Test : Fall of Lumen

Test : Fall of Lumen

Il y a quelque temps, Twoid Games nous a proposé Legends of the Void, un jeu semi coopératif avec des relents de Terraforming Mars qui s’est fait sa petite place malgré sa langue anglaise et ses illustrations sans âme.

Le studio a donc relancé une campagne avec un second jeu dans le même univers, Fall of Lumen.

Ce jeu est tout ce que l’on retrouve dans un Kickstarter des plus classiques : du gameplay multimécanique, des ressources dans tous les sens, des cartes à effets qui font tout et rien, bref, c’est bancal.

Mais parfois ça marche ! Et des fois, ça marche même très bien. Alors, je ne vous promets pas le nouveau jeu expert qui mettra tout le monde d’accord, loin de là même.

Fall of Lumen me plait beaucoup, mais il n’est pas simple de dire exactement pourquoi. Je comprends mieux ce qui ne me plait pas et, pourtant, je ne me lasse pas d’y jouer.

Commençons par la fiche technique du jeu avec du deckbuilding, des déplacements de notre héros sur une carte, de la création de tableau, de la gestion de ressources… Trop ? Peut-être. En tout cas, tout cela n’est rien comparé à la création de votre héros en début de partie.

C’est, je crois, mon moment préféré de la partie, cette séquence de choix de cartes avec des bonus dans tous les coins à bien aligner pour démarrer sur les chapeaux de roue. Ce moment me rappelle le sentiment que j’ai à chaque fin de partie de Roll Player où je viens de créer un super perso et le jeu me dit stop. Ici avec FoL, je vais savoir où mon héros va aller et ce qu’il va devenir, je vais avoir toute l’aventure du gars, mieux ! Je vais l’écrire.

Le jeu propose de vous déplacer de région en région pour y récolter ressources et cartes. Le but final est de placer des agents dans la Cité de lumière qui se déplace de manche en manche. Placer ces agents est l’unique source de points de victoire du jeu, un axe clair et net et surtout bienvenu pour la lisibilité du jeu.

Un objectif clair, un perso ultra personnalisable, un petit côté narratif où l’on crée son histoire et avec tout ça, vogue la galère !

Pour le reste, attention, c’est moins sexy. FoL est un jeu « solo à plusieurs », derrière cette belle formule vous trouvez un jeu aux interactions réduites à peau de chagrin. On se bat sur des marchés de cartes avec le premier arrivé, premier servi et sinon sur le placement des agents qui amènera un surcout pour les autres très léger.

Donc pas besoin d’y jouer à 4 au risque d’en faire un jeu bien trop long, bien trop chronophage sans aucun apport au gameplay. Jouez-le à 2 ou à 3, il sera bien plus agréable et avec une durée acceptable.

Le jeu utilise 10 ressources. Dix. C’est le grand n’importe quoi des kickstarter où les idées de gameplay finissent par rendre le jeu foutraque ou bancal en refusant d’enlever un pan de gameplay. Généralement, ça se voit par un nombre de ressources ridicule.

Regardez dans votre ludothèque des jeux avec de nombreuses ressources : il y en a bien évidemment, mais pas à ce point. Terraforming en a 6 et c’est déjà énorme, ici on parle quasiment du double, on peut même ajouter à cela les icônes des ressources qui sont très proches et que les joueurs inversent à chaque partie.

Continuons avec les icônes. Il y en a beaucoup, elles sont vraiment peu claires tant que vous n’aurez pas fini votre première partie, c’est-à-dire une fois que vous aurez joué chaque action 2 fois et donc mémorisé l’action à laquelle correspond « le petit dessin ».

J’ai découvert FoL à la même période qu’Inventions et il n’y a pas photo, Ian O’Toole est un génie de l’iconographie (ce qui n’est pas si mal). Tout ceci pour conclure que les icônes de FoL sont si mauvaises que l’aide de jeu qui reprend tout simplement le livret de règle pour chaque est une aberration, il faut l’apprendre et non l’utiliser, ça n’a aucun sens.

Vous savez désormais ce que je reproche au jeu, je tiens à le préciser de nouveau ici : j’aime beaucoup Fall of Lumen. C’est un jeu qui n’est pas parfait, qui a de gros défauts, mais je me plais tant à le jouer que j’ai pris le parti de passer au-dessus.

Le jeu est là pour vous faire passer un bon moment, il vous donne une petite carte qui vous relance, une ressource qui permet de mieux anticiper la suite, il est bienveillant. On passe donc un moment ludique sans trop de tension, le but est de résoudre son puzzle personnel sans trop se soucier des autres, voire même en s’associant par moment avec eux pour nettoyer une région des troupes du jeu ou en effectuant les missions d’une région pour ajouter des agents à récupérer avant de les placer dans la cité de lumière.

Vous le comprenez, Fall of Lumen n’est pas le jeu parfait. C’est un Kickstarter avec tous ses défauts, mais également de belles qualités qui aura fait tomber la pièce du bon côté dans mon cas.

Un jeu plutôt initié, voire expert, avec pléthore de ressources, cartes et effets à maîtriser pour jouer sereinement. Je vous invite à y jouer plutôt à 2 ou 3, mais vraiment pas à 4, où le jeu devient bien trop long et ennuyeux. Un autre avantage, son prix plutôt contenu de 59 €, une bonne surprise.

Jouez le avant de l’acheter si vous le pouvez, c’est toujours mieux, mais ici le jeu est clivant. L’anglais n’est pas un problème, il n’y a pas de texte sur le matériel, on laisse l’aide de jeu de côté (il existe une VF fan made).

Personnellement, c’est un jeu qui me plait beaucoup et que je rejoue à chaque fois avec plaisir.

ndlr : le jeu n’est pas distribué ni traduit en français pour le moment, à part le trouver sur okkazeo ou un autre site, il est difficilement trouvable à ce jour.

Test : Eternitium

Test : Eternitium

Cette critique a été rédigée à l’aide d’un exemplaire fourni par l’éditeur.

Petit point histoire : Haumea Games, jeune maison d’édition Belge arrive avec deux jeux, l’un d’eux sera examiné dans ce test, l’autre est déjà passé sous le microscope de Kmylle, il s’agit de Valroc, dont vous trouverez le test ici.

L’auteur des jeux est le même à savoir Thomas Carlier.

Parlons donc d’Eternitium et voyons ce qu’il propose.

La vie éternelle, vieux rêve de l’humanité

Car oui, depuis maintenant quelques années (des milliers ?) l’humain rêve de pouvoir vivre pour toujours, sans souffrir de la maladie, sans voir son corps dépérir et le mener à la tombe.

Si les méthodes et légendes ont variées, allant de la plus gentillette aux plus dangereuses pour la santé (Car oui, consommer du mercure aura l’effet inverse, n’est-ce pas, empereur Qin Shi Huang ?) nous avons ici une nouvelle piste : une gemme permettrait d’atteindre l’immortalité pour la personne qui s’en emparerait.

Le souci, c’est qu’elle est perdue dans le temps, à une époque inconnue.

C’est donc à vous et à vos équipes scientifiques, de traverser les époques pour vous en emparer.

Si vous la trouvez en premier, félicitations, vous deviendrez la première et seule personne immortelle, tant pis pour la tronche de votre équipe, elle n’avait qu’à mettre la main dessus avant vous (Et tant pis pour les autres autour de vous aussi hein, une telle récompense ça ne se partage pas !).

Bon, le pitch est prometteur, malheureusement, la quête de l’immortalité n’aura plus aucun sens une fois en jeu, car, comme souvent, j’en conviens, la thématique sera vite oubliée.

La faute peut-être à un manque d’immersion sur les cartes.

Je vais détailler un peu.

Des cartes de toute beauté, mais finalement peu thématiques

Oui, j’adore les illustrations, je trouve que Baptiste Perez a fait un travail magnifique !

Chaque carte époque propose un bâtiment qui correspondra à une période de l’histoire et qui comporte aussi un symbole en fond.

C’est magnifique, mais sans rien de plus ; avec l’absence de bâtiments uniques, pas de dates et juste une architecture qui peut différer, on a quand même du mal à se dire que là on visite l’époque 1300 ou 2300 par exemple.

On l’imagine, mais rien ne renforce cette sensation de vraiment voyager.

Les cartes portail n’aident pas non plus, elles sont, certes, jolies, mais ce n’est qu’une forme géométrique posée sur un fond coloré, rien qui ne nous donne l’impression d’ouvrir une porte des étoiles, la porte d’un T.A.R.D.I.S ou un trou de ver par exemple.

Si j’ajoute à ça le fait que pour certaines personnes (et je parle pour moi surtout) certaines formes géométriques sont légèrement cachées par le bâtiment et peuvent prêter à confusion entre un losange et un triangle, la thématique va vite être oubliée.

Dommage, avec un peu de texte d’ambiance, on aurait pu pousser un peu le truc.

Je comprends les contraintes derrière, de la traduction supplémentaire, donc un cout supplémentaire et il faut faire des choix.

Alors, si la thématique est absente, la mécanique répond-t-elle présente ?

Fort heureusement, oui !

Voilà, le suspens ayant été de courte durée, je vais parler un peu des mécaniques.

Nous avons affaire à un jeu de deckbuilding assez classique dans son approche de départ, mais avec des exceptions qui font qu’il ne ressemble pas à une grosse majorité des jeux du genre.

Lors de la mise en place, on placera des cartes portail, des cartes technologies de base, des cartes technologies avancées et des cartes époque.

On commencera avec 5 cartes dans notre paquet plus une 6ème que l’on pourra acquérir parmi les technologies de base que propose la rivière des technologies de base.

Puis on piochera 5 cartes dans notre paquet pour commencer à jouer.

Ensuite lors d’un tour de jeu, on devra piocher obligatoirement une carte portail parmi celles disponibles (à la Xenoshyft Onslaught par exemple) et l’ajouter à notre main.

Puis on aura 2 options :

  • Jouer tout ou partie de nos cartes en main pour pouvoir faire défiler les différentes cartes époque en notre possession pour tenter d’atteindre la gemme d’éternité.
  • Passer notre tour pour supprimer définitivement une carte de notre main, en conserver éventuellement 1 pour le tour suivant et piocher 6 cartes au lieu de 5 lors du renouvellement de notre main.

Une fois l’option retenue effectuée on aura la possibilité d’acquérir une carte technologie de base ou avancée sans coût en monnaie car c’est là la petite variante du jeu comparé à bon nombre de jeux de deckbuilding : il n’y a pas de monnaie d’échange à proprement parler.

Ici la thématique est logique !

Je m’explique : on joue une équipe de scientifiques, donc on fait des recherches, et on va développer des technologies pour atteindre notre objectif.

Mais le temps passé à développer une technologie est du temps en moins passé à explorer le temps lui-même.

Donc si on prend une carte technologie de base, on devra choisir 1 carte époque qui est face visible et la placer sur notre pile de cartes époque à explorer.

Si on prend une technologie avancée, il faudra prendre les 2 cartes face visible et les ajouter à notre pile.

Oui, les prochaines explorations seront probablement plus faciles, mais il faudra explorer plus longtemps.

C’est là l’un des intérêts et des twists du jeu qui le rendent très intéressant.

Acheter des technologies pour aller plus vite plus tard mais se ralentir un peu, ou tenter de limiter le nombre d’époques à visiter pour remporter la partie rapidement ?

La partie prend fin dès qu’une équipe scientifique trouve sa gemme, on termine le tour en cours et si jamais une autre équipe trouve aussi la gemme lors de ce tour, il y aura un décompte des points pour connaitre quelle équipe pourra s’approprier la gemme !

Ajoutons à ça la possibilité d’embêter les autres, de leur rajouter des cartes époque, de leur prendre une carte époque pour la remplacer par une des nôtres et de les ralentir, nous avons affaire à un jeu à interaction directe qui pourra faire pleurer dans les chaumières.

Il y a aussi une petite mécanique de stop ou encore assez sympa, on peut tenter de se débarrasser d’une carte époque face cachée, mais en cas d’échec, on devra mettre immédiatement fin à notre tour et ne piocher que 4 cartes au lieu de 5 pour notre prochain tour.

A utiliser à bon escient donc !

Verdict

J’adore les jeux de deckbuilding, c’est clairement ma mécanique préférée avec la pose d’ouvriers (d’où mon amour intense pour Dune : Imperium et Vicomtes du Royaume de l’ouest qui allient à merveille ces deux mécaniques).

La thématique me parlait sur le papier, c’est donc tout naturellement qu’Eternitium m’a tapé dans l’œil.

Comme dit plus haut, au final, la thématique est totalement passée à la trappe, mais la mécanique m’a plu.

Certes, il y a peu d’innovations (Mais quel jeu peut se targuer d’être totalement innovant et ne rien recycler, à part peut-être en grande partie Once Upon A Line, un jeu qui n’est pas encore sorti à cette date, mais qui va tout fracasser en arrivant !) mais le mélange proposé, l’interaction directe, la nervosité des parties font que c’est un très bon jeu de deckbuilding qui change un peu, qui est magnifique, qui peut faire pleurer et rire et qui est très sobre dans ses prétentions, mais propose un gameplay qui me plait beaucoup.

Alors oui, le jeu n’est pas exempt de défauts, déjà je parlerai des règles, une coquille est présente dans le livre papier, une phrase qui est liée à l’étape 3 du jeu s’est glissée dans l’étape 2, ce qui perturbe en première lecture car on sent que cette phrase n’a clairement rien à faire ici…

Ensuite, il y a une excellente idée de faire un jeu sans texte, donc totalement iconographique et avec un détail des capacités des cartes en fin du livre de règles.

Mais il manque quelques précisions dans des cas particuliers, et c’est notre logique et notre bon sens ainsi que la volonté de respecter les règles qui nous fera trancher…

Par exemple, quand j’acquiers 1 carte technologie avancée, je dois prendre 2 cartes époque, soit.

Mais puis-je les poser dans l’ordre de mon choix ou y-a-t-il un ordre imposé ?

Quand je dois retourner face visible plusieurs cartes de mon paquet de cartes époques, dois-je prendre le nombre de cartes indiqué d’un coup ou les retourner une par une ?

Car l’ordre d’apparition des cartes époques peut nous favoriser ou nous désavantager.

Outre ces petits manques, le jeu est quand même très bon et j’aime le proposer car il se joue vite, les règles ne sont pas trop compliquées et on est vraiment dans une course pour y arriver plus vite.

Le jeu est prévu pour être joué en solo, mais ça c’est un autre article que vous trouverez ici : (lien à venir).

Disponible ici :

Prix constaté : 22€

Test Solo : Eila et l’éclat de la montagne

Test Solo : Eila et l’éclat de la montagne

Cette critique a été rédigée à l’aide d’une boite fournie par l’éditeur que nous remercions.

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Eila la volonté de nous faire pleurer

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Ne vous fiez ni à l’innocence de la couverture ni à la légèreté de la direction artistique, car un récit tant chimérique qu’amer vous attend.

Eila et l’éclat de la montagne se situe dans un univers fantastique dans lequel une petite lapine toute mignonne passe la majeure partie de son temps à flâner auprès de son vieil ami aux ramures saillantes. Pourtant, le jour où elle aperçoit un éclat lumineux étinceler des montagnes, elle décide de quitter son doux cocon pour s’engager avec courage et ténacité dans un périple qui la mènera dans des contrées qui lui sont inconnues.

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Une mise en place infantile

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Chaque chapitre se déroule en 7 jours maximum chacun divisé en deux phases : Phase jour et Phase nuit. Chaque chapitre est matérialisé par un paquet de cartes et contient des Événements de base de couleurs différentes (rouges, bleus et jaunes).

Triées par couleur en début de chaque chapitre, elles sont ensuite disposées sur leurs emplacements.

La mise en place est rapide et intuitive puisqu’une fois le plateau central et le présentoir installés, il suffit de se laisser guider chapitre après chapitre.

Le plateau permet d’organiser les cartes en fonction de leurs types et de se créer sa propre histoire en fonction de nos choix, car Eila et l’éclat de la montagne est un jeu d’aventure narratif à campagne en six chapitres.

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Une insolente simplicité

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Les cartes jaunes forment les événements dits imminents et sont placées dans le présentoir en guise de pioche. Chaque carte révélée devient active et rejoint l’emplacement « Présent » du plateau central. En fonction de la carte, plusieurs options sont alors possibles et une fois résolue (selon vos choix…), cette dernière rejoint l’emplacement « Passé » (défausse) pour être définitivement perdue ou l’emplacement « Futur ». Attention, car les cartes du Futur viennent garnir votre présentoir pour les jours suivants à la fin de la phase Nuit.

Dès que la dernière carte Événement du présentoir est résolue, la phase de Jour s’achève ; on effectue donc aussitôt la phase de Nuit (avancée du chapitre, vérification d’objectif, mélange de la pile Futur).

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Un chemin plein de surprises…

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Ce qui est chouette avec Eila et l’éclat de la montagne, c’est qu’il regorge d’une multitude d’idées qui le démarque d’autres propositions ludiques :

D’abord sur la contenance des chapitres. Comme mentionné plus haut, chacun d’entre eux vient avec ses cartes, mais également un prologue ainsi qu’une ou plusieurs fins alternatives (vos choix dictent celle que vous devez suivre) proposés sous forme de bandes dessinées. Au gré des aventures d’Eila, vous avez donc plaisir à feuilleter ces quelques pages qui, à l’approche de l’issue finale, vous paraissent bien moins oniriques qu’au début de l’aventure.

Ensuite, en plus d’orienter le récit, vous modelez votre deck en fonction de vos choix présents, ce qui vous engage pour le reste du chapitre. Garder une carte pour les événements à venir ou la perdre définitivement.

Dois-je récolter la nourriture qui m’est proposée et défausser la carte ?

Dois-je recevoir trois peurs maintenant, mais stocker cette carte dans le futur ?

Choisir une option punitive peut s’avérer être bénéfique le jour suivant afin d’accroître l’arborescence narrative du récit et vous offrir du loot et du soutien, que vous conserverez (sauf mention contraire) durant toute l’aventure.

C’est ça Eila et l’éclat de la montagne ; on se questionne sans cesse.

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…Aux apparences trompeuses

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Si de prime abord, la mécanique principale semble laisser croire à un schéma classique, nous sommes très vite dupés par l’ajout de mécanismes imbriqués dans le récit ; du deck-building, de l’exploration, du memory, de la gestion de ressources… Même si tous ne le servent pas.

D’un côté, Eila et l’éclat de la montagne ne ressemble à aucune autre proposition du marché ; c’est assurément un jeu unique possédant une forte identité. On ressent l’investissement et la volonté de l’auteur de nous faire une proposition nouvelle, et c’est saluable.

Néanmoins, j’ai ressenti une sensation d’inachevé, comme si toutes ces merveilleuses idées, qui auraient pu l’asseoir définitivement au Panthéon de jeux du genre (Sleeping gods, Tainted grail), manquaient de maturation.

En admettant que l’histoire ait raison de l’émotivité de bon nombre d’entre-nous, la narration n’aurait-elle pas mérité un traitement plus approfondi ?

Le concept d’associer la B-D comme transition est formidable, mais pourquoi ne pas avoir poussé le concept plus loin ?

Personnellement, j’aurais préféré plus de contenu, plus de planches, de bulles, quitte à le proposer au format numérique pour pallier le maigre contenu des cartes.

De plus, l’intégration de mécanismes différents selon les chapitres ne fonctionne pas tout le temps selon moi, notamment le memory qui m’a sorti un peu du jeu à un certain chapitre ainsi que le système de combat qui aurait mérité bien plus que de dépendre d’un simple jet de dé.

Enfin, j’ai trouvé le challenge peu relevé avec la difficulté de base.

Heureusement, le jeu propose des événements et objectifs avancés. Je préconise donc ce mode pour celles et ceux qui souhaitent corser leur aventure.

Par conséquent, Eila et l’éclat de la montagne est une jolie promesse ludique qui ravira les joueurs souhaitant s’évader un soir de semaine.

En revanche, je recommande de vivre l’aventure d’un seul tenant afin d’en extraire tout son potentiel, et même s’il s’agit d’un jeu solo, de par son récit, jouer en famille me semble être la configuration optimale.

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Julien.

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Disponible ici :

Prix constaté : 41 €

Test : Scarface 1920

Test : Scarface 1920

J’ai vu cette boîte immense et cette illustration superbe dans ma boutique locale, et là, je me laisse gagner par l’enthousiasme. Tout de suite j’ai des souvenirs de ces grands films qui m’ont marqué, le Parrain, Scarface, et surtout les Incorruptibles avec Kevin Costner. Je me remémore aussi les heures passées sur les jeux Mafia, et tout le plaisir d’incarner un mafieux des années 30. Les voitures, les flingues, les chapeaux, la contrebande etc …

Me voici replongé tout à coup dans cette période trouble, mais tellement intéressante historiquement, visuellement, et ludiquement ! Forcément je prends cette boîte de l’étagère, je la prends à 2 mains vu le poids de la bête, et je me plonge dans le descriptif, et les photos du dos de la boite.

Là je me dis que ça passe ou ça casse. On sent venir à plein nez le projet taillé pour faire affluer d’avides backers sur Kickstarter, à grand renfort de matos, d’illustrations impactantes, et d’une boîte d’une taille bien trop grande. Est-ce qu’on se retrouvera comme souvent avec un jeu assez plat, pas grand-chose à se mettre sous la dent mécaniquement, mais avec des figurines à ne plus savoir quoi en faire, une mise en place d’1 heure et un sentiment de tout ça pour ça ?

Comme d’habitude, je ne vais pas vous faire languir : et bien oui, c’est pas passé, ça a cassé.

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Rien qu’à la lecture des règles j’ai commencé à avoir de gros doutes. C’est écrit de façon très scolaire, pas vraiment instinctif, et très dirigiste. Bon j’ai bien l’impression qu’on essaie de m’en mettre plein les mirettes en me détaillant les x actions possibles à mon tour, les multiples lieux, les différentes zones du plateau. Et de mon plateau perso aussi. Et de mes figurines.

Très clairement on a pas mal de possibilités, et c’est souvent un bon point. Sauf dans certains cas.

Donc vous allez devoir gérer votre gang, envoyer vos hommes de main dans les différents lieux pour y faire pléthore d’actions. La finalité c’est de récupérer du pognon, qui s’obtient généralement en produisant de la gnôle et des flingues, et en les revendant même aux autorités ^^ Les cartes en main vous donneront des « points d’actions », et normalement vous allez améliorer vos cartes durant la partie, et donc renforcer la puissance de vos actions. Sur la carte, les contrôles de quartiers vous donneront des bénéficies et des endroits pour stocker, et occasionneront quelques trop rares et trop lentes confrontations.

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Plein les yeux, voire même ébloui !

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Ce jeu est une belle illustration des dérives de Kickstarter dans le sens où il me semble avoir été « forcé » à plusieurs endroits dans sa conception. Si des écoles de game design jds existaient, on pourrait surement le montrer en exemple, dans le cours consacré à « comment épurer un jeu, et les exemples à ne pas suivre » du professeur Kathalè, savant fou du débusquage d’auteurs prometteurs et docteur-es co-autorat.

Très clairement toute la partie basse du plateau aurait besoin d’être épurée. Proposer des cartes différentes peut apporter une belle variété au jeu, mais quand presque chaque carte nécessite de prendre la carte en main afin d’identifier les effets, et de comprendre les imbrications, ça va trop loin. On parle de 2 « rivières » de cartes disponibles à l’achat. La taille du plateau et le nombre d’éléments présents sur la table glisse déjà le jeu dans la catégorie « y’a un peu de rab je vous le mets ? », on va aussi rajouter un jeu dans le jeu : vous voyez qu’il y a des cartes à acheter pour améliorer votre main, mais vous ne verrez pas ce que fait cette carte parce qu’on la surcharge de texte. Un gros travail de simplification et d’épuration aurait été très bénéfique pour cette partie-là. Et c’est dommage car ça participe à cette impression d’être noyé par la multiplicité des éléments, au détriment du game play.

La durée de votre 1ère partie sera conséquente, et vous perdre du monde en chemin. Lors de la 1ère partie nous partîmes 4. Nous arrivâmes … 0

Abandon. On a décidé d’en rester là et de passer à autre chose c’est dire.

Moi je suis un peu maso, et surtout je me dis que je vais prendre le temps d’écrire sur ce jeu, donc je veux en voir encore plus (même si à postériori j’avais pas besoin de ça en fait …).

Donc j’y retourne. J’ai de plus en plus de mal à m’y mettre mais je me force et je fais 1 partie en solo. Je réussis à réunir 2 autres joueurs, et j’en refais une à 3 joueurs.

Je peux cocher la case, et avoir l’achievement pour avoir persévéré, mais j’aurai pu écrire cette critique après ma 1ère partie. Bien sûr, j’ai moi eu plus de facilité avec les effets des cartes (et encore ça dépend lesquelles), le déroulé des actions. Mais s’il faut 3 parties pour se sentir à l’aise dans le jeu, c’est qu’il y a un truc qui colle pas, ou alors on est sur du Lacerda.

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Beau travail d’édition et illustrations aux top

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Le gros point fort du jeu est un travail d’édition presque aux petits oignons. Oui le jeu est pensé pour Kickstarter donc déborde de matériel et fais dans la surenchère. Mais ce matériel est très qualitatif, les choix éditoriaux vont dans le sens de l’immersion et du souci du détail pour sublimer cette période. L’illustrateur Antonio Stappaerts (aperçu aussi pour 300 chez Nuts Publishing) a fait un boulot incroyable. Je suis conquis par la direction artistique et son travail. Chaque carte mérite un peu de votre attention pour y observer tous les détails. Les noms utilisés sont très souvent des noms de personnes ayant justement existé durant cette période trouble. Ce bon travail de documentation est à souligner.

C’est d’autant plus dommage car ce jeu met toutes les chances de son côté pour m’attirer, quelle déception que le jeu en lui-même n’ait pas eu ce résultat. Côté iconographie on est quand même sur un jeu bien chargé, et autant au niveau de la compréhension des règles, du déroulé des actions et de la compréhension de l’iconographie, la 1ère partie sera plutôt pénible et tirera en longueur. L’analysis paralysis prendra tout son sens, et si vous jouez à 4, vous partez pour 2 à 3 heures pour la 1ère. Le pire c’est que les suivantes seront quand même plus fluides, mais pas tant que ça puisque les cartes sont tellement chargées et différentes que vous devrez prendre le temps de lire et relire chaque carte qui apparaît sur le marché avant de vous dire « ah tiens cette carte ça peut être pas mal pour mon jeu, je vais réfléchir à l’acheter ». C’est dommage et ça nuit au rythme du jeu, et surtout ça ajoute de la rejouabilité artificielle. Oui, le jeu propose plein de cartes « associés » différentes. Il vous faudra 8 parties pour les voir toutes. Oui les cartes actualités sont différentes. La partie basse du plateau qui montre les rivières de cartes « associés » dispo à l’achat, les cartes deals et les cartes jobs aurait nécessité un sacré boulot d’épuration afin de fluidifier tout ça.

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Voici la somme d’infos à ingurgiter avant de choisir quelle carte vous pourriez acheter durant ce tour…

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Règlements de comptes de bac à sable

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La mafia, c’est quand même pas le monde des bisounours, et je m’attends à ce que ça défouraille quand même un peu. Ok il y a de la gestion, la contrebande, le comptable qui tient les comptes de tout ce business bien juteux, les pots de vins, etc … Mais aussi les fusillades, les poursuites en véhicules, les descentes de flics et les expéditions punitives.

Bon de ce côté-là, Scarface 1920 m’a vraiment laissé sur ma faim. D’une part parce que le rythme du jeu est très lent. 1 action principale à votre tour + les compétences de vos cartes. En gros faudra repasser pour programmer une expédition éclair, et prendre par surprise le gang adverse. C’est dommage car ça favorise la lisibilité et l’anticipation. Vous aurez une chance de réagir face à une attaque ennemie qui ne sortira pas d’un chapeau comme par miracle. Non, vous verrez venir le coup, et aurez normalement l’opportunité d’anticiper.

On repassera pour la violence des retournements de situation.

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Déçu …

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Au final, Scarface 1920 a de très bonnes bases mais s’égare sur la route tortueuse du démon Kickstarter, qui finit par lui susurrer à l’oreille d’en rajouter encore et toujours, au risque de renier son principe même. Épurer un jeu devrait être une règle d’or, et l’ajout pour l’ajout devrait être proscrit. Je vous ai dit qu’il y avait des extensions pour ce jeu ? Avec pléthore de matériel bien sûr, vous avez compris l’idée 😉

Donc un jeu qui nous annonce du contrôle de zones, une ville dont les quartiers pourraient passer du contrôle d’un joueur à l’autre, tout le chaos impliqué par la présence de plusieurs gangs de mafia. On est vite revenus. La montée en puissance est très (trop) lente, on survole les mécas de deckbuilding, de contrôle de zone. Le jeu n’est pas complexe en soi, mais est rendu complexe par l’addition de toutes ces couches artificielles, ces cartes diverses et variées, et de cette rejouabilité artificielle. Le game design semble s’être éloigné de son objectif de départ, et la créature créée ne marche pas droit.

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Test : L’année des 5 empereurs

Test : L’année des 5 empereurs

Cette critique a été rédigée à l’aide d’une boite fournie par l’éditeur que nous remercions.

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L’Année des Cinq Empereurs est un jeu de commande. Par le musée gallo-romain Lugdunum, basé à Lyon. A propos d’une période plutôt méconnue de l’Empire Romain. Ah ça, au Labo, on sait donner l’envie de cliquer et de lire nos articles, c’est un vrai talent. Mais ne partez pas tout de suite ! Le jeu vaut quand même qu’on s’y attarde. Au pire, vous aurez gagné un peu de culture générale, et Dieu sait que vous en avez bien besoin.

Ce deck-building propose donc de revivre un passage plutôt torride de l’histoire de Rome, avec successivement 5 personnages romains qui ont tenté tour à tour de briguer la charge d’empereur à la suite du meurtre de Commode (mais apparemment Russel Crowe n’est pas dans le jeu, grosse opportunité marketing loupée si vous voulez mon avis). Chaque joueur incarne l’une de ces hauts dignitaires, sans que cela ne change grand-chose. Tout au plus est-il indiqué sur la fiche du joueur pendant quelle période son personnage a brièvement été tout en haut du Colisée.

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Il est venu, il a vu, il a piochu

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Je le sens, je suis en train de vous perdre à parler de choses intellectuelles, alors dépêchons-nous d’aborder le gameplay. Deckbuilding hyper classique où l’on joue les cartes de sa main pour acheter d’autres cartes choisies dans 6 pioches différents, il y a cependant un petit twist. En effet, ces cartes que l’on récupère vont servir essentiellement lors de la deuxième partie du jeu, celle qui commence quand le joueur déclare sa volonté de devenir empereur. Chacun choisit quand le faire, et il y a là un timing à gérer, parce qu’on retourne son plateau joueur et ça change plusieurs choses.

La première, c’est qu’on installe sa base quelque part sur la carte de l’Empire Romain, avec des troupes et un surcoût à payer si l’on souhaite continuer à acquérir des cartes en provenance d’autres provinces que la sienne.  La deuxième, c’est que toutes ces cartes qu’on a achetées vont enfin servir à autre chose qu’à récolter des sesterces. En utilisant les icones présentes dessus, le joueur va pouvoir déplacer ses légions, en amener d’autres sur le terrain, freiner un peu les autres joueurs, débloquer des bonus passifs qui permettront de piocher plus de carte à chaque tour, et ainsi de suite. Elles vont surtout permettre d’obtenir des étoiles dans différentes catégories et ainsi tenter d’obtenir l’un de ces fameux objectifs.

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Quand y en a un, ça va. C’est quand y en a plusieurs qu’il y a des problèmes…

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Il s’agit donc d’une course, et choisir le bon moment pour se lancer est crucial. Il faut prendre le temps d’enrichir son deck avec suffisamment de cartes pour viser un ou deux objectifs rapidement, mais ne pas trop tarder à se lancer au risque de voir un adversaire les ravir sous notre nez. Cette sensation d’urgence est d’autant plus renforcée par le fait que la plupart de ces objectifs peuvent être repris par un joueur alignant plus d’étoiles que son actuel détenteur, il ne vaut donc mieux pas trainer en route. La situation sur le terrain n’est pas non plus à négliger, certains objectifs récompensant le fait d’occuper plusieurs provinces ou encore Rome.

Mais attention également à ne pas montrer ses muscles trop tôt (c’est une figure de style, rhabillez-vous s’il-vous-plait). Les cartes que l’on utilise pour engranger des étoiles sortent de notre deck et on peut se retrouver bien dépourvu si on est parti la fleur au gladius. Bref, il n’y a pas de fausse note et l’ensemble marche plutôt bien, même si le jeu aurait pu être un peu plus ambitieux. On peut par exemple regretter un manque d’asymétrie, alors que le jeu s’y prêtait complétement, que ce soient les différents prétendants ou les 6 paquets dans lesquels on se sert pour constituer notre deck. Certes, le paquet de la province de Carthage sera plus orienté économie tandis que celui d’Ephèse est plus axé militaire, mais cela reste assez marginal. Il est cependant intéressant de regarder l’état des différents paquets quand on fait la bascule et qu’on choisit la province dans laquelle s’installer : lorsque le paquet est vide, le joueur qui a sa base dans cette province peut assez facilement récupérer l’objectif de Gouverneur associé.

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Force et chaine Découverte

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Si l’on met de côté un instant la dimension historique et éducative du jeu, l’Année des Cinq Empereurs est donc un deckbuilding familial et efficace, et ce n’est pas si fréquent. On épie ses adversaires, on rassemble ses troupes, on se prépare à franchir le Rubicon. Certes la rejouabilité est faible et l’esthétique peut en rebuter certains, mais la proposition, même si elle est modeste, reste intéressante et elle parfaitement exécutée. Et un jeu qui me pousse à ouvrir une page Wikipedia sur la mort de Commode pour écrire cet article, c’est un jeu qui a rempli son objectif.

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