Test : A la recherche des espèces disparues

Test : A la recherche des espèces disparues

Ce jeu est le 2ème d’une série qui a commencé avec « A la recherche de la planète X » auquel je n’ai, bien entendu, pas joué ^^ Il s’agit des 2 mêmes auteurs, qui ont souhaité reprendre leur concept.

Il s’agit donc comme son prédécesseur d’un jeu de déduction et de logique, avec une application très présente. Cette fois-ci le thème est la nature, et la recherche d’espèces animales disparues en se basant sur le travail de l’organisation Re :wild qui compile une liste de ces espèces.

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L’appli dans le jds : un mal nécessaire ou un outil pas si utile ?

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Clairement je suis loin de sauter au plafond quand je vois qu’une appli est nécessaire ou indispensable au déroulement d’un jds. Quand je joue à un jeu, je veux aussi couper des écrans sur lesquels je travaille toute la journée au niveau pro, et que j’utilise déjà beaucoup dans mon temps perso. Donc je suis toujours réfractaire à utiliser une appli, surtout dans les jeux pour enfants (poke Gloutons Mignons).

Je vois bien l’apport que les applis ont dans des jeux narratifs du genre Destinies ou le Voyage en terre du milieu. Si l’objectif est de simplifier la génération des rencontres, des emplacements des monstres, de la gestion de l’aventure et réduire les manipulations ou retours à la règle pour savoir si dans tel cas, X ou Y monstres « pop » sur tel ou tel emplacement, dans ce cas-là, pourquoi pas. Du moment que l’appli reste « discrète » et ne nécessite pas d’avoir l’œil dessus à tout moment de la partie.

Dans ce jeu qui nous intéresse aujourd’hui, l’appli donne réponse aux actions que nous effectuons. Elle donne des indices à reporter sur son carnet d’observations. Je vais donc utiliser mon pion explorateur pour faire telle ou telle action, sur telle case. Je vais rechercher une espèce. Je déplace mon pion sur l’île, et je déplace aussi mon pion autour du plateau pour comptabiliser les « temps » que me coute telle ou telle action. Enfin, sur mon appli, j’indique que je fais telle action, sur telle case, en cherchant telle espèce, et la réponse à ma recherche apparait. 3 clics et c’est réglé.

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Déduction et règles logiques

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Les jeux d’enquêtes ne sont pas ma tasse de thé. J’ai souvent du mal à rentrer dedans. Ou alors la mécanique qui vous fait passer d’une carte du jeu à une autre en sélectionnant un numéro sur l’action ou le lieu de la carte que vous souhaitez faire/visiter ne me satisfait pas, comme dans la série Unlock. J’avais bien apprécié Detective qui me semblait mettre au placard les jeux d’enquêtes classiques, en nous propulsant dans l’enquête 2.0 avec l’utilisation d’un site web et une base de données créée pour l’occasion. Avec son matériel, la recherche sur le net et sur la base de données dédiée faisait que ce jeu était ce qui se rapprochait le plus de l’idée que je me faisais d’un travail d’enquête comme on peut le voir dans une série TV. Donc une vraie immersion grâce au matériel et aux supports mis en place à l’occasion.

Mais je classerai plutôt ce jeu « A la recherche de » dans un style se rapprochant des jeux de logiques, et on peut parler récemment d’Archeologic et Turing Machine dans l’idée. Pour trouver l’espèce disparue, vous devrez résoudre un « puzzle » en fonction de contraintes de placements des différentes espèces.

Par exemple un crapaud se situera sur l’île à côté de 2 cases vides. Un couscous sera à 1 ou 2 cases d’1 autre couscous sur la carte. En vous déplaçant, vous aurez des infos sur les cases que vous explorez, et pourrez recouper ces infos avec les règles logiques de placement des espèces. Jusqu’à obtenir une cartographie suffisante de l’île pour y trouver l’espèce disparue.

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AP paradise island

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Attention, avec ce jeu qui mettra vos méninges à contribution, ça peut AP sévère ! Comprenez que vous aurez besoin par moments de réfléchir plus ou moins longuement pour assembler les bouts de puzzle récupérés lors de votre aventure.  Parfois vous aurez un indice qui va faire tilt et illuminer votre recherche, par contre, parfois vous aurez aussi besoin de tout reprendre, changer de perspective, vérifier à nouveau vos déductions précédentes (je conseille fortement l’utilisation de crayon papier et gomme pour ce jeu ^^). Et du coup, la partie peut sacrément ralentir et durer, si plusieurs joueurs rencontrent cette phase de réflexion en même temps. Cela est situationnel et dépend aussi des joueurs, tout ça surtout pour vous prévenir que ça n’est pas un jeu familial de puzzle game simpliste. Je le déconseille même à un public familial. Il faut aimer passer 1h30 à faire chauffer les neurones.

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Les points de victoire, est-ce bien nécessaire ?

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Le système de comptage de points n’est pas le plus limpide, et surtout pas le plus utile selon moi. Le but de ce jeu est de trouver l’espèce disparue après 60 – 90 minutes de recherches, de déplacements sur une île, et de mise en relations de logiques de pose. Est-ce bien important de savoir qui arrive 3ème ou 4ème à ce jeu ? Si tu n’as pas trouvé l’espèce disparue tu as perdu point barre. Si vous êtes plusieurs à la trouver au même tour, bravo à vous. Si vous souhaitez comparer votre niveau et établir votre classement sur une partie à 4 joueurs, jouez à autre chose, un vrai jeu compétitif par exemple.

Du coup, cela me gêne aussi d’avoir parmi les cartes du village des effets d’obtention de PV en fin de partie. Ces cartes n’ont aucun intérêt par rapport aux cartes réduisant les coûts des actions en termes de temps (qui sont vraiment pétées amha). Mon but est d’être le premier à découvrir l’espèce disparue, j’ai besoin d’une carte me permettant d’avancer moins vite sur la piste du temps pour rejouer plus souvent que mes adversaires, pas gagner des PV à la fin puisque j’espère être le 1er à la trouver. Bref, ça n’est que mon avis, mais, dans ce jeu, il ne devrait y avoir qu’un ou plusieurs vainqueurs s’ils trouvent en même temps, le reste est illusoire et n’apporte pas grand-chose.

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Trad, formulation et nœud au cerveau

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Le reproche que je peux faire au jeu est un wording pas toujours très clair. Comprenez qu’il vous faudra parfois relire l’indice ou le résultat de la recherche obtenu plusieurs fois afin de l’interpréter correctement (ce que je vous souhaite). L’adjacence, la distance, la contrainte de pose, les points cardinaux, les zones apparemment vides, etc. Tous ces termes liés entre eux ne sont pas toujours très clairs, surtout quand un indice cumule 2 contraintes. La feuille de note est alors bien utile pour y revenir et défaire le nœud au cerveau qui s’y est formé.

J’ai aussi repéré quelques petites erreurs de trad sur l’appli qui implique un retour à la règle pour comprendre l’indice donné, mais dans l’ensemble, l’appli est quand même très qualitative et intuitive. Quand on voit les soucis qu’a connus l’appli du Secret de mon Père (aussi édité par Renegade et Origames), on peut s’estimer heureux pour le moment.

Les possibilités d’erreurs dans ses déductions à cause de cette formulation pas toujours claire peuvent impacter votre partie, surtout lors de la première partie de ce jeu. Après vous y êtes plus familier.

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Un jeu de déduction sur un plateau

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Pour changer des jeux d’enquêtes type Unlock, A la recherche des espèces disparues insiste sur votre compétence déductive, pour un jeu qui peut sembler tout de même un peu mécanique. Perso ça me plait bien, mais ne vous attendez pas à être embarqué dans une aventure narrative, l’essentiel se fait chacun dans son coin, en assemblant les bouts de puzzle, et vous demandant de résoudre l’énigme plus vite que les autres. L’habillage avec le plateau, les déplacements, le matériel chatoyant apporte un vernis agréable au jeu, mais le fond reste une déduction à effectuer avec de plus en plus d’indices qui vous sont révélés au fur et à mesure de la partie.

L’interaction est à surveiller dans un esprit compétitif, les actions des autres peuvent vous donner des indices importants, surtout à la fin, lorsqu’un joueur tourne autour d’une zone pour affiner sa déduction (espèce disparue et 2 zones adjacentes). Mais ça reste un peu secondaire je pense.

Enfin, le paramétrage de la partie avec l’application au moment de la mise en place est très malin, puisqu’il permet aussi d’équilibrer la partie en fonction du nombre d’indices qui vous sera délivré avant d’attaquer votre exploration. Et comme cela est paramétrable en fonction des joueurs, un joueur expérimenté pourra commencer avec 3 indices, un joueur moins à l’aise, plus jeune ou plus ou moins ce que vous voulez, pourra commencer la même partie avec 6, 9 ou 12 indices. De quoi lisser les niveaux, ou se créer un petit avantage, ou encore chercher la difficulté. C’est assez rare je trouve dans les jeux, et bien sûr son implémentation est facilitée avec la présence d’une appli qui peut permettre de paramétrer chaque profil de joueur.

Bref j’ai trouvé la proposition bien amenée, et agréable à jouer. On a ce sentiment positif lorsqu’on arrive à résoudre le puzzle, mais aussi d’incompréhension ou de frustration lorsqu’un autre joueur termine alors qu’on a aucune idée de l’emplacement de l’espèce disparue, et encore moins de ce qui l’entoure ^^ La partie peut tout de même sembler un peu longue en fonction des joueurs autour de votre table.

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Test : Bottle Imp

Test : Bottle Imp

Le diable embouteillé, la nouvelle de Robert L. Stevenson nous raconte les mésaventures d’un homme qui achète une bouteille dans laquelle un diable peut exaucer un souhait, mais entraine également la damnation de l’âme de son propriétaire. Pour se séparer de ce funeste destin, il suffira de revendre ladite bouteille moins chère que le prix auquel on l’a acquise. 

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Un jeu de pli diablement efficace. Des cartes de 1 à 37 divisées en 3 couleurs et une bouteille qui démarre avec un prix de 19.

Le jeu est un jeu de pli, en must follow (fournir la couleur demandée) et tout se joue par rapport au plafond de verre actuel.

Ce plafond de verre est le prix de la bouteille. Si tout le monde joue une carte supérieure à son prix, alors la carte de plus haute valeur l’emporte.

Si une ou plusieurs cartes sont sous ce plafond, alors c’est la plus élevée de ces cartes qui l’emporte.

Une mécanique toute simple mais efficace ! Gagner des plis, c’est s’assurer des points de victoire, mais attention ! Le dernier propriétaire de la bouteille aura vendu son âme au diable et sera le seul à perdre des points. 

Ici, tout est timing et prise de risque. L’équation est simple, après tout, vous voulez gagner des plis, mais vous ne voulez pas être le joueur avec la bouteille en fin de partie.

Mais le jeu est bien plus profond qu’il n’y parait, prenons le 1 par exemple. Cela semble être la pire carte du jeu, et pourtant, il vous suffira de la glisser dans un pli avec une autre carte de valeur inférieure à la bouteille pour vous en débarrasser tranquillement.

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Bottle Imp est plein de ce genre de petites subtilités, de timing dépendant des autres joueurs. C’est ce qui fait son charme. Il faut surveiller vos cartes, mais aussi celles de valeurs inférieures qui pourraient se glisser dans les plis sans récupérer la bouteille. Les choix sont très intéressants et quand les joueurs commencent à ne plus fournir la couleur demandée, le jeu devient encore plus tendu.

En début de manche, vous allez passer une carte à chacun de vos voisins et en placer une face cachée dans le pli du diable. Cette phase est également très intéressante, la mécanique de don de carte entre joueurs est l’une de mes préférées dans les jeux de plis. Quoi donner à qui, est-ce que je privilégie ma main en créant une coupe ou plutôt vise certaines cartes qui viendront embêter la main des autres.

Il vous faudra quelques parties pour appréhender au mieux le jeu, en découvrir les micros combos et tous les choix possibles. 

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Bottle Imp est indiqué pour 2 à 4 joueurs, convenons déjà que le jeu à 2 étant une variante, on peut sans problème l’écarter. À 4 joueurs, j’ai le sentiment que l’on manque un peu de maîtrise sur ce qu’il se passe et que les choses peuvent s’enchaîner un peu trop rapidement.

C’est clairement à 3 joueurs que Bottle Imp se comporte le mieux. Personnellement, je le vois comme un excellent jeu de plis à 3 joueurs. On est complètement dans une impasse mexicaine avec ses gros plans à la Sergio Leone. Le tout en 20 minutes avec rigolade, chougne et chambrage, que demander de plus ?

Bottle Imp est un petit jeu de plis trop longtemps oublié, il mérite d’être remis en lumière pour tout ce qu’il propose et pour un jeu de 1995, quelle modernité de gameplay !

Contrairement à plusieurs jeux introuvables, il reste dénichable assez facilement. 

Un bon jeu, accessible physiquement tout comme au niveau de son gameplay, avec des émotions plein la boite et même une nouvelle d’un grand auteur à découvrir. Si le thème vous intéresse, n’hésitez plus !

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La future réédition annoncée par Matagot :

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Cette nouvelle édition rendra le jeu accessible à un 5ème et 6ème joeur, et ajoutera un nouveau mode par équipe pour 4 à 6 joueurs. Réalisée sous la direction artistique de Maxime Erceau (Tatsu, Orion Duel ), cette nouvelle édition est illustrée par Maxime Morin (Faraway, Next Station Tokyo, Next Station London, Codex Naturalis…).

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Test : Schadenfreude

Test : Schadenfreude

Les jeux de plis japonais sont déroutants. Pour passer inaperçu, ils peuvent en arriver à prendre un nom germanique comme Schadenfreude. En même temps, une fois qu’on a retenu le nom, impossible de l’oublier et quand on en connait le sens, « la joie malsaine », on veut juste en savoir plus.

Commençons par un rapide tour du propriétaire avec un auteur sous pseudo : Ctr, un artiste non crédité (ce n’est pas plus mal) et un éditeur inconnu, Studio Turbine.

Ce que l’on sait, c’est que le jeu se compose de 48 cartes allant de -3 à 9 dans 4 couleurs (pas de 0) et de 2 cartes Joker, un 0 et un 10.

Trois fois rien, mais au final, on obtient un sacré jeu qui fonctionne sur un twist plutôt incongru : soyez second.

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À chaque pli, la première règle est le must follow : on suit la couleur demandée. Et le vainqueur est tout simplement la deuxième plus haute carte (de la couleur demandée).

Les plis sont donc plutôt incertains pour les premiers à jouer et surtout, comment bien jouer quand il faut être second ?

Le jeu nous prend clairement à contrepied. Quelle carte jouer et vers où aller n’est pas si simple et c’est cela que j’adore.

Le vainqueur du pli récupère toutes les cartes jouées et les place face visible devant lui. Il est interdit d’avoir 2 fois la même valeur, vous allez donc défausser toutes les cartes que vous aurez en double.

Mais ne vous inquiétez pas, vos adversaires feront bien attention à ne pas vous donner de doublons en vue du scoring final.

En effet, à la fin de chaque manche, vous allez gagner autant de points que les valeurs de toutes les cartes encore devant vous. On cherche donc à en garder le maximum… Ou pas !

Si un joueur (ou plusieurs) dépasse les 40 points, il est tout simplement éliminé. Le vainqueur est donc le joueur sous les 40 points quand un autre est éliminé, deuxième quoi !

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Donc, si on résume, on cherche à mettre des points, mais pas trop, on cherche à en donner aux autres, mais pas de doublons. Pas facile tout ça !

Une chose est sure : ne pas mettre de points vous privera de victoire… Attendez ! En effet, si la fin de partie est déclenchée, on a donc un joueur au moins déjà dehors, mais attention ! Si derrière on a des joueurs à égalité, ils sont eux aussi éliminés. Pas si simple ? Et pourtant… C’est logique. On cherche tous à faire 39 avec un joueur juste au-dessus, ce but visé par tous va provoquer des scores très proches et les égalités arrivent assez souvent !

Il est donc tout à fait viable de rester caché dans l’ombre d’une petite dizaine de points et de regarder les autres s’entre déchirer en donnant par ci par là quelques points pour provoquer la chute de vos adversaires.

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Schadenfreude est d’une intelligence folle, tout est ciselé, tout est malin. Vous allez accélérer ou ralentir en permanence, le jeu va vous rendre fou.

Pour continuer dans les points très positifs, il se joue vite en 2 ou 3 manches avec la possibilité de conclure l’affaire en une petite manche. Il fonctionne très bien dans toutes les configurations proposées, 3, 4 et 5 joueurs. Ça fait toujours plaisir quand l’information sur la boite est cohérente.

Allez, il y a quand même un gros point noir : les visuels. Vert foncé, bleu, violet et rouge. Sérieusement, qui peut valider un tel choix ? Il est juste compliqué de ne pas se tromper sur la couleur demandée ou sur la carte que l’on joue. Un jeu à ne sortir que l’été en plein après-midi ? On n’ira pas jusque-là, mais clairement, ce n’est pas très clair tout ça.

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Personnellement, j’adore Schadenfreude. Le jeu est malin, il repose entièrement sur les joueurs avec tellement de choix à faire, de directions à prendre. Le jeu est tendu, on se regarde dans le blanc des yeux à chaque pli et pourtant, c’est une super ambiance autour de la table. Un tour de main incroyable réussi par le jeu, c’est du tout bon !

Alors oui, le jeu est introuvable, mais bon c’est aussi ça qui me plait dans ces jeux de plis si particuliers : la chasse !

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Test : Explorers of the Woodlands

Test : Explorers of the Woodlands

Cette critique a été rédigée à l’aide d’une boite fournie par l’éditeur que nous remercions.

Xylia, le lézard courageux, passe la corde de son arc en travers de la poitrine, et vérifie une dernière fois son carquois. Bethras, la grenouille malicieuse, bondit d’excitation et raconte à qui veut l’entendre à quel point elle est impatiente d’entamer l’aventure qui attend notre fière bande de héros. Sha’vi, le sage renard, se tient silencieux à l’écart du groupe et médite, entouré d’une aura bleutée et envoutante. Klethor, le puissant scarabée (Hein ?), vérifie une dernière fois la missive royale qui leur demande urgemment de se débarrasser du démon qui sévit dans la Forêt d’Emeraude. L’heure est grave, mais nos amis savent qu’ils vaincront car le Bien triomphe toujours. Alors, le sourire aux lèvres, et l’espoir en bandoulière, ils s’enfoncent entre les arbres, laissant derrière eux la clairière ensoleillée où ils avaient établi leur camp. Bientôt, plus rien ne trouble la quiétude environnante, si ce n’est le pépiement des oiseaux et le vent qui caresse gentiment l’herbe haute. Ah si, on entend assez vite les hurlements horrifiés de nos pauvres petites bêtes, ponctués des craquements d’os qu’on brise et du chuintement humide d’un ventre qui s’ouvre en deux. Happy Tree Friends peut aller se rhabiller, Explorers of the Woodlands repousse le massacre champêtre un cran plus loin.

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Il était une fois quatre héros vaillants…

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Ne vous laissez pas abuser par la direction artistique toute choupinou et le 10 ans et plus de la boite. On aurait pu croire à un successeur de Karak pour enfants un peu plus aguerris, et la possibilité de se balader dans la forêt plutôt que dans des catacombes sinistres ainsi que la dimension coopérative avaient un certain attrait. Le problème, c’est qu’Explorers of the Woodlands n’autorise aucune fantaisie ni marge de manœuvre, et à moins de garder tout le monde bien collé-serré, vous allez vite souffrir et retourner la table de frustration (Astuce des pros : jouez sur une table en contreplaqué, l’effort sera moindre qu’avec du chêne massif.). Pas question de partir chacun dans son coin, ou de tenter d’avoir son moment de gloire, bienvenue dans l’exploration de donjon à la soviétique. Tout pour le collectif ! Mais je vous sens dubitatif, alors je vous invite à me suivre entre les ronces acérées et les tanières inquiétantes. Ne vous inquiétez pas, dans les bois, personne ne vous entendra crier.

Chacun se voit donc attribué l’un des quatre personnages disponibles, qui pourra légèrement évoluer pendant le scénario, et s’équiper avec un peu de chance. Les différentes bestioles ont clairement des profils différents, ce qui les rends plus aptes à certaines tâches qu’à d’autres. Il y aura le soigneur, le tank lourdeau, vous connaissez la chanson. Les tours de jeu s’enchainent rapidement : avant la phase d’action à proprement parler, chacun pose d’abord une nouvelle tuile pour agrandir le terrain, un moment plutôt tranquil… MAIS SURTOUT PAS MALHEUREUX, POURQUOI TU L’AS MIS LA, T’ES FOU, TU VEUX MA MORT ? Ouais, la pose doit obéir à certaines règles primordiales, tant le chrono est serré : en effet, dès que les joueurs ne peuvent plus poser de tuile, le boss est révélé et il ne reste souvent plus que deux manches pour lui régler son compte, sa jauge de menace se remplissant très rapidement. Si les joueurs sont à l’autre bout de la carte à ce moment-là et, pire, s’ils sont éparpillés, vous pouvez déjà dire adieu à la victoire, à moins d’une chance incroyable aux dés.

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Qui trébuchèrent sur une ronce, la faute à pas de chance

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Oui, tout repose sur les dés, beaucoup plus que dans la plupart des dungeon crawlers. Certes, que ce soit dans Descent ou Death May Die, on lance des brouettes de dés, et j’adore ça. Mais les actions qui nous amènent à ces lancers (se déplacer, se soigner, se préparer au combat) ne sont pas tributaires d’un jet de dé. Ici, c’est le cas, et ça peut être carrément frustrant. Lorsque vient le tour d’un joueur durant la seconde phase d’une manche, il lance 4 dés et doit ensuite les attribuer à des actions de son plateau personnel, en fonction des chiffres qu’il a obtenus. Un dé figurant 1, 2 ou 3 permettra de se déplacer, un 4 ou plus permettra d’augmenter sa jauge de mana, vous avez compris l’idée. On ne peut relancer qu’une seule fois les dés, et je vous laisse imaginer donc le potentiel de crispation si par exemple vous n’obtenez que des chiffres supérieurs à 3. Bloqué sur place, il y a de grandes chances que votre tour ne serve à rien, surtout que la plupart des emplacements n’acceptent qu’un dé maximum par tour.

Et pourtant, il y a du pain sur la planche pour espérer se présenter devant le boss avec une chance raisonnable de victoire. Cela passe nécessairement par l’acquisition d’équipement, que ce soit à la taverne ou sur des tuiles aléatoires après avoir occis les monstres du coin, et par le déblocage des 2 pouvoirs passifs de son personnage. Ces capacités s’acquièrent en dépensant des orbes, qui se récupèrent via l’extermination des susmentionnés monstres, l’utilisation d’au plus un dé d’action par manche, ou encore l’exploration hasardeuse, qui consiste à se déplacer sur une tuile non encore révél… MAIS T’ES DINGUE ! TU VEUX QU’ON SE FASSE OUVRIR EN DEUX AU COUTEAU A BEURRE ? T’EN AS MARRE DE LA VIE ? Grossière erreur mes petits castors, la marge de manœuvre est tellement faible que poser une tuile au hasard peut déclencher bien des catastrophes. On se concentre donc sur le génocide de monstres pour faire progresser nos personnages, lors de combats drôlement punitifs pour un jeu qui renvoie une image plutôt enfantine. En effet, si on ne parvient pas à faire en un seul jet de dés autant de dégâts que le nombre de point de vie du monstre, l’attaque est annulée et on prend dans la tronche des dégâts en retour et une pénalité de surcroit, comme perdre un orbe par exemple.

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Et finirent la tête la première sur le katana acéré d’un monstre Champignon

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Ouais, ça picote, et j’ai des potes à la déveine chevillée au corps qui ont passé de très mauvais moments dans cet enfer sylvestre. Il faut dire que le jeu est bien décidé à nous faire comprendre que se séparer est une très mauvaise idée, et il y va au marteau-piqueur. En effet, si une attaque classique se fait en jetant un seul dé de combat, dès que d’autres héros nous accompagnent, on jette au moins autant de dés qu’il y a de héros sur la tuile, ce qui augmente significativement les chances de toucher et d’éviter des représailles sanglantes. J’avoue que le concept me parle, j’aime l’idée qu’un groupe est plus fort que des individualités. Malheureusement, cette épiphanie miniature se prend aussitôt un grand coup de hache par l’ordre du jeu, parce qu’il est fixe, et parce que le premier joueur est toujours le même manche après manche. C’est se tirer une balle dans le pied parce que deux héros (Sha’vi, Kletor) sont clairement faits pour jouer les têtes de pont, et qu’il aurait été beaucoup plus intéressant stratégiquement qu’ils soient les premiers à jouer lors de certaines manches.

Alors il faut collaborer étroit… CHUUUUT…. TAIS-TOI, LAISSE-MOI FAIRE, METS-TOI DANS UN COIN ET REGARDE JOUER LES PROS. Ah tiens, voilà le joueur alpha qui arrive avec ses gros sabots et son clairon. Forcément, tout dans ce jeu pousse à gérer le groupe de héros comme une seule entité et à éliminer les décisions individuelles. Où poser les tuiles piochées, qui utiliser comme chair à canon, qui envoyer à la taverne pour récupérer une armure ou un bâton de magie, le jeu est tellement tendu et punitif qu’il faut rationaliser au possible et les loups solitaires ont vite fait de plomber les chances de succès. Je recommande du coup de jouer à ce jeu uniquement en solo, ou à la rigueur à deux, mais en gérant les quatre héros. Oubliez ce que dit le livret de règle, ce n’est pas bien compliqué de jouer deux personnages de plus, on évite d’attendre trop longtemps son tour et le syndrome du joueur qui décide pour tout le monde disparait. Cela rend le jeu jouable, mais n’espérez pas qu’Explorers of the Woodlands devienne soudainement un petit bijou. Il reste très punitif, et on a tendance à toujours suivre la même feuille de route, notamment lors du placement des tuiles. Pas question de faire dans la fantaisie, on trace sa route en ligne droite, en mettant de temps à autre sur le côté les tuiles qui n’apportent rien, et en visitant les tuiles qui rapportent du loot et des orbes.

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Ils vécurent très malheureux et pleurèrent tous leurs membres en moins

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Je ressors ensanglanté de ma promenade sous les frondaisons, et couvert des viscères de mes amis, mais surtout je ressors frustré et déçu. Les illustrations d’Explorers of the Woodlands sont de qualité, j’adore le petit format de la boite, les mécaniques sont vites assimilées, le jeu avait tout pour me plaire. Je salivais déjà à l’idée d’y jouer avec mes enfants. J’ai malheureusement découvert un brouillon de dungeon crawler, hyper directif, avec des choix de game design incompréhensibles et un équilibrage inexistant. J’aurai pu le garder pour les fois où j’ai envie de jouer en solo, et puis les meeples sont vraiment très mignons, mais le jeu ne se renouvelle pas vraiment d’une session à l’autre, avec seulement quatre héros disponibles et aucune place laissée à l’improvisation. Bref, passez votre chemin, vous ne raterez pas grand-chose et votre cardiologue vous en saura gré.

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Disponible ici :

Prix constaté : 31,50 €

Test : Nokosu Dice

Test : Nokosu Dice

Si tu aimes les jeux de plis, alors il faut que tu joues à Nokosu Dice. Ces derniers temps, cette phrase revient souvent. Ce Nokosu est vu comme le Lacerda des jeux de plis, le jeu ultime de la catégorie.

Bien pour faire simple, je ne suis pas d’accord. ND est un excellent jeu, mais il en existe désormais tant avec de plus en plus de sorties que je ne le vois pas écraser la concurrence.

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Le jeu de Yusuke Matsumoto est son seul titre référencé, sur ce point-là, c’est un coup de maître. Il est pour l’instant uniquement disponible au Japon chez Engames, mais tout le monde lui souhaite de trouver des localisations à l’avenir.

Nokosu Dice, c’est la promesse de perdre son cerveau et ses amis dans l’ordre que vous préférez.

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5 couleurs avec pour chacune des cartes de 0 à 7 et 5 dés.

La partie commence par un draft où chaque joueur (avec 10 cartes en main) va arriver à 5 dés devant lui. Le dernier dé (le nokosu) devient alors le super atout.

Dans le jeu, l’atout est tout d’abord numérique puis coloré. Si vous avez la combinaison des deux, félicitations, vous avez un super atout.

Ensuite, on joue des plis de manière plutôt classique, en must follow (suivre la couleur demandée par le premier joueur). Si vous n’avez pas la couleur demandée, vous jouez ce qui vous plait et vous pouvez ainsi couper.

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Attention tout de même ! Si un joueur fournit le chiffre de l’atout et que vous coupez avec une carte de la couleur de l’atout, il reste vainqueur du pli ! Une subtilité d’atout en croix (chiffre + couleur) qui vous fera quelques nœuds au cerveau et est source d’erreurs sur les premiers tours.

Chaque pli vous rapportera 1 PV, c’est peu, mais ce n’est pas si mal. Vous disposez également d’un contrat à chaque manche qu’il vous faut remplir exactement pour obtenir des PV supplémentaires.

Sur vos 5 dés, vous n’en jouerez que 4. Le 5ème est votre contrat, sa valeur est le nombre de plis que vous devez faire sur cette manche.

Une difficulté de plus à appréhender et surtout à valider, les autres joueurs auront pour but de vous faire échouer et s’ils peuvent vous faire jouer le dé que vous prévoyez de placer en contrat (must follow… c’est parfois piégeux), ils n’hésiteront pas.

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Mais ce contrat, ça vaut le coup ? Tout dépend de combien de joueurs valident le leur.

1 seul joueur, c’est le jackpot ! 30 PV dans la poche. Pour 2 vainqueurs, c’est 20 PV chacun, à 3 joueurs, on passe à 10 PV et, vous l’aurez deviné, si tout le monde valide son contrat, c’est 0 point bonus.

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Je vous rajoute une couche ? Ok ! Après le draft des dés, il vous est possible d’annoncer que vous ne ferez pas un seul pli de la manche. Déjà bravo ! Ce n’est pas tout le monde qui est assez fou et ingénieux pour le tenter.

Vous allez défausser un de vos dés (plus besoin de dé de contrat) et c’est parti pour la survie. Si vous réussissez, c’est le contrat validé et un bonus de 10 PV. Clairement, à vous la gloire dans le microcosme des joueurs de Nokosu et sur la partie en cours, la victoire se rapproche !

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Nokosu est un jeu où frustrer les autres et leur faire louper leur contrat est votre première mission. Cet aspect couplé à l’atout en croix en fait un jeu où chaque pli est étudié, chaque carte choisie avec minutie. Le tour de force réside dans la simplicité de ses règles (atout en croix, contrat mouvant) à l’opposé de la profondeur de gameplay proposée.

Ce Nokosu a de sérieux arguments pour être l’épouvantail, le jeu qui valide le statut de joueur de plis que l’on peut attribuer aux Lacerda dans l’univers des jeux experts.

Avec le temps, j’ai de plus en plus remis en question ce statut du côté des jeux de Vital (Lacerda), ils sont uniques et profonds, mais ne valident aucun « statut », mais bien, c’est un tout autre débat.

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Nokosu Dice, je l’apprécie beaucoup, la découverte m’a cueilli, tant de choix, de profondeur, c’est grisant. On met quelques parties pour commencer à se sentir à l’aise, pour faire des choix plus sûrs et se sentir moins nerveux.

Nokosu, c’est un jeu très sérieux, peut-être un peu trop. L’ambiance autour de la table est très studieuse, ça manque un peu de cette ambiance que j’affectionne tant. Un jeu qui plaira aux puristes du jeu de pli où ça ne parle pas beaucoup autour de la table.

Le jeu est actuellement dans sa V3 avec la possibilité de jouer de 3 à 5, personnellement, c’est à 4 que je le trouve le mieux calibré pour le temps de la partie qui se contient à 30/40 min en conservant une bonne compétitivité autour de la table.

Un jeu exigeant pour des joueurs sérieux, des parties plutôt longues pour le format et avec une réflexion qui en fait un jeu expert. Si tout ceci ne vous fait pas (trop) peur, alors foncez découvrir ce grand jeu.

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