Test: Tekhenu

par | 17 Oct 2020 | Tests | 0 commentaires

Tekhenu, l’obélisque du soleil est le nouveau jeu de Daniele Tascini et David Turczi. 2 noms qui devraient vous parler, mais si ce n’est pas le cas, peut-être que quelques titres comme Tzolk’in, Teotihuacan pour l’un et Anachrony, Kitchen Rush ou encore le récent Perseverance pour l’autre pourraient vous être plus familiers.

Une chose est sûre, les deux compères sont des auteurs de jeux experts et Tekhenu ne déroge pas à la règle. Le titre du jeu s’inscrivant dans une suite de titres commençant tous par un T (chacun ses lubies) avec Teotihuacan, Trismegistus et prochainement Tawantinsuyu. Pour Tekhenu, c’est Board & Dice qui édite la version originale du jeu, la version française étant proposée par Pixie Games.

Côté artistique, ce sont 4 artistes, Jakub Fajtanowski, Michał Długaj, Zbigniew Umgelter et Alexander Zawada, qui nous proposent les visuels très réussis du jeu avec un plateau central chargé mais au final très lisible !

Le jeu est prévu pour 1 à 4 joueurs, à partir de 14 ans et pour une durée comprise entre 1 et 2 heures, et avec un automa pour le solo du même acabit que celui de Teotihuacan qui avait plu aux amateurs.

La comparaison avec le grand frère inca ne s’arrête pas là, le jeu semble velu et exigeant, mais derrière cette carapace de gros jeu se cache un jeu accessible (aux joueurs aguerris) qui se joue assez rapidement avec des parties à deux joueurs de moins de 60 minutes !

Commençons par le matériel avant de plonger dans les mécaniques de la bête.

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Le matériel:

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La boite donne envie avec ce temple de l’Egypte antique et l’obélisque se dressant juste devant. Le matériel est lui aussi très attrayant et coloré, enfin des couleurs de joueurs qui ne sont pas les éternels bleus, jaune, rouge et vert… cette fois violet, rose, bleu (quel survivant) et orange sont de sortie et c’est bienvenu !

Le plateau central est trop grand, alors d’accord la mode actuelle est à des tables bien remplies avec du matériel partout mais tout le monde ne dispose pas d’une table familiale pour 8 personnes. Pour en finir avec les points qui me déplaisent, parlons de l’obélisque ! Comment, pendant les playtests, l’éditeur ne s’est-il pas rendu compte que l’objet était totalement inutile et pire encore, qu’il bloque la vision sur les dés se situant de l’autre côté ? je n’ose imaginer une action perdue par un joueur parce que l’obélisque l’a empêché de voir un dé ! Lors de toutes les parties que j’ai faites, les joueurs ont naturellement rangé l’obélisque sans que je le propose.

Un petit point sur le livret de règles qui n’est pas des plus adapté. Je n’aime vraiment pas ces livrets avec les phases de scoring expliquées avant les actions de jeu, ça me perturbe et j’ai plus de mal à tout assimiler. Pour le reste, il est clair avec des exemples logiques.

Mais ne restons pas sur un mauvais jugement, le plateau est certes grand mais lui et les plateaux individuels sont terriblement efficaces et lisibles. L’iconographie du jeu, une fois lue, est immédiatement maîtrisée et il est rare qu’un joueur ne comprenne pas une action ou une carte et si cela est le cas le livret de règles dispose d’un appendice disposant d’une explication pour chaque carte et chaque tuile du jeu, beau travail !

Le matériel se compose donc, pour chaque joueur, d’un plateau personnel, d’éléments en bois pour les statues, marqueurs, piliers et maisons, de cartes au format mini (41×63 mm) et d’un plateau personnel bien fichu et lui aussi lisible avec de jolies illustrations.

Tout ceci est complété avec les 7 ressources du jeu au format punchboard de bonne qualité.

Au final le matériel est bon, on en a pour son argent avec une boite bien pleine et ce bel effet wahou à l’installation du jeu (avant de ranger l’obélisque dans la boite 😋).

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A quoi ça ressemble ?

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Comment on joue ?

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Le cœur du jeu est un draft de dés. Pour bien comprendre, il faut découper le plateau de l’obélisque en 6 parts.

Chaque part est à nouveau divisée en 3 zones.

Sur le tiers intérieur seront placés les dés interdits, au milieu les dés souillés et sur le tiers extérieur les dés purs.

La partie consiste donc à drafter un dé pour faire une action par joueur, tous les deux dés par joueur le soleil se déplace et l’obélisque est donc éclairée différemment, les dés changeront donc de zone dans leur part. Vous suivez ? Alors vous pouvez quasiment jouer !

Ajoutons qu’après 4 dés par joueur soit deux crans d’obélisque, on effectue une phase de Maat qui consiste, pour chaque joueur, à comparer la valeur totale de ses dés purs et la valeur totale de ses dés souillés (on aura parfois des ressources du côté souillé). Les joueurs peuvent utiliser des jetons de foi pour équilibrer la balance, le but étant d’être le plus possible à l’équilibre pour être premier sur les manches suivantes.

On continue ? Après deux phases de Maat, soit 4 crans d’obélisques, soit 8 dés, on effectue un scoring de mi-partie avant de repartir sur la deuxième moitié de partie avec le même fonctionnement.

Vous savez comment ranger les dés et comment une partie évolue, c’est pas mal, mais que faire de tout cela ? Des actions pardi !

Pour effectuer une action, vous ne pouvez utiliser que les dés purs et souillés.

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La part de plateau dans laquelle vous prenez le dé définit l’action que vous jouez. Les 6 actions possibles sont :

  • Horus : construction des statues de votre plateau perso. Les statues peuvent être construites sur les actions des 6 dieux pour obtenir un bonus à chaque fois qu’un joueur fera l’action du Dieu en question. C’est la valeur du dé qui définit sur quel Dieu vous pouvez construire votre statue. Sinon vous pouvez construire une statue autour de 2 zones de jeux, peu importe la valeur du dé, le temple et la carrière pour obtenir des points de victoire.
  • Ra :  construction du temple. La valeur de votre dé définit quelle tuile vous pouvez récupérer au marché. La tuile vous fournira des points de victoire selon les tuiles auxquelles vous la collez ou aux abords du temple. Elle vous rapporte aussi les ressources qu’elle recouvre. Un bonus peut être imprimé sur la tuile et pour l’obtenir il faut que l’action Ra soit éclairée comme le montre la tuile.
  • Hathor : construction de maisons. La valeur du dé n’est pas importante pour le début de l’action. Vous allez construire une maison où vous le souhaitez autour du temple en payant le montant en pain demandé par l’emplacement. La construction de maisons vous rapportera des points de victoire si vous avez des piliers dans la colonne/ligne de la maison et des ressources pour chaque tuile vide dans cette même colonne/ligne. La valeur du dé intervient ensuite pour vous permettre d’augmenter de sa valeur votre population. Sur la piste adéquate.
  • Osiris : construction d’ateliers. Le coût est unique de 1 bonheur en descendant votre marqueur de bonheur d’une case sur la piste. La valeur du dé définit la ligne dans laquelle placer votre atelier. L’emplacement choisi vous rapporte des ressources et des montées en potentiel de production sur votre plateau personnel (on le voit avec l’action de production).
  • Bastet : amélioration du bonheur. La valeur de votre dé vous fait augmenter d’autant le bonheur de votre population dans la limite de votre valeur de population. Tout ceci est défini sur une piste par un grand meeple représentant votre niveau de population et un petit meeple représentant le bonheur. Le petit meeple ne pourra jamais dépasser le grand tout simplement.
  • Thot : récupérer des cartes. La valeur du dé définit le nombre de cartes que vous pouvez récupérer. Les cartes que vous pouvez prendre sont divisées dans 4 zones. C’est votre bonheur qui limitera vos choix, son niveau sur sa piste ouvrant des zones de pioche et plus votre bonheur est élevé plus vous aurez de choix. Quand vous récupérez des cartes, attention ! Vous ne pouvez le faire que dans une seule zone pour limiter la puissance de l’action. Les cartes sont de trois types : les offrandes qui offrent une action unique mais puissante, les technologies qui modifient les règles en votre faveur et les décrets qui peuvent rapporter énormément de points de victoire.

Et voilà pour les 6 actions principales du jeu ! Bien entendu chaque action a un coût en ressources et pour récupérer des ressources en dehors des bonus un peu légers des actions, vous pouvez choisir de produire.

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La production est simple : la couleur du dé définit la ressource que vous produisez, sa valeur définit le nombre de ressources produites. Une fois ces ressources récupérées, vous en conservez autant que votre plateau personnel vous l’indique. Pour augmenter votre potentiel dans une ressource, c’est chez Osiris que cela se passe. Les ressources surproduites seront toujours placées du côté souillé de votre balance et auront une valeur de 1 chacun au moment de la phase de Maat.

Ajoutons l’action Anubis qui est une action joker vous permettant de prendre le dé de votre choix, même interdit, pour faire l’action que vous voulez. Le dé est de la couleur de votre choix, seule sa valeur ne change pas.

Une partie de Tekhenu se joue donc en 16 dés par joueur, divisés en 8 manches avec 4 phases de Maat et 2 phases de scoring !

Et le scoring est une petite salade de points avec des majorités chez Osiris, les statues posées d’Horus qui découvrent des points, les piliers posés sur les tuiles de Ra qui peuvent rapporter des points s’ils sont en face des maisons d’Hathor. Le bonheur monté par Bastet vous rapporte également des points selon le niveau atteint. Sur le plateau personnel, les productions montées au maximum vous rapportent des points tout comme certains niveaux de bâtiments posés.

Ouf ! Ça permet de scorer partout mais attention il vous faudra nourrir votre population selon le nombre de bâtiments posés. Et voilà pour le scoring de mi-partie. En fin de jeu il faudra ajouter 3 points pour celui qui finira premier joueur, 2 points au deuxième et les cartes décrets de chaque joueur.

Alors ce Tekhenu, c’est bon ?

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VERDICT

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Tekhenu est le digne petit frère de Teotihuacan :  un jeu pas si compliqué caché dans la carapace de ce qui ressemble à un gros jeu. Le matériel, les règles, les actions, tout semble indiquer un gros jeu expert, des parties de 3 ou 4 heures avec réflexion, analysis paralysis et stratégies dantesques à la clef. Que nenni ! Tekhenu est au final simple, il vous suffit de prendre un dé. Entre ceux qui vous offrent des actions qui ne vous intéressent pas sur le moment, celles où les dés sont interdits ou qu’il n’y en a plus, il faut que la valeur du dé vous intéresse également ! Bref il n’y aura pas 36 dés qui vous intéresseront quand votre tour viendra.

Mais pour autant le jeu ne bascule pas dans la frustration ! Les deux auteurs ont réussi ce tour de force de nous rendre fous mais sans nous dégouter du jeu, il y a tout de même toujours un dé pour faire quelque chose d’intéressant.

Chaque partie est différente, votre stratégie étant une constante adaptation aux dés restants, au décret avec lequel vous allez commencer la partie et bien évidemment une adaptation à ce que les autres joueurs vont faire !

Chaque stratégie est agréable à tenter : statues, temple, piste population/bonheur avec accumulation de cartes. Bien entendu les autres sources de scoring ne sont pas à oublier.

Après plusieurs parties, le jeu semble déséquilibré. Attention, il n’y a pas de stratégie gagnante à 100% mais les scores en fin de partie varient souvent du simple au double. De plus, certaines actions sont payantes surtout si les autres joueurs vous laissent les faire.

  • Poser des statues sur les Dieux. Vous obtenez des bonus quand les autres font l’action en question, un joueur qui pose trop de statues marquera énormément de points grâce à ces dernières mais avec les bonus c’est une partie grandement simplifiée pour ce joueur.
  • Je trouve deux cartes offrandes particulièrement fortes. Celle permettant de faire l’action d’un Dieu adjacent en plus de celle du Dieu choisi et celle permettant de faire l’action du Dieu opposé en plus de celle du Dieu choisi. Mais ce sont les cartes technologies qui peuvent créer de gros déséquilibres.
  • Les décrets sont également inégaux. Certains sont clairement trop puissants comme par exemple 3 PV par statue posée soit 18 PV en plus des 25 PV que les statues octroient de base. Si vous obtenez le décret qui en double un autre pour 2 ors… on est quand même sur 25+18+18 en fin de partie soit 61 PV en posant 6 statues qui, bien entendu, vous permettront d’obtenir bonus, majorité chez Osiris ou des PV au temple ! Fou non ? En face on peut parler du décret qui donne 10 PV si vous posez tous vos bâtiments soit 10 actions sur 16 pendant votre partie… c’est moins vendeur.
  • Et, bien entendu, si vous montez sur la piste de bonheur pour récupérer de nombreuses cartes, votre marqueur de bonheur vous offrira même une action gratuite en arrivant en bout de piste ainsi que 15 PV. Plutôt rentable !

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Il y a par contre des choses à éviter.

La principale est d’être dernier dans l’ordre du tour. C’est complètement rédhibitoire.

Le premier joueur a bien entendu l’avantage de choisir les dés en premier mais il est également le premier à prendre un bonus pour les manches suivantes.

Le choix des cartes de départ peut grandement aider. Encore une fois certaines sont clairement au-dessus comme celle offrant une technologie pour débuter la partie.

Alors, vu comme ça, le jeu semble voué à être joué 2 fois et oublié dans un coin. Et pourtant !

A chaque partie se reproduit ce phénomène mystérieux : on se fait plaisir ! On tente, on essaie on s’adapte et au final on est content de ce qu’on a fait. Ce jeu est bon, c’est une certitude, j’y prends le même plaisir qu’avec Teotihuacan et comme ce dernier je pense que Tekhenu accueillera rapidement une ou deux extensions pour équilibrer tout ceci.

En attendant Tekhenu reste un jeu très plaisant à jouer et à débriefer encore et encore une fois la partie terminée avec une excellente rejouabilité des parties au temps contenu. Et il fonctionne bien à deux joueurs alors pourquoi s’en priver ?

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