Test : Sengoku
Cette critique a été rédigée à l’aide d’un exemplaire fourni par l’éditeur.
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Sengoku ou le charme des jeux asiatiques épurés et stratégiques. J’aime beaucoup jouer à ce type de jeu de temps en temps, ça change des jeux avec des boîtes remplies à rabord de matériel, de jeux avec des règles de 25 pages. Bref des jeux qui misent souvent sur le trop de tout pour en mettre plein la vue. Nos amis japonais m’étonnent régulièrement avec leur amour des jeux de plis pour lesquels ils arrivent à rivaliser d’ingéniosité. Ce que j’apprécie tout particulièrement c’est la recherche de l’épure au niveau des règles et du jeu. Sengoku en est un exemple parfait, avec un jeu simple, facile à aborder mais dont l’issue de la partie dépendra souvent de la stratégie que vous mettrez en place.
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Quelques minutes de règles, et on joue !
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A votre tour vous lancerez 3 dés (1 relance possible), vous en additionnez 2 pour déterminer dans quelle province vous placerez le nombre de troupes indiqué par l’autre dé. Simple, basique.
Quand tout le monde aura placé ses troupes, on résout chaque province en ordre croissant, et avec une mécanique de ruissellement ou effet domino qui chamboulera les équilibres ou déséquilibres créés lors du placement des troupes. Le vainqueur d’une province pourra placer 2 troupes de renforts dans une province adjacente où il est déjà présent.
Certaines provinces se verront donc fortement modifiées durant cette phase si plusieurs provinces sont résolues autour d’elles avant que n’arrive son tour. Anticiper ce ruissellement ne sera pas chose facile mais certainement indispensable pour anticiper la victoire.
Victoire qui s’obtient en comptabilisant les points obtenus par le gain d’une province, plus elle est résolue tard durant la dernière phase, plus elle vaut de points.
D’habitude je n’aborde pas les règles d’un jeu quand je vous en parle, car je pars du principe que les règles se trouvent assez facilement sur les internets, et des vidéo règles (plus ou moins bien faites) vous donnent un aperçu du jeu. J’essaie de me concentrer sur mon ressenti, sur ce que le jeu me fait vivre, ce qu’il me propose et pourquoi j’y rejouerai ou pas. Sengoku mérite cette petite introduction des règles car il ne déclenche pas de buzz ludique à ce que je vois. Et c’est bien dommage vous l’aurez compris 😉
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Rapport poids/durée parfait ?
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Critère cher à mes yeux, que propose Sengoku en termes de richesse, de profondeur, de règles et de sensations, par rapport à sa durée de jeu ? Et bien je pense qu’on est pas loin du perfect. En fonction du nombre de joueurs, nous sommes sur 20-30 minutes de jeu effectif. Les 2 phases de jeu distinctes symbolisent bien les 2 étapes d’une guerre qui se déroule devant vos yeux, la préparation et l’envoi des troupes, et la résolution et ses effets pour finalement déterminer le vainqueur.
La 1ère phase peut générer un peu d’AP (Analysis Paralysis) en fonction de vos joueurs et si vous avez des indécis dans votre groupe. Elle n’est pas la plus dynamique des 2 mais est essentielle à votre succès éventuel dans la 2ème. Le champ de bataille se transformera sous vos yeux, et influencera grandement vos prochains mouvements. C’est là où tout votre sens de la stratégie et de l’anticipation se révèlera ou pas … ^^ Chaque tour d’un joueur modifie l’équilibre d’une région, et par effet domino, du plateau entier. Un joueur tente un coup de bluff et va se placer sur une province éloignée, pas forcément intéressante de prime abord car ne valant « que » 3 points. Sauf que cette région sera résolue en 3ème position lors de la 2ème phase. Et cela peut avoir un impact bien plus important, car les renforts vont ruisseler sur une province adjacente. Province qui semblait promise à un autre joueur, mais l’arrivée de 2 renforts bouleverse la situation et change le vainqueur. Nouvel effet domino avec 2 renforts qui vont arriver dans une autre province adjacente, si le vainqueur y était déjà présent.
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Daimyos et variante
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Vous pouvez si vous le souhaitez ajouter à ce jeu au final plutôt simple, les Daimyos, vos chefs de guerre. Ils auront un impact différent sur le champ de bataille, et surtout la possibilité de déclencher un effet supplémentaire, qui va rajouter un élément de « surprise » sur le champ de bataille pour les autres joueurs. Des cartes sont visibles au début de la partie, un joueur peut décider d’utiliser une carte et son pouvoir à son tour. Généralement, cela permet de déplacer des troupes amies ou ennemies d’une province à une autre, et donc de modifier les forces en présence. En fonction du moment où cela est déclenché, cela peut amener les joueurs à revoir leur stratégie, et se réadapter.
Un étage supplémentaire dans les règles, intéressant quand on connait le jeu ou quand on est joueur régulier. Je déconseille de l’ajouter pour les novices.

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Elégance et épure au service du gameplay
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C’est encore une fois un sentiment que je rencontre le plus souvent au contact de jeux asiatiques. Cette sensation que le surplus a été enlevé, que le jeu est pensé pour le joueur. Des règles lisibles, courtes et simples. Un gameplay basique en apparence (je lance des dés, je pose des troupes, fin de mon tour) mais profond et avec des conséquences. A l’heure où j’écris ces lignes, je reviens d’Essen où j’ai pu croiser quantité de jeux. Covenant de l’éditeur Devir me revient en tête avec un plateau surchargé, presque illisible, des règles à n’en plus finir, une sensation d’être perdu au milieu de l’océan devant ce « gros » jeu. Je n’ai pas aimé la partie que j’ai joué vous l’aurez compris. Et pourtant j’ai joué à de bien plus « gros » que celui-ci. Mais la façon de rédiger les règles, privilégier la lisibilité au lieu d’en mettre plein les yeux, épurer les règles et mécaniques, ça devrait être appliqué à tous les jeux avant de nous les proposer. Nous gagnerions un temps certain, et les jeux resteraient peut-être plus de quelques semaines en boutiques, mais c’est un autre sujet.
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Jouez-y !
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Sorti sous le nom de Rumble Nation en 2017, le jeu de Yogi Shinichi mérite qu’on s’y attarde. Rapide à expliquer et à jouer, profond et lisible, Sengoku vous permettra peut-être de faire jouer cet ami qui jouait beaucoup à Risk quand il était plus jeune et qui trouvait ça très bien ! Et bien en enlevant la lourdeur du gameplay, les brouettes de dés, la stratégie qui tombe par terre à cause de la poisse aux dés et le côté interminable du jeu, vous allez lui proposer d’incarner un chef de guerre à l’époque du Japon féodal, et en 20 à 30 minutes, vous verrez qui est le plus stratège d’entre vous !
La topographie change à chaque partie puisque vous placez les jetons de valeur des provinces au hasard. L’effet domino observé lors d’une partie sera complétement différent lors d’une autre. L’anticipation et l’observation du plateau avant de démarrer votre tour sera indispensable pour entrevoir la victoire.
Je retrouve les bonnes sensations que j’avais eu avec First Empires, un jeu de Eric B. Vogel sorti en 2022 et qui reléguait aussi Risk aux oubliettes. Sengoku et First Empires sont une alternative très crédible dans les jeux de conquête de territoire avec des gameplay simples, abordables et dynamiques. En plus proposés à des tarifs abordables, argument non négligeable.
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Prix constaté : 32 €
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