Tests : Les Chroniques d’Avel et Dungeon Legends

Tests : Les Chroniques d’Avel et Dungeon Legends

La critique de Dungeon Legends a été rédigée à l’aide d’un exemplaire fourni par l’éditeur.

Peu de gens s’en souviennent, mais l’année 2020 a été marquée par un événement terrible : le confinement. Ne croyez pas ce que les magazines de l’époque racontent, ce n’était pas le temps du ressourcement et de la méditation déconnectée. C’était le Vietnam ou presque, et il a fallu faire preuve d’imagination pour survivre, surtout quand il s’agissait d’occuper une petite fille friande d’aventures. D’ailleurs, ce goût pour les histoires remplies de monstres, de héros, et de dés, lui est resté depuis. Heureusement, cela fait un certain temps que les jeux de société pour enfants s’intéressent au sujet, à savoir les jeux coopératifs qui nous voient affronter des bestioles terrifiantes et découvrir des trésors. Alors qu’on avait déjà Andor Junior ou Chronicles of Light dans la ludothèque, un ami m’a conseillé les Chroniques d’Avel. J’ai bien fait d’écouter cet ami.

Dans le genre aventure puzzlesque, le jeu de <copier – coller> Przemek Wojtkowiak est en effet bourré de bonnes idées, et son cousin un peu plus âgé, Dungeon Legends, également, en plus de partager le même univers, des illustrations pas dégueu par <copier – coller> Bartłomiej Kordowski et un matériel très qualitatif. Suivant l’âge et l’appétence de votre tête blonde pour la chose, je conseillerai l’un ou l’autre, mais on va d’abord prendre le temps de voir quoi il retourne exactement. On n’est pas chez les sauvages.

Les Sims : mon premier Land Crawler

Chroniques d’Avel nous enjoint à incarner l’un des héros chargés de défendre le château du royaume, alors que les astres ont prédit l’arrivée d’une Bête dans 12 manches. Ouais, on n’est pas chez Météo France ici, on fait dans la précision. En attendant l’apocalypse, il s’agit donc de s’équiper, d’améliorer cet équipement, de récupérer des potions, et de préparer le terrain en évitant la surpopulation de monstres, en construisant des remparts et en posant des pièges. 2 actions par tour, se déplacer, attaquer, ou activer le lieu où l’on est, les règles sont élaborées juste ce qu’il faut pour des enfants de 6-7 ans. Viennent alors les différentes bonnes idées qui classent selon moi Chroniques d’Avel dans les vrais bons jeux coops pour enfants.

Première bonne idée, chaque joueur a droit à son plateau double couche qui figure un personnage qu’on peut customiser en lui donnant un nom, en dessinant son blason, et en coloriant sa tenue. Le jeu va même jusqu’à proposer un mini-générateur de noms en cas de panne d’inspiration. La deuxième couche du plateau joueur permet de dessiner les contours du personnage, et donc les emplacements pour son casque, son arme, son bouclier, mais aussi l’espace occupé par son sac à dos. Eh oui : si le paquetage du joueur est déjà plein, plus moyen d’y rajouter des pièces d’or, une potion, ou encore un casque de rechange, il faudra s’en passer, ou jeter quelque chose à la place. On ajoute ainsi un petit dilemme facile à appréhender pour les enfants, c’est très malin, en plus de rendre la personnalisation de son héros ou héroïne carrément satisfaisante.

Ça tombe bien, c’est le cœur du jeu : les combats servent en effet principalement à récupérer de l’équipement, des pièces d’or qui permettent d’acheter de l’équipement ou de l’améliorer, bref à accéder à des dés de combat plus puissants que ceux qu’on lance au début. Et là, deuxième idée qui plait beaucoup : quand on gagne un équipement, il faut le piocher au hasard dans un sac en toile, MAIS chaque type d’équipement présente une forme bien particulière. On tripote donc chaque token jusqu’à reconnaitre sous ses doigts les contours d’un bouclier ou d’une potion. Superbe façon d’introduire la petite excitation de l’aléatoire, mais sans la déception de tomber sur un loot qui ne nous convient pas, à condition d’être suffisamment attentif, c’est une belle trouvaille.

Elève appliqué et très soigné, pensez à rajouter un peu de folie

Le reste du jeu est bien calibré, avec une difficulté bien dosée, pas mal de liberté dans l’action, une courbe de progression au fur et à mesure des parties (« cette fois-ci, faut trouver rapidement la tuile qui permet de construire les murailles ! »), la surprise quand on découvre un nouveau monstre, l’analyse qui se met en place parce que les plus grosses bestioles annuleront certains dés, l’adrénaline et l’appréhension quand enfin le big boss débarque et commence à progresser vers le château avec sa cohorte de vampires, trolls et autres dragons. Pour ces catégories d’âge et de type de jeu, on tient un jeu très solide, même si évidemment il en faudrait toujours plus : la rejouabilité n’est pas immense par exemple, puisqu’elle dépend uniquement de l’emplacement des tuiles terrain, placées face cachée au début du jeu et suivant un agencement choisi parmi ceux du livret de règle en fonction de la difficulté souhaitée.

Il manque également un peu de différenciation entre les différents personnages incarnés par les joueurs, et ne croyez pas qu’il s’agisse d’une lubie d’adulte : pour les enfants aussi c’est appréciable, puisque ça leur fournit une ligne directive, un guide, quand il s’agit de décider quoi faire dans un jeu qui ne nous dit pas ce qu’il faut faire. Andor Junior le fait par exemple, avec l’archer qui a plus de jetons d’action, le nain qui peut passer par la mine, ou le guerrier qui peut lancer plus de dés. Chronicles of Light aussi, chaque héroïne ayant des actions spécifiques et des quêtes en accord. Dans Chroniques d’Avel, tout le monde commence avec la même feuille blanche, et chacun tentera d’améliorer son valeureux héros avec ce qui lui tombe sous la main. Ce n’est pas forcément facile à prendre en main. Mais vous savez quel autre jeu glisse un peu d’asymétrie dans sa mise en place ? Dungeon Legends.

Rengagez-vous, qu’ils disaient !

Jeu coopératif également, toujours situé dans le royaume d’Avel, où l’on doit toujours empêcher des monstres d’atteindre ce foutu château. La ressemblance s’arrête cependant là, le gameplay étant tout autre, et la proposition un peu plus ambitieuse. Cette fois-ci, chaque joueur doit exploiter au mieux une main de 5 cartes, qui vont lui fournir les ressources nécessaires aux actions qu’il souhaite réaliser pendant son tour. Se déplacer, combattre, se soigner, récupérer de la poussière d’étoile, tout ça peut s’effectuer à condition d’avoir les icônes correspondantes en main, à charge ensuite au joueur de décider s’il doit taper sur ce monstre qui se rapproche dangereusement du château, ou plutôt se renforcer, ou encore activer ce lieu qui permet d’avancer vers la réalisation de la quête et donc la victoire.

Les 6-7 ans risquent d’être un peu perdus du coup, à moins qu’ils soient particulièrement éveillés. Même s’il y a peu de texte à lire, il y en a, et les dilemmes à trancher sont un peu plus nombreux que dans Chroniques d’Avel, ce qui fait évidemment tout l’intérêt du jeu. On gagne également en complexité tant au niveau des personnages que du scénario lui-même. Chaque héros, il y en a quatre au total, est fourni avec son deck de cartes dédiées, qui ne présenteront pas exactement les mêmes icônes d’un personnage à l’autre, mais également son plateau personnel, sur lequel on constatera également de légères différences, comme le nombre de points de vie ou l’existence d’un bonus de départ. Rien de très fou, mais ça donne tout de suite une identité au personnage qu’on choisit d’incarner. La mise en place propose par ailleurs de choisir un lot de 3 compétences qu’on pourra toutes activer une fois et une seule pendant la partie, ce qui renforce encore cette différenciation.

C’est mardi, c’est catacombes

Le scénario, lui, est à choisir parmi cinq, avec des objectifs, des monstres et des obstacles ou événements différents. Le jeu propose également de les enchainer au cours d’une mini-campagne, avec pour seul fil rouge la possibilité de conserver d’un scénario à l’autre l’une des cartes avancées gagnées pendant la partie. Là encore, ça reste très léger, mais pour des enfants c’est parfait, et puis les cartes avancées, toutes avec un effet foil, sont assez classes. J’ai d’ailleurs été ébaubi par la qualité du matériel pour un jeu retail, loin des folies Kickstarter : cartes foils, tuckboxes individuelles pour chacun des personnages et des scénarios, avec liste des composants inscrite sur le rabat, tapis néoprène, plateaux double couches, le jeu se met en place très facilement et est hyper satisfaisant à jouer. Et si vous avez une imprimante 3D ou que vous connaissez quelqu’un qui en a une, il existe sur Thingiverse des fichiers STL de très bonne qualité qui permettent de remplacer les standees des personnages par des minis.

On est donc clairement loin du dungeon crawler pour barbus aguerris, qui trouveront le gameplay un peu simple et la profondeur de jeu pas très… profonde justement : peu de scénarios, des monstres qui se ressemblent tous, une évolution quasi inexistante des personnages. Et malgré ce qu’on peut voir ou lire un peu partout, il ne s’agit certainement pas d’un deck building, puisque si on peut effectivement gagner de nouvelles cartes qui arriveront rapidement dans notre main, jamais est-il possible de se débarrasser de celles qui ne nous intéressent plus. On ne construit rien, il n’est pas possible d’orienter son deck d’une quelconque façon. Mais pour des enfants à partir de 9-10 ans, ou même des joueurs qui découvrent le genre, c’est assimilable rapidement, le puzzle est bien présent et peut d’ailleurs se révéler corsé dans les derniers scénarios, la mise en place est aisée et le jeu très agréable à jouer.

Attention, un jeu cool peut en cacher un autre

Si vous cherchez donc du jeu d’aventure pour vos marmots, je ne peux que conseiller les deux titres, tant ils ont été soignés dans leur conception et leur fabrication. Ils ne sont pas interchangeables bien sûr, et je laisserai chacun juge de la précocité de sa progéniture. Quoi qu’il en soit, et comme tous les bons jeux pour enfants, ils se révèlent également stimulants à jouer pour les parents et, en ce qui concerne Dungeon Legends tout du moins, pourrait même intéresser des joueurs occasionnels ou qui ne veulent pas se coltiner les pages de glossaire et les livrets de règles à rallonge. Le seul souci au final, c’est de devoir à chaque fois vérifier sur Internet avant d’écrire le nom de <copier – coller> Przemek Wojtkowiak ou encore de <copier – coller> Bartłomiej Kordowski.

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Test : El Burro

Test : El Burro

Cette critique a été rédigée à l’aide d’un exemplaire fourni par l’éditeur.

Ne soyez pas un âne

C’est sur ce jeu de mot facile avec le nom du jeu que s’ouvre ce test qui sera, (du moins je l’espère) plus sérieux !

Pourquoi dis-je qu’il ne faut pas être un âne (ou une ânesse hein, ne voyez aucun sexisme, mesdames vous avez aussi le droit d’être une bourrique !) ?

Pour aucune raison, c’était vraiment pour la blague (Mais c’est qu’il persiste en plus avec ses blagues nulles le bougre !).

Choisir El Burro, c’est pour moi faire preuve d’intelligence et de bon goût, voilà, là c’est plus sérieux !

Pourquoi cela ?

Tout simplement parce qu’El Burro, c’est une version remaniée de « La Granja », donc si vous avez joué à la Granja, vous verrez de belles améliorations et vous ne serez pas totalement déroutés dans les règles et certaines mécaniques.

Mais, malgré tout, le jeu est profondément différent.

Dans le livre de règles les auteurs expliquent qu’ils avaient une autre vision pour leur jeu La Granja et que, plutôt que de trop modifier les règles et d’ainsi tronquer leur jeu, ils ont préféré refaire un nouveau jeu !

Et grand bien leur en a pris !

Je ne peux que saluer cette initiative.

Petit flashback personnel

Attiré par la réédition nommée deluxe master set de toute beauté, j’ai été attiré par « La Granja ».

Avec une thématique sympa, du matériel de dingue, j’ai cédé à l’appel de l’achat et, tout naturellement, j’ai invité des camarades de jeu et nous avons mis la bête à l’épreuve.
Epreuve qui s’est soldée par un manque d’engouement global.

4 ont joué, 4 ont trouvé le jeu moyen et frustrant.

Frustrant car très aride, avec la sensation de toujours manquer de tout, une impression de longueur pour avoir accès aux marchés et une interaction qui nous a semblée faible ont fait que le jeu nous a paru fade et qu’il n’était pas à notre goût.

Donc quand on m’annonce une version avec plus d’interactions, plus de générosité et moins de frustration, j’étais très intrigué !

Retour à la réalité

Cette refonte m’a donné envie de jouer à El Burro.

La lecture des règles m’a confirmé que j’avais affaire à un jeu « La Granja ».

La structure est la même (comprenez, pas très intuitive au premier abord), beaucoup de similarités, mais aussi d’énormes différences.

Je ne vais pas faire un résumé des règles, mais sachez que vous allez surveiller vos adversaires, faire des livraisons sur leurs marchés ou leurs étals (oui, oui, vous allez vous entraider, mais rassurez-vous, cette entraide vous sera profitable, ce n’est pas un jeu coop non plus !) et vous allez faire la course !


Car le jeu est une course, 4 manches, pas une de plus, 3 actions par tour (Rassurez-vous, vous pourrez faire un peu plus de 3 actions, ne paniquez pas, les actions bonus seront primordiales !) et fin du jeu, décompte final des points et on en parle plus !

Enfin si, on en reparle, parce qu’on va refaire la partie dans sa tête et essayer de voir ce qui a mené à notre défaite ou, au contraire, ce qui nous a mené à la victoire.

Car les manières de scorer sont variées et, sans être pléthoriques, il n’y a pas qu’une seule stratégie viable.

Au fil des parties, vous allez tenter de nouvelles choses et voir que tout est plus ou moins rentable et qu’il vous faudra faire preuve d’opportunisme, d’adaptation et de stratégie pour tirer votre épingle du jeu.

Le jeu est plus généreux que La Granja dans le sens où, même avec peu de champs pour produire des ressources, il est possible d’en acquérir d’autres manières et de ne pas être totalement démuni.

Et surtout, quand on place un champ, il produit IMMEDIATEMENT !

Oui, immédiatement !

Ce qui offre une plus grande souplesse que la Granja qui vous obligera à attendre la prochaine manche pour que votre champ produise.

C’est certes, moins thématique, mais c’est quand même bien moins frustrant.

Ajoutez à cela des objectifs personnels ou communs, qui rapporteront plus de points si vous atteignez un objectif commun en premier, une gestion des actions intelligente avec une action principale et un bonus, bonus qui changera d’emplacement à chaque manche, quelques bonus à chaque manche et vous avez un cocktail qui permet plus de libertés que dans La Granja, sans pour autant manquer de frustration !

Généreux, mais pas excessivement généreux !

N’ayez crainte, nous ne sommes pas dans la générosité d’un « Earth », dans lequel on ne manque jamais de rien.

Si les denrées brutes sont relativement faciles à obtenir, le reste est une autre histoire.

Les cochons par exemple, c’est une denrée qu’il faudra bien anticiper, car elle sera plus rare, moins facile à obtenir.

L’argent peut se révéler être soit très rare, soit foisonnant selon le moteur que vous mettrez en place !

Avec les cartes à pouvoirs multiples, vous allez vous faire des nœuds au cerveau pour savoir si vous ajoutez un champ qui vous serait utile, si vous utilisez plutôt son côté administration pour améliorer vos revenus, si vous l’utilisez comme étal de marché pour tenter de scorer et de faire avancer votre âne plus loin ou encore si vous allez l’utiliser comme acquisition pour avoir des actions améliorées !

Et les ouvriers…

Rares, chers, mais tellement indispensables pour vous tirer d’un mauvais pas ou augmenter une action et réaliser de magnifiques coups d’éclats !

Donc la frustration est présente, les choix cornéliens aussi, la tension en palpable et le cerveau fume pour savoir quoi faire !

Serez-vous une bourrique, un âne ou une personne avisée ?

Vous vous demandez peut-être encore si le jeu est fait pour vous ?

J’espère que ces dernières lignes vous aideront à vous décider.

1er argument : Le jeu est localisé par un nouvel éditeur Français : Fentasy Games, une équipe de passionné composée d’une seule personne (oui, je crée des équipes de 1 moi !) qui se spécialise dans le jeu expert, donc il mérite des encouragements. (Ils méritent, car Florian n’est pas seul, son épouse l’aide et le soutient !).

Ce n’est pas suffisant ?

2ème argument : Le jeu est resté sur ma table pendant presque 1 semaine sans être rangé dans sa boite, jouant entre 1 et 2 parties par jour tant je l’ai aimé dès la première partie et que je voulais voir le potentiel du jeu.

Pas une fois je ne me suis lassé, pire même, chaque partie me mettait en joie, j’étais heureux d’avoir joué (et bien souvent perdu, il faut l’admettre…) et je voulais en refaire une aussitôt !

Toujours pas suffisant ?

3ème argument : le matos est superbe, agréable à manipuler et vous avez des plateaux double couche !

Encore un argument ?

4ème argument : le jeu est à 58,50€ chez notre boutique partenaire Golden Meeple, c’est très correct pour ce niveau de matériel et ce type de jeu !

Un dernier pour la route ?

5ème argument : c’est un concurrent pour être LE jeu de l’année pour moi dans la catégorie expert et il pourrait bien se faire une place dans mon panthéon des meilleurs jeux de tous les temps !

Devenant de plus en plus difficile pour les jeux expert et ayant un panthéon quasiment immuable, ce n’est pas rien !

En résumé : El Burro c’est du bon, achetez-en !

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Prix constaté : 58,50 €

Test : Garden Rush

Test : Garden Rush

Mon flair légendaire ne m’avait pas trompé lors du dernier festival du jeu à Cannes, et d’ailleurs il ne me trompe jamais, comme la fois où j’ai fait all-in sur la dernière campagne CMON juste avant qu’ils annoncent l’arrêt total de leurs campagnes de crowdfunding. Mais je m’égare. Je disais donc, les jeux à 2 ont le vent en poupe. Ça et les jeux de plis, mais Romain vous bassine déjà à longueur d’article, pardon, vous apporte toute son expertise sur cette délicieuse mécanique, donc on va plutôt revenir à nos moutons, voire à nos nains de jardin. Garden Rush, puisqu’il s’agit de lui, avait fait son petit buzz sur le salon au même titre que Toy Battle ou Zenith, et promettait des règles faciles à assimiler, des parties rapides, et un fort goût de reviens-y.

Créer un jeu en 2025 pour les nuls

Règles faciles ? Check : chacun gère son jardin, à votre tour vous prenez une tuile parmi les 5 présentes dans la rivière commune, ou vous scorez celles que vous avez déjà placées. Le premier à 40 points a gagné, et voilà. Evidemment, y a des contraintes de pose et de scoring, mais c’est vraiment très rapide à expliquer et à jouer, même pour des enfants. Une fois le principe bien en main, le jeu nous invite à rajouter des tuiles taupes/outils supplémentaires, rien de très bouleversant. Autre point positif, la mise en place hyper rapide et maligne, la boite du jeu servant de plateau de jeu (pour le couvercle) et de piste de scoring (pour le fond). Ça prend littéralement 5 secondes à installer.

Parties rapides ? Oui mon général. Après tout, c’est une course, et si vous temporisez avec des actions moins intéressantes, votre adversaire aura vite fait de prendre le large. Comme la réflexion n’atteint pas non plus des hauteurs vertigineuses, les coups s’enchainent rapidement, avec de temps en temps une pause pour peser le pour et le contre entre ralentir l’autre et continuer son petit bonhomme de chemin : est-ce que je prends cette aubergine qui irait très bien dans mon pattern, ou est-ce que je prends ce brocoli qui m’indiffère (ainsi est la dure vie du brocoli), mais que mon adversaire attend depuis 5 tours. On arrive ainsi rapidement aux 40 points et souvent la partie se joue à la photo finish. Allez, on fait la revanche ?

Savez-vous planter les carottes, pommes de terre, tomates, etc.

Et bah, ça dépend. Le jeu n’est pas simpliste et prend quand même une demi-heure, tout en exigeant une certaine attention de la part des joueurs, difficile d’enchainer les parties. La rejouabilité n’est d’ailleurs pas non plus folle, la façon de marquer des points ne change jamais, il s’agira plus d’être celui qui s’adaptera le mieux aux tuiles et à son adversaire. C’est d’ailleurs pareil avec la plupart des jeux à 2 que j’apprécie : je ne me vois pas multiplier les parties de Duel en Terre du Milieu ou Les Architectes d’Amytis, pour citer ceux qui ont rejoint notre ludothèque récemment. Pour autant, le jeu ressortira régulièrement, que ce soit avec ma femme ou ma fille.

Il faut dire qu’il fonctionne très bien, aucun doute là-dessus. Il est d’ailleurs plus tactique qu’il n’y parait, grâce justement à ces contraintes évoquées précédemment : il faut bien sûr tenter de former les patterns différents pour chaque légume, mais aussi choisir entre conserver la tuile dans sa colonne pour qu’elle score potentiellement deux fois, ou la bouger dans une autre colonne et la rendre moins intéressante, ou encore viser les 4 cases bonus de notre jardin. Même le scoring ne se fait pas à la légère, puisque gagner un point sur notre scoring nous fait arriver sur la même case que notre adversaire, et parce que certaines cases de la piste accordent un bonus au choix si on s’arrête dessus.

Il n’en restera qu’un que 5768

Est-ce que Garden Rush marquera l’année 2025 ? Aucune idée, Madame Irma c’est la porte à côté. La vérité c’est qu’il sort énormément de jeux chaque année, et j’imagine qu’on verra un paquet de jeux à 2 débouler dans les rayons dans les prochains mois. Ce qui n’est pas pour me déplaire, c’est un format qu’on aime bien à la maison, plus facile à sortir. Cerise sur le gâteau, il s’agit maintenant de jeux exclusivement jouables à 2, pensés et conçus pour ça, ce qui rend l’expérience bien plus intéressante et variée qu’avant. Le jeu des Space Cowboys, extrêmement facile à sortir, avec une proposition intéressante, en est une belle illustration, et devrait quand même trouver sa place dans un certain nombre de ludothèques.

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Prix constaté : 20 €

Test : Moon Colony Bloodbath

Test : Moon Colony Bloodbath

Quand le papa de Dominion, Donald Vaccarino, revient avec du deckbuilding, le minimum est de regarder quel est son projet. Si en plus il nous promet un bain de sang lunaire, on ne peut qu’être charmé par son projet !

Dans Moon Colony Bloodbath, vous voici à la tête d’une colonie lunaire où tout ne se passera pas comme prévu, pourtant ça partait bien. Le jeu utilise une mécanique récemment vue dans For a Crown, à savoir un deck commun d’évènements que chacun va tenter d’alimenter à son avantage pour survivre au mieux, ou du moins mieux que les autres.

Vous l’aurez compris, comme dans tout bon film d’horreur, tout commence parfaitement, chacun sa colonie composée de 30 membres, un peu d’argent de côté ainsi que quelques réserves de nourriture et des projets de bâtiments en main histoire de développer tout cela.

Le deck central se compose de 6 cartes fixes : 4 offrent une action à chaque joueur et 2 viennent ajouter un évènement. Vos actions sont des plus classiques pour récupérer nourriture, crédits ou cartes, construire un bâtiment ou récupérer des caisses, une ressource à faire comboter par la suite.

Vous allez donc tranquillement vous développer, vos nouveaux bâtiments vous offrant des bonus, des opportunités au gré de la partie. Les bâtiments vous apportent également de nouveaux colons, de la chair fraîche pour le désastre qui s’annonce.

Les évènements Nourrir sa population, se perdre dans les dossiers de l’administration lunaire et y laisser une carte de sa main ; jusqu’ici, tout va bien, mais rapidement, un premier robot fait son apparition, et à partir de ce moment, plus rien n’a été pareil. Les robots sont incontrôlables et commencent surtout rapidement à décimer la population.

Viendront par la suite s’ajouter des accidents, des fuites ou encore des bagarres pour continuer de réduire votre population, et ce jusqu’au moment où vos 30 premiers colons et les quelques-uns assez fous pour vous avoir rejoints en cours de route seront… morts.

À partir de là, le destin ne va pas s’arrêter pour si peu et va vous inviter à détruire vos bâtiments construits. Ceci vous permettra de récupérer les quelques colons qu’ils contiennent pour continuer de survivre dans cette boucherie lunaire. Vous détruirez donc vos cartes une par une, le joli tableau construit se réduisant petit à petit, les avantages disparaissant par la même occasion. une déconstruction de tableau douloureuse et qui peut être frustrante, ce jeu ne vous veut clairement pas du bien.

De plus le deck d’évènements est désormais bien plus épais qu’au début de la partie, entre les robots, les évènements fâcheux et d’autres cartes ajoutées au gré des constructions les 4 cartes d’actions se retrouvent noyées et quand une est piochée c’est une petite oasis pour les joueurs, vous ne perdez pas de population et en plus la possibilité d’agir contre la destinée !

Il est tout de même possible pour les joueurs d’ajouter des cartes personnelles au deck commun histoire d’avoir un petit bonus à chaque fois qu’elle sera piochée.

Blood Colony est méchant, mécanique et sans pitié. Il ne vous laissera pas respirer, continuera de vous poursuivre tant qu’il vous restera des colons à perdre pour le nourrir. On est sur un Terminator dont la cible est verrouillée, et pas de bol, c’est vous. Votre seule issue est de voir un autre joueur disparaître, ce qui mettra fin à la partie, et le joueur avec le plus de survivants sera déclaré vainqueur. Il est aussi possible de battre le jeu ! Enfin, si finir avec 3 personnes quand on a commencé à 30 peut être considéré comme un succès. Si vous parvenez au 13ᵉ évènement, félicitations. La partie s’arrête et le joueur avec le plus de survivants est vainqueur.

Alors que pensez-vous de cette Moon Colony ? Il est frustrant, il est méchant, mais il est aussi attachant ! On a envie d’arriver à cet évènement final, de réussir le défi proposé par le jeu, de jouer quasi en coopération avec les autres pour passer les obstacles et d’essayer d’accélérer l’arrivée de cette fin de partie. Mais le jeu reste compétitif et, bien entendu, la victoire revient au meilleur survivant, alors poussez le jeu au bout… Pas sûr que cela intéresse tout le monde.

Le jeu est également très bien servi par ses illustrations dans un style années 50 rétro-futuriste parfaitement adapté au jeu. Les joueurs sont des sortes de gourous illuminés suivis par des ouailles qui ne savent pas où elles mettent les pieds.

Si on continue sur le matériel, on va par contre passer du côté de la critique avec un matériel qui prend un petit tiers de la boite, mais pour un jeu vendu neuf une soixantaine d’euros, je ne pense pas qu’une boite de la taille de Seven Wonders Duel attirerait le client ; à l’ouverture, en tout cas, on se retrouve un peu déçu.

D’autant que le jeu est un filler, un jeu de 30/40 minutes ; plus long, il serait bien trop frustrant, mais là encore, le prix à la caisse fait mal au moral.

Moon Colony , c’est du jeu quasi d’ambiance, pour joueurs chevronnés avec une belle résistance à la frustration et qui se savent résilients. Ça n’est qu’un jeu, mais tout de même, il vaut mieux être prévenu de ce qu’il va se passer.

Il a donc ce gros défaut de son prix plutôt élevé, mais si vous passez le cap, c’est un bon jeu qui vous attend avec une excellente rejouabilité, une grosse envie d’y revenir souvent ; en tout cas, sur mes 10 parties, c’est le cas, je n’ai pas encore réussi à aller voir cet évènement final, et ça me challenge pas mal, cette affaire ! Alors, ok, je vais massacrer encore quelques dizaines de colons lunaires pour essayer d’y parvenir, mais le plaisir n’est-il pas là également ?

Test : Navoria

Test : Navoria

Alors oui ça ressemble à Root. Tellement qu’on croirait une copie Wish. Là on est plus sur un hommage, mais à 2 doigts d’un plagiat. Du coup c’est kawaï, c’est « zoli » et ça attire l’œil. Arguments solides pour capter le chaland et se démarquer des X nouveautés par semaine qui affluent dans sa boutique de jeux. Après on va voir un peu ce qu’il a dans le ventre au-delà de son plumage. Et comme souvent, je vous livre dès le début ma conclusion, plutôt que vous faire lire tout ce texte si vous n’en avez pas envie. Et bien comme tout projet Kickstarter, le but est de vous en mettre plein la vue même si tout n’est pas utile. Niveau jeu, ça ronronne très fort, y’a pas vraiment de montée en puissance, le jeu est très très gentil avec vous, et ne vous brusquera pas. Est-ce un jeu désagréable ? Non pas du tout, mais faut que vous sachiez que le niveau de jeu n’est pas bien élevé c’est tout.

Niveau d’attente versus réalité

Parlons du gameplay justement, j’ai vu quelques retours sur le jeu qui parlaient d’un niveau de profondeur trop léger pour eux. Alors je pense que l’aspect visuel qui rappellera Root à de nombreux joueurs, la campagne KS avec un jeu qui se retrouve à 100€ sur la version deluxe ont conduit des joueurs à se fourvoyer un minimum sur le type de jeu qu’ils achetaient. Clairement Navoria est un jeu très léger. On est sur du familial puisqu’il faut le mettre dans une case, limite initié, mais limite basse. Le seul fait d’avoir déjà joué à un jeu ayant des effets se déclenchant à l’achat de la carte, en fin de manche, ou en fin de partie est suffisant pour ne pas être largué. Tout ce qui tourne autour est un peu de l’enrobage je trouve, notamment un plateau surdimensionné (et pas très lisible) par rapport à son impact dans le jeu. Sur la table, le jeu peut faire peur à un novice, ou même faire penser à un jeu expert auquel nous sommes habitués, un grand plateau, une rivière de cartes sur le côté, un plateau personnel. Tant de codes graphiques et visuels associés à un type de jeu auquel Navoria n’appartient pas.

Votre espace décisionnel sera limité à choisir une couleur de carte parmi les jetons que vous piocherez ou qui seront dispo sur le plateau. Au début 1 choix parmi 2, d’autant que chaque couleur est présente 3 fois, voire même si vous êtes vernis, 1 choix unique si tous les jetons sont de la même couleur (oui oui ça arrive).

Les badges popularisés notamment par Terraforming Mars sont présents et simplifiés et vous permettent de valider une course à l’objectif commune avec les autres joueurs.

Il y a 3 pistes « d’exploration » sur lesquelles avancer votre marqueur, la possibilité de construire des camps pour ne pas redémarrer du début de la piste lors de la remise à zéro de début de manche, et une prime à celui qui avance le plus loin. Rassurez-vous, presque tous les autres joueurs auront aussi un bonus. Le jeu est très gentil je vous l’ai déjà précisé.

Le « twist » malin et notable je trouve (il faut bien relever quelque chose) survient après la phase de pioche de jetons dans le sac et une fois que chacun a récupéré 4 cartes à ajouter devant lui. Il vous faudra ensuite à tour de rôle placer les jetons qui ont été mis de côté durant la 1ère phase et qui sont conservé sur le plateau. Là encore surviennent des bonus en pagaille, et preuve que le jeu est gentil gentil, même les jetons rebuts et délaissés par les joueurs lors de la 1ère phase sont utilisés par la suite, personne n’est laissé de côté !

Syndrome KS

J’en parle régulièrement, et la hausse des droits de douane US et son impact sur le marché du jeu va peut-être avoir son incidence aussi. Le fait de proposer un jeu fabriqué en Chine à moindre coût permet de proposer du matériel original, qui a « de la gueule » sur la table de jeu et sur les photos et vidéos créées pour vous faire envie. Figurines, ressource en 3D, playmat, token 1er joueur. Souvent ça déborde de matos et ça marche puisque les projets KS qui fonctionnent ont souvent ce point commun d’avoir du matériel deluxe, et des exclusivités, même si souvent, seul le jeu de base est joué et encore.

Du coup la version Kickstarter du jeu atteint les 100€ pour un jeu qui ne les vaut pas (jeu + extension + playmat + fdp – 45€ la version boutique). Pas en termes de tarif uniquement, mais plutôt en termes de rapport matériel/tarif/gameplay. Cette gamme de tarifs est souvent réservée aux jeux de figurines ou jeux dits experts. Avec Navoria, rien que le plateau central me fait poser la question de son utilité. Très grand, il monopolise la table et l’attention, alors que tout le sel du jeu se situe avec les cartes et un sac de jetons à piocher.  Un plateau 4 fois moins grand avec 3 pistes d’exploration sur lesquelles avancer, un tableau sur lequel poser les jetons choisis et prendre le bonus recouvert et le tour est joué. Oui mais c’est moins beau, cher monsieur. Guère utile, mais moins beau.

Est-ce que j’y rejoue ?

Le jeu procure un sentiment de satisfaction à chaque instant, puisque chaque action vous apportera des ressources, des points ou une avancée sur une piste exploration. Le jeu n’est pas mauvais en soi, mais il me laisse sur ma faim, même si je sais pertinemment que c’est un jeu familial. Il prend trop de place sur la table, va faire peur à des néophytes et surtout ne me donnera pas envie d’y revenir pour une potentielle courbe d’apprentissage du jeu qui me permettrait d’avoir un défi à relever. Même pour présenter les mécaniques de jeux à des nouveaux joueurs, j’aurai toujours d’autres options que Navoria. Des jeux plus épurés qui feront le même « travail » , peut-être moins « zolis » mais plus efficaces. J’ai fait une partie avec l’extension qui rajoute un type de ressource, un type de cartes sur la rivière, une asymétrie avec un pouvoir de personnage et des nouveaux objectifs communs à scorer manche par manche. Cela revient  à ajouter pour rajouter, et ne m’a pas convaincu. Si je veux rajouter de l’asymétrie, enrichir le gameplay, ou « complexifier » je propose un autre jeu, Navoria ne peut pas se transformer en jeu initié.