met en avant, tout en faisant avancer l’histoire.
Et, bien entendu, des cartes ! Là encore, beaucoup de nouveauté dans les coûts, les prérequis et les effets proposés. Attention, cette extension ne révolutionne pas Maracaïbo, elle l’enrichit en respectant le jeu de base.
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Alors, cette extension, on craque ?
Si les plateaux double couche vous intéressent, vous pouvez y aller, le coût vous paraitra justifié et les nouveautés devraient finir de vous convaincre.
Cette extension est bien sympathique. J’essaie de limiter au maximum mes achats d’extensions désormais, ce sont donc les plateaux qui m’ont poussé à l’achat, le mode histoire également.
Au final, je suis bien content d’avoir craqué, ce n’est pas un « Ruée vers le Nord » (extension de Great Western Trail) mais une extension comme Discoveries pour Underwater Cities.
Une extension pour les amateurs de Maracaïbo donc, qui enrichira vos parties, mais il vous faudra bien connaître le jeu de base pour passer à cette extension !
PS : n’oubliez pas qu’il ne vous reste que deux jours, jusqu’au 10 Avril, pour participer au concours et gagner le jeu et son extension ! Rendez-vous sur la page Facebook du Labo.
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Bienvenue à Anvers en 1970 ! À vous de développer le commerce du café équitable avec 5 régions du monde que vous allez développer, exploiter pour obtenir les meilleurs arômes en vue de remplir des contrats et livrer les cafés de la ville.
Coffee Traders est le jeu du duo Rolf Sagel et André Spil qui nous a proposé Wildcatters, une sorte de grand frère de Coffee Traders sur le thème de l’exploitation pétrolifère mondiale.
Le jeu est prévu pour 3 à 5 joueurs, à partir de 12 ans et pour une durée de 2 heures environ.
Le jeu est édité dans sa version originale par Capstone Games et la version française arrivera en 2022 chez Super Meeple.
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Coffee Traders c’est aussi le Diamant d’Or d’argent… le numéro deux quoi ! C’est un vrai jeu expert que vous allez poser sur la table, un jeu exigeant, avec deux phases principales pendant chacune de ses 3 manches, pléthore de matériel et sa haute interaction.
En 3 manches, vous allez planter des champs de café, aider les populations locales à exploiter ces plantations, commercer les récoltes et, avec le café ainsi récupéré, remplir des contrats ou livrer les cafés locaux.
Chaque manche commence par une phase d’action où chaque joueur dispose de cubes lui permettant de payer ses actions. Le but est de préparer le terrain en posant de nouvelles plantations. Le but de ces plantations est bien évidemment la production de café, mais pas seulement. Le scoring final prend en compte l’influence de chaque joueur dans chacune des 5 régions, influence fournie par vos plantations et vos bâtiments.
Après cette première phase principale, une seconde commence avec une interaction entre les joueurs des plus intéressantes. Chaque joueur peut y affecter un de ses employés en tant que négociant dans une région pour en récupérer du café ou en tant que maître de chantier pour construire un bâtiment.
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Ce qui est particulièrement intéressant est le « piggy backing ». Les autres joueurs vont pouvoir suivre l’action que vous lancez en accompagnant votre négociant dans la région ou en construisant un bâtiment également.
Cette seconde phase principale est des plus intéressantes, elle permet au jeu de conserver un rythme de croisière sans temps d’attente trop important. Non seulement on reste actif pendant l’action des autres, mais en plus les choix de chacun sont des plus intéressants pour tous. Personnellement c’est la phase que je trouve la plus intéressante, elle est très vivante, tous les choix sont intéressants, c’est à ce moment que le jeu est dans son fauteuil, dans ce qu’il peut proposer de mieux.
S’ensuit une phase de production où chaque joueur va récupérer le café négocié avant la phase des contrats.l
Les contrats, c’est peut-être ce que le jeu a de moins sexy, de (trop ?) basique. Chaque joueur dispose de 6 contrats où il peut livrer des cafés d’Anvers.
Une phase des plus classiques qui peut durer longtemps avec un potentiel d’analysis paralysis assez fort selon les joueurs autour de la table. Si on y ajoute la règle aberrante des jetons bonus associés aux contrats remplis avec cette piste pour les poser qui sort tout droit d’un cerveau torturé (on attend avec impatience les dizaines de questions sur ce sujet sur les réseaux sociaux 😋).
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Et voilà face à quoi vous allez vous retrouver, à boire, à manger, des ânes, des chats… vraiment de quoi bien se torréfier les neurones façon ristretto !
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Le jeu est complet, mais il a tous de même des défauts à ne pas oublier. Les microrègles pour commencer. Elles sont légion, ça démarre dès la mise en place entre celle à 3, celle à 4 et celle pour 5 joueurs, suivez bien le guide des règles pour ne pas commencer la partie avec un jeu faussé. Ajoutons les petits points de règles présents tout au long du jeu et ce sont quelques allers-retours dans les règles qui seront au programme. La pose des champs et ce qu’il est possible de poser ou pas, la construction de bâtiments possible en piggy back, la fameuse piste pour les jetons bonus… La liste peut être longue, mais, au final, on vous rassure, rien de désastreux pour autant, juste quelques temps de vérification à prévoir pour vos débuts, le syndrome de la VAR vu au football pour les connaisseurs 🤣.
Le calcul des productions de café vous fera réviser vos additions, soustractions et divisions ! Ça peut paraître tout bête, mais le calcul de ce que chacun va récupérer, s’il s’ajoute à la négociation de café, peut être bien lourd pour certains joueurs ; en général l’expert du calcul mental autour de la table prend en main cette phase en annonçant les totaux par joueur pour que tout se passe bien. Au moins, vous êtes prévenus !
La phase de contrat de la 3ème et dernière manche sera la phase la plus longue du jeu. Les joueurs étant au pied du mur avant le scoring final, les cerveaux sont lancés à plein régime et chaque choix devient crucial, et les calculs associés vont faire durer la fin de la partie.
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Coffee Traders est le second jeu de son duo d’auteurs. On est donc tenté, quand on l’apprécie, de regarder leur première création : Wildcatters. Ce « premier » partage pas mal de mécaniques et de gameplay avec Coffee Traders. Personnellement, j’ai découvert Wildcatters en second et au premier abord je l’ai trouvé nettement supérieur ! Plus profond, plus tendu et violent. Bref meilleur. Après quelque temps, en rejouant à Coffee Traders, force est de constater que les deux jeux sont tout de même différents, je n’ai pas les mêmes attentes selon le jeu qui sera sur la table et je n’ai pas la sensation d’effet doublon.
Et pour finir, parlons de l’insert… Ah ben non. Pas d’insert, du moins pas dans la version originale. Vu la quantité de matériel, un insert serait des plus utiles, mais bon, les sachets plastiques, c’est toujours utile.
Un dernier point : le prix. Ce jeu pour la version anglophone de Capstone est à 110 €. Un prix quasi prohibitif, vu chez les Lacerda, mais aussi pour certains jeux deluxe. Oui c’est un budget, oui c’est le prix de 2 jeux dits experts, mais je trouve qu’il vaut l’investissement.
Vous ne pourrez donc pas dire que les éléments « négatifs » du jeu n’auront pas été soulevés.
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Et comme c’est un jeu que j’aime beaucoup, je reviens sur les points qui le placent au-dessus de la mêlée.
Coffee Traders est un jeu qui procure des sensations différentes selon les configurations dans lesquelles il est joué. Que ce soit à 3, 4 ou 5 joueurs, il fonctionne et l’on passera un très bon moment autour de la table. Mention spéciale au format 5 joueurs qui offre un setup totalement équilibré pour une durée de jeu au final très correcte.
L’élément central du jeu, son cœur de mécanique repose sur l’interaction entre les joueurs. Les autres vous prennent des actions, des emplacements, mais le jeu offre toujours des solutions, des voies de détournement pour arriver à vos objectifs. Vous aurez besoin des autres et la concurrence est vraiment bien dosée. On peut même parler d’interaction positive, ce que les autres construisent ou les actions qu’ils lancent vous profiteront également.
Passons au matériel, tout d’abord le plateau central très chamarré et peut paraître chargé pour certains, mais pas d’affolement, tout est lisible. Allez, un petit bémol sur la partie bar à café qui est peut-être trop petite pour les joueurs à l’autre bout du plateau. C’est en tout cas fort joli et c’est à noter !
On peut également regarder du côté des plateaux joueurs. Ils paraissent complexes et trop grands au premier abord, mais une fois la première manche jouée, tout est limpide et la découpe du tour de jeu sur le plateau personnel de chaque joueur est une formidable idée ! En un coup d’œil, on sait où se trouve chaque ressource, où l’on en est, ce qu’il est possible de faire ou pas. Bref c’est du grand art sur ce point, et nombre de jeux feraient bien de s’en inspirer.
Avec tout cela, Coffee Traders propose un grand jeu, physiquement comme ludiquement. Un jeu expert à n’en pas douter, de par les multiples règles et microrègles, mais aussi de par l’étendue des choix qu’il propose.
Au final, un jeu pour joueurs experts amateurs de belles pièces, il serait noté Vital Lacerda sur la boite qu’on ne serait étonné ni du prix ni des petites règles additionnelles, un beau gage de qualité pour le jeu qui arrivera prochainement en version française, à surveiller de près donc !