Cette critique a été rédigée à l’aide d’un exemplaire fourni par l’éditeur.
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Le jeu reprend le thème et une partie du nom de son aîné Maracaibo sorti en 2019, du même auteur, et qui a toujours une belle cote de popularité avec une note générale de 8 sur 10, et un classement de 57ème dans les jeux de stratégie sur BGG, le site de référence. Sur cette mode récente de proposer des versions allégées des jeux experts, Pirates fait écho à El Paso (Great Western Trail) et Sanctuary (Ark Nova) à venir. On est donc sur une proposition plus rythmée, moins riche et moins longue que le grand frère. On verra ici que c’est le cas avec le jeu de base, mais que cet écart se réduit avec l’ajout de la 1ère extension.
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Pirates le jeu de base propose cet aspect de course couplé à une optimisation nécessaire et à surveiller. 3 manches de jeu, 3 trajets de votre bateau sur les îles du plateau, et la fin de partie se déclenche pour tout le monde. Certains vont rusher, d’autres aller d’île en île pour optimiser et faire le maximum d’actions. Faites-vous distancer, et c’est la meilleure solution pour être largué et subir le rythme imposé. Un mix intéressant entre complexité, optimisation, et rythme de jeu qui m’avait bien convaincu.
Thématiquement faut pas être trop regardant, on arrive sur une île du plateau avec son bateau, on peut l’acheter et la garder près de son plateau pour son effet instantané ou permanent, et on glisse une nouvelle île tirée du paquet sous son bateau. Pouf vous voilà téléporté. À la fin du parcours d’îles, on revient au début du plateau et on refait le chemin jusqu’au bout, 3 fois de suite. Une sorte de circuit, 3 tours à faire. Bon le reste est plus cohérent, avec notamment la possibilité de récupérer des trésors de 3 types et surtout de les enterrer avec une action spécifique, chaque trésor enterré rapportant 2 PV de + à la fin. Son navire est à optimiser pour débloquer des bonus instantanés ou permanents, votre succès dans cette course étant intimement lié à ces améliorations et l’ordre dans lequel vous les débloquez.
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Le jeu vous propose à chaque tour plusieurs axes, avec au moins 3 ou 4 îles accessibles avec votre bateau, si ce n’est plus en fonction de votre position. Toutes ne seront pas intéressantes, mais la plupart du temps au moins 1 attirera votre œil, par exemple pour l’acheter et gagner son pouvoir permanent (réduction sur l’achat des cartes suivantes, amélioration de vos capacités de raid …), une icône nécessaire à la réalisation d’un objectif, ou encore des PV de fin de partie. Vous pourrez aussi jouer la carte pour son lieu et son action, comme faire un raid et gagner des trésors, activer un marché noir, et surtout améliorer votre navire.
Voilà pourquoi il me plaît, j’ai plusieurs pistes à suivre, je réfléchis à mes possibilités pendant les tours de mes adversaires, et je surveille tout de même leurs actions car la topographie va changer en fonction de leurs actions. Si une carte devant mon bateau m’intéresse fortement, y’a des chances qu’un autre joueur s’y intéresse aussi, et dans ce cas il s’y rend, l’achète et m’en prive. Une autre carte prend alors sa place, et je peux avoir de la chance avec une carte intéressante pour moi, comme une qui ne présente aucun intérêt. Reste que je ne devrais pas passer 10 minutes à choisir quoi faire à mon tour, et que le déplacement et que l’action que je fais se résolvent rapidement. À moins d’avoir des joueurs très lents, le rythme est maintenu et colle bien à cet aspect course sur le plateau, car celui qui arrive à la fin du trajet reçoit des bonus plutôt intéressants.
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Extension Commandants
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Avec l’extension, pas mal de nouveaux axes s’offrent à vous sur un jeu qui permettait déjà d’avoir plusieurs stratégies à suivre et à optimiser. En résulte des tours plus longs et une variété d’icônes et d’actions qui viennent nuire à ce rythme du jeu que proposait le jeu de base. Le jeu de base est déjà plutôt riche et surtout plutôt bien calibré dans ce rapport poids/durée. Avec l’extension, le jeu se rapproche encore de la durée et complexité de Maracaibo, ce qui fait que j’aurai tendance à me demander si c’est la peine de sortir le jeu et l’extension ou alors directement le grand frère. À confirmer en y rejouant, mais j’apprécie Pirates de Maracaibo, j’aime moins le cran que lui fait passer son extension.
Surtout sur les premières parties, notamment à cause d’une icono qui se retrouve chargée et pas forcément claire qui amène des retours à la règle, le rythme s’en ressent, et les tours durent parfois trop longtemps. Ce dynamisme des tours qui me plaisait tant avec le jeu de base est moins présent, et j’ai notamment fait une partie à 4 joueurs dernièrement, j’avais le temps d’aller voir ce que le chien faisait à aboyer dehors, de revenir, et d’attendre encore avant de pouvoir rejouer…
2 nouveaux plateaux se rajoutent à votre plateau navire, et votre plateau pour disposer les trésors. Votre capitaine vous apportera un pouvoir spécifique qui créera une asymétrie pas inintéressante, mais avec des pouvoirs plutôt puissants. L’autre partie de plateau rajoutée est un nouveau système à optimiser pour débloquer des bonus. Du coup y’en a un peu dans tous les sens, et le côté épure en prend un bon coup. Il faut passer par l’un des marchés de contrebande accessibles sur les îles pour acheter un baril de rhum pour 3 doublons. Il faudra repasser par la même île ou une autre contenant aussi un marché de contrebande afin de placer ce baril acheté et stocké depuis lors dans vos cales, sur l’un des emplacements dispo sur les nouveaux plateaux à optimiser. Redondant et inélégant.
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Pour conclure, j’aime Pirates de Maracaibo pour son rythme, sa difficulté abordable et les différentes prises de décisions qu’il propose. Idéal à 2 ou 3 joueurs, il me donne envie d’y rejouer, d’essayer autre chose (je rush sur les îles pour ne pas laisser le temps à mon adversaire d’optimiser tranquillement, je prends le temps d’explorer le sentier et les bonus qu’il procure, je me spécialise dans les raids, ou encore je me concentre sur les cartes avec les points de fin de partie).
Pour qu’il fonctionne, il faut qu’il soit dynamique, et cette surcouche d’optimisation avec les 2 nouveaux éléments de plateaux individuels apportés par l’extension fait passer un cap d’où le jeu ne reviendra pas, et sombrera corps et âmes. Cela reste ma limite personnelle, mais l’adverbe trop est celui qui vient à l’esprit quand je parle de l’extension.
Pirates le jeu de base oui, avec l’extension je sors le grande frère Maracaibo, ou un autre jeu. Et dîtes-vous bien que c’est indiqué « 1ère extension » sur la boîte …
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On me glisse dans l’oreillette que la 2ème extension vient d’être annoncée … ^^
Alors on va parler en 1er lieu du jeu en lui-même, même si ça ira vite ! Le jeu a été réédité ou rethématisé à plusieurs reprises, vous l’avez peut-être croisé sous le nom de Risk Express, Age of War, et date de 2006 à l’origine. Il est l’œuvre du Dr Reiner Knizia, et vous avez forcément joué à un de ses jeux. En même temps, il indique sur son propre site web en avoir plus de 800 édités, beaucoup de succès commerciaux et/ou critiques, et on peut citer par exemple Pickomino, Tigres et Euphrates, Samurai, Mille Fiori, Schotten Totten, Lost Cities etc …
Risk Express, euh pardon Age of War, enfin Camarades je veux dire, vous propose de lancer des dés, valider une ligne de symboles sur une carte, relancer à nouveau les dés restants, en essayant de remplir totalement la carte visée, qui rejoint alors votre zone. Quand toutes les cartes sont obtenues, on compte les points, chaque carte rapportant des points, chaque famille complète détenue par un seul joueur en rapportant encore plus. Vous allez aussi pouvoir piquer les cartes des adversaires, et c’est ça qui amènera un peu d’interaction, de « grrrr » de « oh ! » et de « ah ! » dans un jeu si mécanique.
Contre toute attente le jeu plait. Certains diront qu’il tourne bien ! Intergénérationnel, fédérateur, consensuel, autant de termes qui s’appliquent à un Skyjo, un Hit ! (aussi Knizia d’aillleurs), un Flip 7. Ça s’explique en 30 secondes, ça se joue en tenant 3 discussions différentes durant la partie, et ça ne vous demandera guère plus que de jeter mécaniquement les dés à plusieurs reprises à votre main, et choisir une carte. Je force le trait, mais ça souligne quand même qu’il n’est pas besoin d’en rajouter des tonnes pour fédérer autour d’une table et faire passer de bons moments. Et c’est là certainement le tour de force de ce jeu qui remplit pleinement sa mission.
Personnellement, il n’arrive pas à la cheville d’un autre jeu du cher Docteur, j’ai nommé Pickomino, une leçon de game design et d’efficacité dans un jeu contenu, qui brave l’épreuve du temps et qui n’a pas quitté ma ludothèque depuis son achat il y a moult années. Je n’ai même aucune envie de rejouer à Camarades, je cherche d’ailleurs à lui trouver un foyer accueillant, puisque parmi tous les petits jeux que j’ai, il restera en queue de peloton et prendra la poussière.
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knizia.de
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Une leçon de marketing
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Le jeu ou plutôt la leçon de marketing qui accompagne cette sortie est bien plus intéressante à étudier que le jeu en lui-même à mon sens. Il est clairement indissociable du touche à tout faiseur d’or qui est derrière, ou plutôt devant, et même dedans. Vous allez comprendre.
Simon du Passe Temps, personnalité bien connue du monde du jeu et des internets, est le patron de la boutique le Passe Temps à Toulouse. Il est aussi l’influenceur et créateur de contenu numéro 1 indiscutable de notre marché de niche. Que ça soit pour la créativité, le ton, la connaissance ou la qualité, pas un ne lui arrive à la cheville. Joueur invétéré, et depuis longtemps, il a du flair, et fait tellement bien son job que les éditeurs attendent impatiemment qu’il détecte une pépite pour la localiser. Et bien il s’est à nouveau démultiplié et s’est dit qu’on n’est jamais mieux servi que par soi-même, et donc que ce petit jeu de dés qui est l’un de ses préférés, n’est plus édité ? Qu’à cela ne tienne, il le fait lui-même ! Le voici donc éditeur, avec Offline Editions à ses côtés sur ce projet.
Donc on résume, vendeur et patron de boutique, influenceur numéro 1, dénicheur de jeux, et dorénavant éditeur. On dirait que la boucle est bouclée ? Dans d’autres secteurs on parlerait de position dominante. Et c’est justement ce que je trouve si intéressant dans ce coup d’essai qui est un coup de maître. Est-ce qu’il y en aura d’autres ? À un moment, même si à sa tête on voit bien qu’il doit dormir 3 heures par nuit, il va falloir certainement réorganiser, déléguer pour ne pas y laisser sa santé. C’est un peu le problème des passionnés, ils ne s’arrêtent jamais.
Bon on parle d’un jeu fédérateur, qui ne prend pas de risque, qui a déjà été édité, réédité et s’est déjà bien vendu par le passé. On ne va pas chercher un jeu original, qui casse des codes, éblouit par son originalité ou définit un nouveau genre. Mais, et comme il s’en félicite fièrement et à raison avec une autre vidéo, ils en ont mis en place 10.000 en boutiques. De nombreux éditeurs aimeraient avoir ce même chiffre quelques semaines après la sortie d’un jeu.
Simon et son équipe ont donc réussi le tour de force d’aller repêcher un jeu qui n’était plus édité, l’a redesigné, a créé une extension (créer l’offre), a produit des contenus avant, pendant et après la sortie du jeu pour s’assurer de son succès (créer l’envie), a enfilé une nouvelle casquette d’éditeur (fournir le jeu), et a vendu 10.000 exemplaires. Chapeau bas. La boucle est bouclée.
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Made in France
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L’autre élément à retenir selon moi est aussi l’apport de Offline Editions, basé en Alsace, et qui a donc produit un jeu en France. Ok le matériel est limité, il y a des dés et des cartes. Et une piste de dés mais ça c’était déjà leur produit étendard avant cela. Mais tout de même. Plusieurs éditeurs le mettent en avant, la recherche du « produit en France » doit se développer. C’est donc une bonne chose que ce jeu et tout le barouf qui l’entoure coche cette case. Par contre, j’espère que le sachet zip qui fait office de rangement ne sera plus jamais proposé. Ok ça permet de se démarquer, d’avoir un côté original, mais franchement ça se range comment avec les autres jeux de nos ludothèques ? Simon a une boutique et doit pester régulièrement à raison du trop grand nombre de jeux, que les boutiques ne peuvent pas suivre. C’était donc l’occasion de proposer un contenant en rapport avec le contenu, donc une boite qui n’est pas remplie de vide.
Ce Camarades ne m’a donc pas intéressé pour le jeu en lui-même qui est loin d’être le meilleur jeu de dés et heureusement. Par contre, tout ce qu’il l’entoure est une masterclass, et doit certainement donner des idées à d’autres. Est-ce qu’on retiendra le jeu ou la leçon de marketing qui a été donnée ? Peut-être les 2, mais si on avait encore besoin d’exemples montrant qu’une promo bien faite pouvait faire vendre, et bien la sortie de Camarades sera certainement à marquer d’une pierre blanche dans notre milieu ludique. Chapeau bas en tout cas Monsieur Simon, et bravo pour ce projet mené de main de maître.
La critique de Dungeon Legends a été rédigée à l’aide d’un exemplaire fourni par l’éditeur.
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Peu de gens s’en souviennent, mais l’année 2020 a été marquée par un événement terrible : le confinement. Ne croyez pas ce que les magazines de l’époque racontent, ce n’était pas le temps du ressourcement et de la méditation déconnectée. C’était le Vietnam ou presque, et il a fallu faire preuve d’imagination pour survivre, surtout quand il s’agissait d’occuper une petite fille friande d’aventures. D’ailleurs, ce goût pour les histoires remplies de monstres, de héros, et de dés, lui est resté depuis. Heureusement, cela fait un certain temps que les jeux de société pour enfants s’intéressent au sujet, à savoir les jeux coopératifs qui nous voient affronter des bestioles terrifiantes et découvrir des trésors. Alors qu’on avait déjà Andor Junior ou Chronicles of Light dans la ludothèque, un ami m’a conseillé les Chroniques d’Avel. J’ai bien fait d’écouter cet ami.
Dans le genre aventure puzzlesque, le jeu de <copier – coller> Przemek Wojtkowiak est en effet bourré de bonnes idées, et son cousin un peu plus âgé, Dungeon Legends, également, en plus de partager le même univers, des illustrations pas dégueu par <copier – coller> Bartłomiej Kordowski et un matériel très qualitatif. Suivant l’âge et l’appétence de votre tête blonde pour la chose, je conseillerai l’un ou l’autre, mais on va d’abord prendre le temps de voir quoi il retourne exactement. On n’est pas chez les sauvages.
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Les Sims : mon premier Land Crawler
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Chroniques d’Avel nous enjoint à incarner l’un des héros chargés de défendre le château du royaume, alors que les astres ont prédit l’arrivée d’une Bête dans 12 manches. Ouais, on n’est pas chez Météo France ici, on fait dans la précision. En attendant l’apocalypse, il s’agit donc de s’équiper, d’améliorer cet équipement, de récupérer des potions, et de préparer le terrain en évitant la surpopulation de monstres, en construisant des remparts et en posant des pièges. 2 actions par tour, se déplacer, attaquer, ou activer le lieu où l’on est, les règles sont élaborées juste ce qu’il faut pour des enfants de 6-7 ans. Viennent alors les différentes bonnes idées qui classent selon moi Chroniques d’Avel dans les vrais bons jeux coops pour enfants.
Première bonne idée, chaque joueur a droit à son plateau double couche qui figure un personnage qu’on peut customiser en lui donnant un nom, en dessinant son blason, et en coloriant sa tenue. Le jeu va même jusqu’à proposer un mini-générateur de noms en cas de panne d’inspiration. La deuxième couche du plateau joueur permet de dessiner les contours du personnage, et donc les emplacements pour son casque, son arme, son bouclier, mais aussi l’espace occupé par son sac à dos. Eh oui : si le paquetage du joueur est déjà plein, plus moyen d’y rajouter des pièces d’or, une potion, ou encore un casque de rechange, il faudra s’en passer, ou jeter quelque chose à la place. On ajoute ainsi un petit dilemme facile à appréhender pour les enfants, c’est très malin, en plus de rendre la personnalisation de son héros ou héroïne carrément satisfaisante.
Ça tombe bien, c’est le cœur du jeu : les combats servent en effet principalement à récupérer de l’équipement, des pièces d’or qui permettent d’acheter de l’équipement ou de l’améliorer, bref à accéder à des dés de combat plus puissants que ceux qu’on lance au début. Et là, deuxième idée qui plait beaucoup : quand on gagne un équipement, il faut le piocher au hasard dans un sac en toile, MAIS chaque type d’équipement présente une forme bien particulière. On tripote donc chaque token jusqu’à reconnaitre sous ses doigts les contours d’un bouclier ou d’une potion. Superbe façon d’introduire la petite excitation de l’aléatoire, mais sans la déception de tomber sur un loot qui ne nous convient pas, à condition d’être suffisamment attentif, c’est une belle trouvaille.
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Elève appliqué et très soigné, pensez à rajouter un peu de folie
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Le reste du jeu est bien calibré, avec une difficulté bien dosée, pas mal de liberté dans l’action, une courbe de progression au fur et à mesure des parties (« cette fois-ci, faut trouver rapidement la tuile qui permet de construire les murailles ! »), la surprise quand on découvre un nouveau monstre, l’analyse qui se met en place parce que les plus grosses bestioles annuleront certains dés, l’adrénaline et l’appréhension quand enfin le big boss débarque et commence à progresser vers le château avec sa cohorte de vampires, trolls et autres dragons. Pour ces catégories d’âge et de type de jeu, on tient un jeu très solide, même si évidemment il en faudrait toujours plus : la rejouabilité n’est pas immense par exemple, puisqu’elle dépend uniquement de l’emplacement des tuiles terrain, placées face cachée au début du jeu et suivant un agencement choisi parmi ceux du livret de règle en fonction de la difficulté souhaitée.
Il manque également un peu de différenciation entre les différents personnages incarnés par les joueurs, et ne croyez pas qu’il s’agisse d’une lubie d’adulte : pour les enfants aussi c’est appréciable, puisque ça leur fournit une ligne directive, un guide, quand il s’agit de décider quoi faire dans un jeu qui ne nous dit pas ce qu’il faut faire. Andor Junior le fait par exemple, avec l’archer qui a plus de jetons d’action, le nain qui peut passer par la mine, ou le guerrier qui peut lancer plus de dés. Chronicles of Light aussi, chaque héroïne ayant des actions spécifiques et des quêtes en accord. Dans Chroniques d’Avel, tout le monde commence avec la même feuille blanche, et chacun tentera d’améliorer son valeureux héros avec ce qui lui tombe sous la main. Ce n’est pas forcément facile à prendre en main. Mais vous savez quel autre jeu glisse un peu d’asymétrie dans sa mise en place ? Dungeon Legends.
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Rengagez-vous, qu’ils disaient !
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Jeu coopératif également, toujours situé dans le royaume d’Avel, où l’on doit toujours empêcher des monstres d’atteindre ce foutu château. La ressemblance s’arrête cependant là, le gameplay étant tout autre, et la proposition un peu plus ambitieuse. Cette fois-ci, chaque joueur doit exploiter au mieux une main de 5 cartes, qui vont lui fournir les ressources nécessaires aux actions qu’il souhaite réaliser pendant son tour. Se déplacer, combattre, se soigner, récupérer de la poussière d’étoile, tout ça peut s’effectuer à condition d’avoir les icônes correspondantes en main, à charge ensuite au joueur de décider s’il doit taper sur ce monstre qui se rapproche dangereusement du château, ou plutôt se renforcer, ou encore activer ce lieu qui permet d’avancer vers la réalisation de la quête et donc la victoire.
Les 6-7 ans risquent d’être un peu perdus du coup, à moins qu’ils soient particulièrement éveillés. Même s’il y a peu de texte à lire, il y en a, et les dilemmes à trancher sont un peu plus nombreux que dans Chroniques d’Avel, ce qui fait évidemment tout l’intérêt du jeu. On gagne également en complexité tant au niveau des personnages que du scénario lui-même. Chaque héros, il y en a quatre au total, est fourni avec son deck de cartes dédiées, qui ne présenteront pas exactement les mêmes icônes d’un personnage à l’autre, mais également son plateau personnel, sur lequel on constatera également de légères différences, comme le nombre de points de vie ou l’existence d’un bonus de départ. Rien de très fou, mais ça donne tout de suite une identité au personnage qu’on choisit d’incarner. La mise en place propose par ailleurs de choisir un lot de 3 compétences qu’on pourra toutes activer une fois et une seule pendant la partie, ce qui renforce encore cette différenciation.
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C’est mardi, c’est catacombes
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Le scénario, lui, est à choisir parmi cinq, avec des objectifs, des monstres et des obstacles ou événements différents. Le jeu propose également de les enchainer au cours d’une mini-campagne, avec pour seul fil rouge la possibilité de conserver d’un scénario à l’autre l’une des cartes avancées gagnées pendant la partie. Là encore, ça reste très léger, mais pour des enfants c’est parfait, et puis les cartes avancées, toutes avec un effet foil, sont assez classes. J’ai d’ailleurs été ébaubi par la qualité du matériel pour un jeu retail, loin des folies Kickstarter : cartes foils, tuckboxes individuelles pour chacun des personnages et des scénarios, avec liste des composants inscrite sur le rabat, tapis néoprène, plateaux double couches, le jeu se met en place très facilement et est hyper satisfaisant à jouer. Et si vous avez une imprimante 3D ou que vous connaissez quelqu’un qui en a une, il existe sur Thingiverse des fichiers STL de très bonne qualité qui permettent de remplacer les standees des personnages par des minis.
On est donc clairement loin du dungeon crawler pour barbus aguerris, qui trouveront le gameplay un peu simple et la profondeur de jeu pas très… profonde justement : peu de scénarios, des monstres qui se ressemblent tous, une évolution quasi inexistante des personnages. Et malgré ce qu’on peut voir ou lire un peu partout, il ne s’agit certainement pas d’un deck building, puisque si on peut effectivement gagner de nouvelles cartes qui arriveront rapidement dans notre main, jamais est-il possible de se débarrasser de celles qui ne nous intéressent plus. On ne construit rien, il n’est pas possible d’orienter son deck d’une quelconque façon. Mais pour des enfants à partir de 9-10 ans, ou même des joueurs qui découvrent le genre, c’est assimilable rapidement, le puzzle est bien présent et peut d’ailleurs se révéler corsé dans les derniers scénarios, la mise en place est aisée et le jeu très agréable à jouer.
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Attention, un jeu cool peut en cacher un autre
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Si vous cherchez donc du jeu d’aventure pour vos marmots, je ne peux que conseiller les deux titres, tant ils ont été soignés dans leur conception et leur fabrication. Ils ne sont pas interchangeables bien sûr, et je laisserai chacun juge de la précocité de sa progéniture. Quoi qu’il en soit, et comme tous les bons jeux pour enfants, ils se révèlent également stimulants à jouer pour les parents et, en ce qui concerne Dungeon Legends tout du moins, pourrait même intéresser des joueurs occasionnels ou qui ne veulent pas se coltiner les pages de glossaire et les livrets de règles à rallonge. Le seul souci au final, c’est de devoir à chaque fois vérifier sur Internet avant d’écrire le nom de <copier – coller> Przemek Wojtkowiak ou encore de <copier – coller> Bartłomiej Kordowski.
Disclaimer : Attention, les images de cet article sont tirées d’un prototype. Les cartes ainsi que le matériel sont susceptibles d’évoluer
Ÿossef FARHI a encore frappé ! A l’heure où sont publiés ces mots, une campagne participative sur Kickstarter arrive à grand pas (le 06/02/24). En effet, une publication mystérieuse sur la page Facebook d’Alone Editions laisse entendre que ce nouveau titre, “Les Sœurs de l’Alliance”, débarque dans quelques jours.
Et au labo des jeux, nous avons l’immense plaisir de pouvoir nous essayer au prototype de celui-ci.
Prenant ses marques dans le monde d’Eden (cf Spirit Eden et Colossus, deux précédents titres du même auteur), nous allons nous y promener dans un style qu’on pourrait définir de Nakatomi Crawler ! Bref, un dungeon crawler, mais dans une tour, dans laquelle on va progresser et où au dernier étage on va devoir tataner Hans Grüber déguisé en boss infâme et coriace !
(Pour ceux qui n’ont pas la référence, Hans Grüber est le méchant de Piège de Cristal, où Bruce Willis grimpe dans un building à la recherche du grand méchant..)
Comme dans ses précédents titres, nous retrouvons un jeu format très compact, graphiquement léché, mécaniquement bien rôdé, facile à comprendre mais complexe à gagner.
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Sans plus attendre, détaillons les mécaniques !
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JCE, DC, DB ! T’aimes ça les acronymes, t’entends ??!
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Alors, tout d’abord, il faut savoir que les “Sœurs de l’alliance” va plus loin que le prototype que nous avons reçu. Durant la campagne, ce seront plusieurs extensions qu’il sera possible de découvrir, permettant de gonfler le nombre de défis, boss, et cartes à votre disposition.
Dans ce premier opus que nous avons essayé, il s’agit d’un Dungeon Crawler (DC), comme dit, avec un enchaînement “porte/monstre/piège/trésor/boss” spécifique à ce style de jeu.
Et en terme mécanique, on se retrouve face un Deck-Building, où nous allons pouvoir faire évoluer nos cartes de base (en les retournant), acquérir des cartes avancées, ou encore retirer des cartes, etc…
Mais, en cumulant la boîte de base et les extensions, on va aussi se retrouver face à un JCE, ou Jeu de Cartes Évolutif (ou encore Deckbuilder). La spécificité de ce type de jeu est qu’avant une partie, on doit préparer un nombre de cartes fixe, ici 16. C’est aussi le nombre de cartes “standard” de la boîte de base. Et en associant les autres extensions, nous pourrons créer notre paquet de 16 cartes de départ parmi toutes les cartes d’action disponibles.
C’est chouette, ça laisse supposer différentes stratégies avant de partir à l’assaut.
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A l’assaut de la Tour des Miracles !
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Le boss étant bien planqué dans son penthouse, il nous faudra nous y rendre à pied. Pour ce faire, nous devons parcourir 3 étages, 2 que nous choisissons aléatoirement, et 1 correspondant au boss sélectionné.
Nous avons 3 actions de mouvement pour terminer un étage, sinon de toute façon on se rend quand même à la porte de l’étage suivant.
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Pour faire un mouvement, c’est simple : on lance 2 dés et on choisit celui qui nous intéresse, et on avance d’autant de cases (en latéral ou vers le haut).
Ensuite, on résout les événements que l’on a rencontré, par ordre de priorité (Piège > Ennemi > Trésor).
Pour les pièges et les trésors, on lance un dé et on se réfère à la carte correspondante.
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Pour les ennemis, on compte le nombre d’ennemis traversés, puis on tire autant d’ennemis, dans la limite de 3 par combat (ce qui veut dire que si vous en avez 4, ben faudra faire 2 combats, un avec 3 ennemis, puis un avec le dernier !)
Un combat se déroule au tour par tour, vous puis les ennemis. A votre tour, vous lancez un dé. Ce sera votre nombre de manas à dépenser. Chaque carte ayant un coût, à vous de voir comment vous l’utiliser. D’ailleurs, ce mana sera aussi la seule possibilité de piocher de nouvelles cartes.
C’est tendu, tactique et très bien vu, j’adore. A noter que plus les tours / rounds passent, et moins on gagnera d’expérience au combat. Et aussi que chaque combat se déroule dans un lieu amenant un challenge supplémentaire.
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Au cours de votre aventure, vous gagnerez de l’XP, que vous pourrez dépenser en potions de santé, en amélioration de carte, ou encore en acquisition de carte évoluée (c’est la partie Deckbuilding, avec une pointe d’épuration de cartes).
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Enfin, si vous êtes arrivés SUR la case du boss, le combat ultime débute. Sinon la partie est perdue (et ça m’est arrivé d’échouer à 1 case du boss, autant vous dire que la déception était forte et l’envie de vengeance à son paroxysme !).
Exemple de boss. Attention, ces informations sont issues du prototype et peuvent être amenées à évoluer.
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Et il en pense quoi le monsieur ?
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Pour résumer, j’adore. C’est simple à mettre en place, c’est fluide. Même si j’aime pas l’aléatoire et les jets de dés, ils sont limités aux mouvements et au mana, alors ça passe, même si ça fait rager avec mes lancers pourris quand il ne faut pas.
Il faut bien réfléchir à tout ce qu’on fait, que ce soit à ses mouvements, l’évolution de ses cartes, la gestion de son mana au combat (est-ce que je l’utilise pour jouer une carte ou pour en piocher une ?)
Il y a pour le moment 4 boss. Je ne les ai pas tous affrontés mais le challenge, même pour les bas niveaux, est suffisamment relevé pour que je me fasse démonter !
J’aime bcp le fait que les cartes aient double-emploi :
Les cartes action (que l’on joue), sont recto / verso (pour la version de base ou améliorée)
Les cartes d’ennemis sont aussi des lieux sur leur verso. Ainsi, chaque combat est la promesse d’un challenge différent
Je ne vous ai pas tout détaillé et c’est volontaire. Vous aurez tout le loisir de découvrir toutes ces informations pendant la campagne Kickstarter à venir.
J’attend vivement d’en savoir plus sur la partie JCE et les autres boîtes constituant la saga des “Sœurs de l’alliance”, et également sur l’histoire qui pourra en découler au cours de la campagne.
Cette critique a été rédigée à l’aide d’un exemplaire fourni par l’éditeur.
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Hybride
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On a là un jeu le c** entre 2 chaises comme j’aime à le dire, avec une bonne couche d’eurogame (placement d’ouvriers, et revenus) mais aussi beaucoup d’aléatoire avec une résolution des conflits au lancer de dés, et la possibilité d’aller braquer les revenus des autres. J’utilise l’opposition « mais » surtout pour prévenir l’eurogamer qui serait tout excité par ce jeu de Xavier Georges, l’auteur de Carnegie et Troyes notamment. En effet ça n’est pas forcément indissociable d’avoir un peu d’eurogame et d’autres méca dans un jeu, mais ça peut surprendre, surtout quand on voit les autres jeux de l’auteur. Carnegie est d’une froideur polaire et vous mettra à rude épreuve pour optimiser ce pur euro comme il se doit. Avec Carson, c’est pas la même mayonnaise ^^
On est plusieurs crans en dessous en termes de complexité en ce qui concerne Carson City par rapport à Carnegie (3.21 versus 3.82 sur l’échelle BGG, ce qui n’est pas rien), surtout en termes de ressenti en y jouant. Le jeu est plutôt rapide, surtout après la 1ère partie. 4 manches qui se succèdent, une ville qui va se construire sous vos yeux, et des duels qui se résolvent revolver au poing comme dans tout bon Western.
La version big box qui me sert pour cette critique fait suite à la version 10ème anniversaire du jeu, qui a fait l’objet d’un financement participatif sur Kickstarter en 2016. Cette version que localise Pixie Games en nos contrées n’a pas d’éléments Deluxe tels que les composants en bois, mais propose le jeu de base, et les extensions dans une bien belle boîte vendue tout de même 90€ dans vos boutiques.
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crédit photo : https://www.gamesfanatic.pl/
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Programmation, résolution et duels à foison
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On commence par choisir l’un des personnages disponibles avec son pouvoir/action associée, puis l’on place ses « ouvriers » à tour de rôle sur les cases actions, ou un emplacement du plateau (case vide pour l’acheter et y construire un bâtiment, case avec un bâtiment ennemi pour le braquer, montagne ou maison de ville pour les acquérir). Une fois que tout le monde a placé, on déroule les actions dans l’ordre du plateau, et surtout on résout les éventuels duels. C’est là où le jeu peut vous perdre car la résolution s’effectue en lançant un dé auquel on ajoute sa valeur de force de son plateau, et on compare. Celui qui perd le duel récupère en compensation le cowboy vaincu sur son plateau et n’exécute pas l’action. Le gagnant défausse son cowboy, et effectue l’action vaillamment remportée.
Presque sur chacune des parties que j’ai faites, un duel perdu en toute fin de partie ou à un moment décisif a eu un gros impact sur le score ou le déroulé de la partie. Ça n’est pas qu’accessoire, ça a un gros impact dans le jeu, il faut en être conscient. Cela s’anticipe un peu et peut se contrebalancer un minimum, il n’en reste qu’un 1 contre un 6 aboutira à 90% du temps à un duel perdu pour celui qui a lancé le 1 ^^
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Modulable à souhait
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La big box intègre plusieurs extensions que l’on peut ajouter ou non au jeu de base. La plupart amènent encore plus de chaos dans votre partie. L’avantage c’est que si le jeu vous plaît, vous en aurez pour des dizaines de parties avec x personnages différents (7-8 sont nécessaires par partie).
6 extensions ou variantes de règles sont présentes, et impactent dans un sens ou un autre la complexité et la durée de la partie. Commençons par la plus notable pour des eurogamers allergiques aux dés, la possibilité de modifier la résolution des duels. Au lieu des dés, on peut avoir des tuiles numérotées, distribuées au hasard en début de partie. Chaque joueur va choisir une tuile lors d’un duel, et ajouter la valeur à sa force, le vainqueur est toujours celui qui a le + de force, mais c’est une modification qui pourra convenir aux allergiques aux dés.
Une autre variante amène un départ asymétrique pour les joueurs, « Carson River » permet de jouer sur la face verso du plateau avec la rivière imprimée (2 routes sont nécessaires pour traverser la rivière, cela équivaut à un pont), ou encore l’extension « Hors la Loi » fait venir de manière aléatoire des braqueurs qui prennent la moitié des revenus d’un bâtiment, et/ou empêchent l’achat d’une parcelle qu’ils occupent.
Un mode solo que je n’ai pas essayé est aussi présent.
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Un mot sur la configuration
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Au niveau de la configuration idéale je partirai sur 3 joueurs si vous aimez pouvoir vous développer plus tranquillement et limiter un peu l’interaction. Mais clairement ça n’est pas le propos du jeu, du coup 4 joueurs me semble optimal, à 5 ou 6 je n’ai même pas essayé car je sais que ça plaira beaucoup moins à ma table.
La durée de partie doit être comprise autour de l’heure et demie de jeu (si chacun a 1 partie dans les jambes) pour que Carson City reste agréable pour moi. Plus de 2h avec un impact aussi fort des dés, je sors un autre type de jeu. Un jeu d’affrontement génèrera moins de frustration au global puisque c’est le but premier du jeu de se foutre sur la tronche et d’en accepter les conséquences. Là on doit surtout construire son moteur de revenus avec ses bâtiments, s’étendre et acheter et obtenir des points de victoire. L’affrontement et sa conséquence ne sont qu’une composante (bien présente) du jeu, pas l’unique mécanique.
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« Cette ville est trop petite pour nous 2 pied tendre »
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Le jeu n’est pas récent et vous vous en êtes déjà aperçu en regardant les photos plus haut. C’est marronasse, y’a pas grand-chose qui ressort visuellement, et ça paraît assez daté. L’intérêt de ce jeu est bien + dans ses mécaniques et sa proposition, qui vous fera passer un bon moment autour de la table, ou au contraire vous fera fuir. Soit on accepte cette part d’aléatoire et ça ne dérange pas de voir un joueur venir braquer son revenu avec son dernier meeple à placer lors de la phase de programmation, et alors que vous avez déjà passé votre tour, soit on veut construire son moteur dans son coin, et on joue à autre chose.
J’apprécie de voir les situations faire boule de neige dans ce jeu, avec une escalade dans les attaques entre les joueurs. « Attaque moi et tu le paieras tout au long de la partie » pourrait résumer la réaction de certains joueurs à la menace d’un meeple sur son bâtiment ou qui viendrait contester l’action choisie ou l’achat du bâtiment visé. C’est plutôt fun d’observer tout cela, et d’y participer.
Le jeu nous permettra souvent de réorienter notre stratégie, d’essayer de minimiser l’impact des actions des autres joueurs, mais parfois votre tour complet ne servira finalement à rien ou vous ralentira dans votre stratégie si le foie jaune en face de vous a provoqué et remporté un duel qui vous prive du bâtiment convoité. En même temps on se plaint souvent des jeux à la thématique plaquée, accessoire ou même inexistante, qu’un jeu à l’époque du Far-West avec duels et braquages ça a du sens !! Le choix des personnages pour la partie pourra d’ailleurs renforcer cette interaction, ou au contraire la réduire pour laisser les joueurs construire la ville plus tranquillement. A vous de voir pour ce jeu bien modulable au final.