Test : Magic Maze Tower

Test : Magic Maze Tower

A chaque fois que j’introduis Magic Maze, je rappelle cette anecdote, servie avec gourmandise par l’un des patrons du Meisia, un chouette bar à jeux vers République : « Il y avait un groupe qui jouait à Magic Maze, dans le plus grand des silences. Pas une parole, pas un grognement, juste le tac-tac-tac régulier du pion rouge pour indiquer à l’autre qu’il fallait qu’il fasse quelque chose. Y en a d’ailleurs un qui utilisait beaucoup le pion rouge, très fréquemment, et avec force. On sentait qu’il commençait à perdre patience. Et puis le sablier s’est écoulé. Je pense qu’ils avaient perdu. Alors, le mec en question s’est levé, il a pris sa veste, et il s’est barré. Sans un mot. » Je trouve que ça résume bien l’état d’énervement que peut provoquer ce jeu. Heureusement, on est ici pour parler du petit frère, Magic Maze Tower.

Les deux jeux, coopératifs, fonctionnent de manière très similaire : un labyrinthe, des personnages qui doivent en trouver la sortie, la possibilité de diriger n’importe lequel d’entre eux, mais dans une seule direction par joueur, et surtout l’impossibilité de communiquer ou presque. Le premier Magic Maze rendait le tout hyper frustrant avec la présence d’un sablier, qui obligeait à se grouiller et augmentait la haine vis-à-vis de ses camarades de manière inversement proportionnelle au nombre de grains de sable restant. Alors Sit Down, voyant l’état actuel du monde, s’est dit qu’on allait plutôt favoriser la paix entre les joueurs, et a supprimé le sablier. On aurait pu croire que le jeu en deviendrait automatiquement fade, il n’en est rien.

Chut, on triture des neurones

Tout l’intérêt repose en effet sur les labyrinthes présents dans la boite, et l’auteur s’en est donné à cœur joie. Initialement, Magic Maze offrait des puzzles modulaires avec des tuiles tirées au hasard qu’on posait pour constituer petit à petit le terrain, le mécanisme parfait pour se retrouver avec une sortie bien trop loin pour y arriver dans le temps imparti. Le gameplay au service du sadisme, c’est brillant. Mais si on enlève le sablier, ça devient beaucoup trop simple. Longuet, mais simple. Alors Magic Maze Tower propose des niveaux préétablis, l’occasion de placer avec soin les portes fermées à clé, les échelles et les pièges, et de proposer une courbe de progression calibrée.

J’en entends râler comme quoi c’est la rejouabilité du jeu qu’on bafoue, mais la boite, même si petite, propose quand même 76 puzzles (en plus des 6 du tutoriel), y a de quoi voir venir. Surtout que, twist incroyable, chaque puzzle fait partie d’un set de 4 ou de 8, et qu’une fois l’ensemble du set résolu, il est temps de les retourner sur leur verso et de les assembler pour accéder au puzzle « légendaire » qui conclut le set, avec une nouvelle mécanique qui décuple le potentiel de grattage de neurones : les niveaux légendaires composés de 4 tuiles pourront voir leurs sous-niveaux pivoter les uns par rapport aux autres, tandis que ceux à 8 sont ré-agençables via un système de taquin. De quoi passer une heure ou deux sur les plus compliqués avant d’en voir le bout. En silence, évidemment.

source : Sit Down

Petite sœur, grand casse-tête

Cela dit, il est toujours possible de communiquer, mais on supprime le pion rouge totalement inefficace, donc parfait pour ce grand sadique de Magic Maze, et on le remplace par une aide de jeu rappelant les différentes actions possibles et pouvoirs des personnages, histoire d’indiquer avec des gestes presque pas grossiers un peu plus précisément ce qu’on attend de nos camarades. Ça ne ruine pas la difficulté, on a presque les effluves de rage quit du prédécesseur qui viennent chatouiller les narines, mais ça reste vivable. Et puis, c’est l’occasion de vous parler du nouveau personnage, avec son nouveau pouvoir assez original. En effet, au nain qui peut passer dans les trous de souris, au barbare qui peut pousser ses coéquipiers au-delà des pièges, à l’elfe qui peut sauter par-dessus les autres personnages, et à la sorcière qui peut échanger de place avec un autre pion, Magic Maze Tower rajoute la petite sœur de la sorcière, qui a des pouvoirs magiques, mais qui ne sait pas très bien les utiliser.

Résultat, elle ne peut que se téléporter à côté d’un autre personnage, et uniquement de manière orthogonale par rapport à sa position initiale. Du coup, les habitudes prises avec les autres personnages ne fonctionnent plus, il faut calculer tout ou partie de son itinéraire dès le début, pour pouvoir placer ses « relais » au bon endroit. Et surtout, pas de retour en arrière possible s’il n’y a pas ou plus de personnage près de sa position de départ, on peut se retrouver à devoir recommencer des niveaux à cause d’un mauvais choix. Plus de sablier pour amener l’échec donc, mais ce personnage qui peut bloquer une partie, ou oblige en tout cas à y réfléchir deux fois avant de la bouger. On ne peut plus vraiment perdre, mais on peut ne pas gagner. Et comme Sit Down ne se refuse jamais une petite blague, ils ont inclus dans la boite de quoi ajouter la petite sœur au Magic Maze de base. Je n’imagine même pas l’arrachage de cheveux.

Au rebut, l’ancêtre !

Au final, ce Magic Maze Tower me plait beaucoup. Les niveaux sont tordus juste ce qu’il faut, la satisfaction de les réussir pareil, les nouvelles mécaniques ont comme un air d’évidence. Certains regretteront la disparition du sablier et de la frénésie de son prédécesseur. Personnellement, je n’appréciais pas vraiment la tension induite par le temps réel de Magic Maze, je n’aime pas quand mes puzzles viennent me hurler dans l’oreille et me secouer par le col. Je préfère les savourer en transpirant abondamment mais dans une ambiance apaisée, le tic-tac de l’horloge dans les oreilles et un hors d’âge à la main. Que voulez-vous, j’ai vieilli.

Test : That’s Not a Hat

Test : That’s Not a Hat

That’s not a hat (tnah) c’est le nouveau buzz dans le monde du jeu de société. Sorti de nulle part, le jeu se retrouve nommé pour l’As d’Or jeu de l’année, la catégorie reine du jds en France.

Mais qu’est-ce qui peut bien amener le jury à sélectionner un tel jeu ? Et comment a-t-il réussi à rester sous les radars jusqu’à sa nomination ? Regardons tout cela de plus près.

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Un auteur pas (in)connu pour un jeu pas très glamour

Kasper Lapp. Ce nom ne sonne pas comme un Cathala ou un Knizia et pourtant l’auteur nous a déjà amené les Magic Maze, jeu coopératif fou en silence et en temps réel ou encore Gods Love Dinosaurs, un jeu plus classique et moins réussi selon moi.

Avec tnah, il nous propose un petit jeu dans une petite boite. Des illustrations d’un autre âge qui n’attirent pas l’œil et provoquent plus de moqueries que d’envie.

Mais qu’est-ce qui fait de ce jeu un potentiel meilleur jeu de l’année ? Continuons de creuser.

Du côté des mécaniques et des règles, pas de nouveauté ou de révolution. Chaque joueur a une carte devant lui, un joueur en pioche une du paquet, la montre aux autres puis retourne les deux face cachée.

À partir de là, il doit en offrir une à son voisin de droite ou de gauche (Il suffit de suivre les flèches au dos des cartes.) avec la phrase « Acceptes-tu ce magnifique … ».

Son voisin peut alors accepter le cadeau ou le rejeter. S’il l’accepte, il va alors offrir sa première carte à l’un de ses voisins et ainsi de suite.

S’il refuse, on vérifie si le cadeau était bien celui annoncé, en cas d’erreur de l’offreur, celui-ci récupère la carte face visible et en repioche une pour offrir de nouveau un cadeau, en cas d’erreur du receveur, c’est lui qui récupère la carte et relance le jeu.

3 erreurs d’un joueur et la partie prend fin, le joueur ayant le moins de cartes face visible l’emporte.

C’est donc simple, il suffit de se souvenir de ses cartes et de celles qui circulent entre les joueurs. Mais c’est aussi là que se situe la magie du jeu.

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Quand la magie prend

Autour de la table, après l’explication des règles, un grand : « Bon, on va jouer parce que là… », les joueurs sont sceptiques, personne ne voit où se trouve le cœur du jeu et surtout ce qu’il a de fun.

Et au moment où la partie démarre, des sourires apparaissent. Ce jeu réussit le tour de force de créer de la magie, instantanément les joueurs comprennent ce qui va se passer, la galère dans laquelle ils viennent de se lancer et par galère ne vous inquiétez cette fois pas de mauvais jeu à l’horizon !

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Avez-vous l’œil de taupe ?

Tnah vous demande de retenir quelques cartes et de pouvoir les placer chez chaque joueur en permanence, le principe du bonto en quelque sorte ! Et ce n’est pas simple de rester ainsi concentré si vous jouez à ce que je pense que ce jeu est : un jeu d’ambiance. 

Je vous divulgâche un truc pour détruire tout le fun sur ce jeu ? Il vous suffit de ne pas rigoler, rester sérieux et concentré. Ce sera imparable, tout sera plat et insipide.

That’s not a hat vous demande de parler, d’échanger, de vous marrer. C’est un jeu d’ambiance bon sang ! Alors n’hésitez pas, le morceau de pizza est froid ou chaud ? Avec des pepperonis ? Ajoutez des détails plus loufoques les uns que les autres, soyez drôle, vous verrez, ça marche super bien.

Le jeu est un moteur à fun et c’est à vous de l’alimenter. Vous verrez avec très peu, il tourne très bien et, une fois lancée, l’ambiance autour de la table ne fera que monter.

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Jeu de l’année ?

That’s not a hat est un jeu instantané dans son fun et universel dans le plaisir qu’il apporte à table. Donnez-lui 1 gramme de fun et il vous en produit des kilos, le tout avec de simples cartes en noir et blanc, une performance assez rare pour être remarquée.

Mais la grande question en ce début février est : qu’est-ce qu’il fait dans la sélection du jeu de l’année de l’As d’Or ?

Sorti de nulle part, il se retrouve dans la catégorie reine alors que personne ne l’avait vu. 

Je ne connais pas encore le résultat qui tombera fin février, mais après avoir découvert, joué et rejoué ce jeu, s’il remporte le grand prix, je ne crierai pas au scandale. Depuis plus de 8 mois, je ne vois pas un jeu arriver à la cheville d’Akropolis, mais dans un registre bien plus fun et jeu d’ambiance, ce tnah peut se démarquer et tout repose sur les choix du jury.

La nomination de ce petit jeu d’ambiance aura eu le mérite de me donner envie de l’acheter et je ne regrette pas ce que j’ai découvert !

Test : Gods Love Dinosaurs

Test : Gods Love Dinosaurs

Créez votre écosystème pour y faire évoluer et pulluler les dinosaures ! On a tous vu les films, et pourtant l’idée de mettre des dinos partout… pourquoi pas !

Derrière cette belle promesse thématique, c’est la mécanique et surtout la simplicité du jeu qui vont poser problème.

Des dinosaures ! Un thème qui cartonne dans les jeux de société avec Dinosaur Island, Jurassic Snack ou encore Draftosaurus pour n’en citer que quelques-uns.

Avec Gods Love Dinosaurs, Catch Up Games nous propose un jeu de placement de tuiles pour développer notre écosystème avec proies, prédateurs et bien entendu le super prédateur : le T-Rex.

Kasper Lapp, à qui l’on doit le génial (je pèse mes mots) Magic Maze, nous propose cette fois un jeu pour 2 à 5 joueurs qui se joue en 30 à 60 minutes.

Un jeu bien joli avec les illustrations de Gica Tam, les tuiles sont simples, mais on comprend de suite qui va où et à quoi elles vont servir. Ajoutons les meeples pour les animaux qui sont du plus bel effet !

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Tout cela nous amène au gameplay. À votre tour, vous choisissez une tuile sur le plateau central pour agrandir votre petit territoire jusqu’à ce que la pioche de tuiles soit vide, ce qui déclenche la fin de la partie.

Et si la colonne du marché où vous l’avez prise est vide, cela déclenche l’animal associé. A votre disposition, 3 proies (lapins, grenouilles, rats) et 2 prédateurs (tigres et aigles), et votre but est de multiplier les proies pour maintenir les prédateurs l’estomac plein ! S’ils mangent trop, ils en viennent même à se multiplier.

Pour dominer tout ce joli monde des dinosaures, ou plutôt l’un des plus emblématiques : le tyrannosaure-rex. Cette dernière, car ce sont toutes des demoiselles, dispose d’un nid et elle a faim. Quand vous l’activez, elle va se déplacer, se nourrir et si le menu est suffisant, à savoir un prédateur, alors elle pond.

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Le jeu est donc simple : vous créez un petit monde que vous peuplez de différentes espèces en vue de multiplier vos dinosaures. Peut-être même trop simple ?

C’est pour moi le point rédhibitoire du jeu : le score final de chaque joueur se compose de ses dinosaures et des œufs dont il dispose… et rien d’autre !

En fin de partie, il suffit de regarder chez chaque joueur pour la déclencher ou non. C’est très décevant et frustrant, « Bon ben je termine, j’ai un point de plus que vous et vous ne pourrez rien y faire. ».

Le genre de sentiment qui dessert le jeu et c’est d’autant plus dommage que ça arrive à la toute fin, ce qui laisse un goût amer.

Et on en vient à chercher immédiatement les défauts du jeu. Le sentiment de tout ça pour ça est dominant. Je développe toute une population d’animaux qui, en fin de partie, ne m’apportent rien, pas de score caché comme un petit objectif personnel qui mettrait un peu de doute sur le déclenchement de la fin de partie.

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Au final, j’en arrive à la conclusion que le jeu est calibré pour les plus jeunes qui seront sous le charme du thème et des jolis meeples et avec son placement de tuiles simple le jeu sera facilement pris en main par les plus jeunes.

Gods Love Dinosaurs, c’est une déception. Le jeu dispose d’une belle promesse à l’ouverture de la boite et à la lecture des règles, un gameplay facilement maîtrisé et un matériel qui en met plein les yeux.

Mais c’est sans compter avec cette fin de partie qui gâche tout, on pourra ajouter que le jeu peut traîner un peu en longueur avec pas mal de tuiles à placer.

C’est bien dommage, on avait envie de l’aimer ce Gods Love Dinosaurs.

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Disponible ici :

Prix constaté : 36,90 €